Centrafrique : un accord entre le pouvoir et le chef de guerre Ali Darass

Samedi 1 Août 2020 - 12:39

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Le Premier ministre centrafricain, Firmin Ngrebeda, a signé, le 30 juillet à Bangui, un accord avec Ali Darass, chef du groupe armé de l’Union pour la paix en Centrafrique (UPC).

Dans ce document appelé « procès-verbal d’un huis clos », le chef de guerre s’engage à rentrer dans le rang. En clair, Ali Darass a promis, après une semaine de négociations dans la capitale centrafricaine, de ne pas entraver le retour de l’autorité de l’État ainsi que la libre circulation des agents de l’Autorité nationale des élections dans les zones qu’il contrôle. Un arrangement favorable au pouvoir, à moins de cinq mois des élections.

Autre concession, le chef de l’UPC s’est engagé à retirer ses troupes de Bambouti, ville frontalière du Soudan, qu’il a conquise après la signature de l’accord de paix pour la Centrafrique de février 2019. Il y a consolidé ses positions malgré plusieurs ultimatums de la force de maintien de paix des Nations unies.

Ali Darass s’est également engagé à « publier sans délai un communiqué de presse » qui annule son alliance avec le groupe armé des 3R, accusé de multiples violations de l’accord de paix et sous pression militaire de la Minusca depuis plusieurs semaines. Enfin, il a promis qu’il n’aurait « aucun contact » avec le chef de guerre soudanais Moussa Assymei, dont un éventuel retour en Centrafrique fait peur aux autorités.

En échange, le chef du groupe armé UPC, chassé par les Casques bleus en janvier 2019 de la ville de Bambari, alors son quartier général, va faire son grand retour dans la capitale de l’Ouaka. Outre une « véritable institutionnalisation » de l'UPC et de son chef militaire pointée par les spécialistes, Ali Darass aurait obtenu une contrepartie financière, ce que nient catégoriquement les autorités.

L’opposition et la société civile crient à « la trahison ». L’ancien Premier ministre, Martin Ziguélé, rappelle que Ali Darass a attaqué à plusieurs reprises l’armée centrafricaine et massacré des civils depuis la signature de l’accord de paix. « On s’attendait plutôt à ce qu’il soit arrêté et traduit en justice », explique-t-il. Il s’insurge contre « un accord scandaleux et inacceptable pour le peuple centrafricain ». Et l’opposant centrafricain de trancher, « le retour d’Ali Darass à Bambari est un cadeau contre le bon sens ».

Le porte-parole du gouvernement, Ange-Maxime Kazagui, quant-à lui, parle d’un procès d’intention à l’approche de la présidentielle prévue en décembre. Le chef militaire de l’UPC va s’installer au chef-lieu de la province de l’Ouaka dans le cadre du DDR. « Il s’y rendra sans ses troupes et sous la garde des forces de sécurité intérieure », assure le porte-parole du gouvernement.

« Il a fait bon choix », s’est-il réjoui, sans parvenir à convaincre opposition et société civile, dont un collectif appelle à une journée ville-morte mercredi pour rien de moins que de « sauver notre nation en péril ».

Notons que cet énième accord avec un groupe armé s’inscrit dans la perspective de la préparation des élections.

Josiane Mambou Loukoula

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