Afrique : une étude tente de mettre en lumière les mécanismes de croissance des pygmées

Lundi 3 Août 2015 - 11:43

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Selon les travaux publiés le 28 juillet dans Nature Communications, si la stature des pygmées est adaptée à la forêt tropicale, les mécanismes de leur croissance sont mal connus

Une équipe  de chercheurs du Centre national de la recherche scientifique (CNRS)  a étudié, pour décrypter ces mécanismes de croissance, un groupe de pygmées Baka au Cameroun. D’après les résultats de leur recherche,  les pygmées grandissent  à un rythme complètement différent d’un autre groupe pygmée, malgré une taille adulte similaire. Ce qui implique que la petite taille est apparue indépendamment dans les deux ensembles.

Les pygmées qui vivent tous dans la forêt, en relation avec des agriculteurs bantous, sont composés de plusieurs ethnies, regroupées en deux grands ensembles : l’un s’étend dans des pays à l'ouest de l'Afrique équatoriale (Congo, Cameroun, Gabon, République Centrafricaine, RD-Congo) , et l’autre se situe à l'est, au nord-est de la RD-Congo et au Rwanda.

Si les pygmées tirent leur petite taille de la génétique, les chercheurs manquaient jusque-là de données fiables sur leur âge pour analyser leur croissance. Grâce aux registres de la mission catholique de Moange-le-Bosquet, au Cameroun, 500 membres de l'ethnie Baka ont pu être étudiés pendant huit ans ce qui a permis d'établir les premières courbes de croissance pour des Pygmées.

Et Si les Baka viennent au monde avec des mensurations standards, leur croissance est fortement ralentie jusqu'à l'âge de trois ans. Leur courbe de croissance suit ensuite en parallèle les standards mondiaux, avec une poussée de croissance à l'adolescence et une taille adulte atteinte en moyenne au même moment que le reste de la planète, d’après les chercheurs. Ils ne rattrapent cependant jamais leur retard. De leur côté, les Pygmées de l'est naissent avec une taille réduite. Leur petite stature est donc issue des processus de croissance différents des Baka.

La morphologie de ces populations découlerait donc de deux mécanismes différents, qui pourraient être liés à un déséquilibre entre l'hormone de croissance et les deux hormones IGF[en français, facteur de croissance ressemblant à l'insuline], et qui leur ont permis de s'adapter à la forêt équatoriale. Les chercheurs parlent alors de convergence évolutive, estiment-ils.

Ces groupes de Pygmées se seraient séparés il y a entre 8000 et 13 000 ans, ce qui montre que la croissance humaine peut évoluer en relativement peu de temps. Cette plasticité de la croissance a pu jouer un rôle déterminant dans l'expansion d'Homo sapiens en dehors de l'Afrique, en lui permettant de s'adapter rapidement à de nouveaux environnements.

Des résultats qui soulignent en outre qu'il faut « multiplier les études longitudinales, c'est-à-dire qui suivent les individus dans le temps, pour améliorer les études en génétique et en endocrinologie nécessaire pour mieux comprendre les mécanismes de croissance chez les Pygmées, mais aussi dans le reste de la population mondiale, chez qui ils sont également mal connus ».

Les chercheurs souhaitent désormais déterminer les processus endocrinologiques qui entrainent le ralentissement de la croissance pendant la petite enfance des Baka en identifiant les hormones et les structures cellulaires responsables de cette croissance particulière, en ciblant les gènes qui en sont à la base et en les comparant avec ceux des Pygmées de l'est. 

Noël Ndong

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