Chaos libyen : Tony Bolamba avait tout prédit

Lundi 25 Août 2014 - 19:06

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Après la mort de l’ex-Guide de la Jamahiriya libyenne, le président du Moco avait tiré la sonnette d’alarme pour que les acquis engrangés sous le règne de Kadhafi ne soient pas sacrifiés sur l’autel des luttes intestines.

Le président libyen déchu Mouammar Kadhafi a été tué le 20 octobre 2011 aux alentours de Syrte après que le convoi qui le transportait a été bombardé par l’Otan. Exhumant ce sombre passé qui aura dépouillé l’Afrique d’un de ses grands dirigeants, le président du Mouvement pour le Congo (Moco) pense y tirer quelques enseignements qu’il a exposés dans une tribune publiée à Londres le jour du décès l’ex-guide de la Jamahiriya Libyenne.

« Le pouvoir est une chose étrange, il peut vous rendre fou, il peut décupler vos forces, il peut vous rendre pessimiste, il peut même rendre intelligent. Mais quoi que vous fassiez, qui que vous soyez, il finira toujours par vous mettre face à vous-même », a-t-il fait remarquer comme pour pousser les chefs d’État, d’Afrique et d’ailleurs, à une réelle introspection sur le sens du pouvoir qui, par ricochet, est d’essence éphémère. « Lorsqu’un leader meurt tragiquement, cela crée des ressentiments auprès des siens. Car les États africains sont des mosaïques d’ethnies, et dans la majorité de nos États, se sont des grands hommes qui réussissent à transformer leurs sociétés tribales en Nation. En humiliant un leader à sa mort, cela détruit l’incarnation du principe d’autorité », réfléchissait-il.

En fait, l’auteur de la réflexion voulait certainement pousser les populations africaines à éviter à ce que tout changement au sommet de l’État ne se négocie dans le sang de peur de provoquer un effet traumatique durable à l’instar de la société libyenne qui peine à se remettre de la disparition tragique du colonel Mouammar Kadhafi. Remontant plus loin dans le passé, Tony Bolamba s’est aussi souvenu des péripéties ayant entouré l’assassinat le 10 septembre 1990 du président libérien Samuel Doe capturé par des rebelles du National patriotic front of Liberia commandé  à l’époque par Charles Taylor. De ces deux tableaux quasi similaires, il en a dégagé une morale : « si l'on vit très longtemps, on voit que toute victoire se change un jour en défaite ! Raison pour laquelle dans la vie, il faut savoir passer la main ».

Qu'en est-il de l'après Kadhafi?

Fermant la parenthèse, il en a ouvert aune autre pour s’interroger sur l’après Kadhafi dont la disparition aura peut-être marqué la fin du combat mené depuis des lustres par le Conseil national de transition. Tout en craignant que sa mort tragique ne puisse ouvrir une période semblable à celle de la Somalie ou de l’Irak, Tony Bolamba a estimé, à juste titre, « qu’il faudra des années et beaucoup de violences en Libye avant que tous les tribus reconnaissent un nouveau leader ou que le système tribal libyen soit remplacé par une autre forme d’organisation sociale et politique ». Il ose croire cependant que « les nouvelles autorités libyennes respecteront la démocratie et les libertés fondamentales de tous les Libyens car dans une révolution, il n’y a qu’un vainqueur : c’est le peuple souverain de Dieu ».

Déjà, à l’époque, il avait tiré la sonnette d’alarme pour que les acquis engrangés sous le règne de Kadhafi ne soient pas sacrifiés sur l’autel des luttes intestines. Ces acquis, c’est par exemple, la construction de la « Man Made River », l’un de plus importants travaux d’irrigation au monde qui passe pour un héritage formidable légué par Kadhafi à ce pays désertique. Tony Bolamba a également évoqué la politique de la nationalisation des hydrocarbures conçue sous son régime laquelle a permis une redistribution de la rente pétrolière sur fond d’amélioration de la vie des libyens.

En bon visionnaire, Tony Bolamba avait senti déjà le roussi après la mort de l’ex-guide de la Jamahiriya libyenne et ses incessantes mises en garde n’ont hélas pas trouvé preneur auprès d’une population qui avait tout pensé, sauf à l’après Kadhafi. Peu de temps après la mort de ce dernier, en effet, il ne s’est plus passé un seul jour sans que l’on ait assisté à des affrontements violents et meurtriers entre les milices les plus puissantes et les mieux organisées du pays. Plus que jamais, la Lybie a besoin « d’une chirurgie médico-sociale qui lui permettra d’opérer un changement profond à même de lui permettre d’envisager avec sérénité son développement ».

 

 

 

 

 

 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Tony Bolamba