Afrique: la corruption alimente la crise de la démocratie

Jeudi 31 Janvier 2019 - 13:45

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Transparency international a pointé, dans son rapport 2018 publié le 29 janvier à Berlin, en Allemagne, la faiblesse des institutions africaines dans la lutte contre le phénomène, malgré quelques efforts des pouvoirs publics.

L’Indice de perception de la corruption (IPC) 2018 a révélé que l’incapacité chronique de la plupart des pays à contrôler efficacement cette gangrène est un facteur qui contribue à la crise de la démocratie dans le monde. « Notre étude établit un lien évident entre démocratie saine et lutte efficace contre la corruption dans le secteur public. La corruption a beaucoup plus de chances de prospérer là où les fondements démocratiques sont faibles », a souligné Delia Ferreira Rubio, présidente de Transparency international.

En 2018, le continent africain reste en dernière position en termes de perception de la corruption. Dans le rapport publié par l’ONG, l’Afrique obtient une moyenne de trente-deux sur une échelle allant de zéro à cent. Le continent est loin derrière l’Europe de l’ouest qui est la région la plus performante en matière de lutte contre la corruption, avec soixante-six points en moyenne.

Dans le Top 5 des pays les plus corrompus, sont classés deux pays africains : la Somalie prend la dernière place du classement, talonnée par le Soudan du Sud, au 178e rang. Malgré leurs mauvais scores, ces deux pays ont néanmoins gagné un point dans l’IPC par rapport à 2017.

Parmi les pays africains les mieux classés, les Seychelles occupent le haut du podium en se plassant 28e sur cent quatre-vingts pays. Puis, viennent le Bostwana qui a perdu sa place de champion continental (34e), le Cap-Vert qui reste stable à la 45e place. Le Rwanda et la Namibie sont respectivement à la 48e et la 52e place. Le Sénégal a cette année perdu un rang en prenant la 67e place au détriment de l’Ile Maurice.

Corruption et crise de démocratie

Selon l’ONG, il y a une forte corrélation entre « corruption et crise démocratique » sur le continent. Dans son rapport, Transparency international conclut que les pays qui ont un indice inférieur ou égal à trente-quatre sont des régimes semi-autoritaires, quand ceux qui ont un indice inférieur à trente sont des régimes autoritaires. En Afrique subsaharienne, treize pays, dont la Guinée (138e), ont obtenu un indice inférieur à trente. « La corruption effrite la démocratie et produit un cercle vicieux en sapant les institutions démocratiques. En effet, plus ces institutions sont faibles, moins elles sont en mesure de contrôler la corruption », a déclaré Patricia Moreira, directrice générale de Transparency international

Malgré le mauvais bilan africain, certains pays comme la Côte d’Ivoire (105e places, + trois points depuis 2015) et le Sénégal sont en progression constante. De plus, la progression de la Gambie est à souligner. Avec un indice à trente-sept sur une échelle de cent, la Gambie comme l’Érythrée a considérablement augmenté son score par rapport à 2007 : respectivement sept et quatre points de plus.

Transparency note que les pays qui s’en sortent le mieux en Afrique sont ceux qui ont des institutions stables et ont des gouvernements qui affichent leur souhait d’éradiquer la corruption, notamment l’Angola, qui a gagné quatre points depuis 2015.

L’ONG recommande aux pays d’Afrique d’intensifier leurs efforts en matière de protection des droits humains en favorisant la liberté d’expression et le droit des journalistes d’exercer leur métier. Elle préconise aux pays comme le Burundi et le Congo de s’engager dans la lutte contre la corruption au sein de leur système politique.

Pays à surveiller

Avec un score de soixante et onze points, les États-Unis ont perdu quatre points depuis l’année dernière, sortant de la liste des vingt pays en tête de l’IPC pour la première fois depuis 2011. Ce faible score intervient à un moment où des menaces pèsent sur le système de freins et contrepoids des États-Unis, où l’on assiste également à une érosion des normes éthiques dans les plus hautes sphères du pouvoir.

Le Brésil a également chuté de deux points depuis l’année dernière et enregistre un score de trente-cinq, qui est aussi son score le plus bas en sept ans.

Pour progresser réellement dans la lutte contre la corruption et consolider la démocratie dans le monde, Transparency international appelle tous les gouvernements à renforcer les institutions chargées de maintenir l’équilibre des pouvoirs ; à combler les écarts au niveau de la mise en œuvre de la législation, des pratiques et de l’application des normes destinées à la lutte contre la corruption ; à soutenir les organisations de la société civile et les médias libres et indépendants, et garantir la sécurité des journalistes.

L’IPC 2018 s’appuie sur treize enquêtes et évaluations d’experts pour mesurer la corruption du secteur public dans cent quatre-vingts pays et territoires, en attribuant à chacun un score allant de zéro (fortement corrompu) à cent (très peu corrompu).

Josiane Mambou Loukoula

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