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Coopération économique régionale: vers une zone de libre-échange ACP-UE ?

Lundi 12 Septembre 2016 - 11:09

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L’intégration harmonieuse des 48 pays d’Afrique, des 15 pays de la Caraïbes et des 14 pays du Pacifique (ACP) dans la mondialisation, dépend de leur capacité à   négocier,   conclure   et   tirer   profit   des   accords   asymétriques   avec   leurs principaux partenaires.

I- Des accords asymétriques des ACP :  Avec l’Union Européenne (UE), ils datent   du   Traité   de   Rome   du   5   mars   1957,   instituant   la   Communauté Economique Européenne et prévoyant une aide aux pays membres et territoires d'Outre-Mer   sous   la   forme   d'une  Convention   d'application   relative   à l'association.   Depuis,   deux   Conventions   de   Yaoundé   (1963,   1969),   quatre Conventions de Lomé (entre 1975-2000), un Accord de Cotonou (2000), et un Accord de Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (2001), fondent   un   partenariat   économique   basé   sur   la   préférence   commerciale   non réciproque, la suppression des droits de douane des exportations des ACP vers l’UE, et le maintien des droits de douanes sur leurs importations de l'UE vers les ACP. Mais, ce dispositif s’accompagne des barrières non tarifaires ou normes de l’UE, limitant   les   exportations des  produits   manufacturés   des   ACP   vers   l’UE;   des subventions agricoles de l'UE à ses producteurs, rendant peu compétitives les productions des ACP; et des pertes de change que les réserves bancaires des ACP   ne   peuvent   couvrir   sans   recourir   à   l’emprunt,   conséquences   des asymétriques accords de coopération monétaire de 1999, établissant un système de change à taux fixe des monnaies des ACP avec l’Euro, faiblement régulé par les aides du Fonds Européen de Développement aux ACP de 22 milliards d’Euros de   2002-2006,   puis   de   22,7   milliards   d’Euros   de   2008-2013,   jusqu’à   30,5 milliards d'Euros de 2014-2020.

Avec les USA, la loi sur la croissance et les potentialités de l’Afrique (2000) permet   aux  ACP d’exporter  certains   produits  en  franchise   de  droits vers   les USA.  Avec   le   reste   du   monde,   l’accord   sur   la   facilitation   des   échanges   de l’OMC de Bali (2015) vise la réduction des coûts d’exploitation dans les zones de libre-échange.

II- Les résultats: La part des exportations des ACP vers l'UE décroît, en passant de   7   %   en   1975   à   3   %   en   2009.   En   2013,   les   échanges   Afrique-UE représentaient 358 milliards de dollars USD dont 150 milliards d’exportations de l’UE   vers   l’Afrique   et   208   milliards   d’exportations   de   l’Afrique   vers   l’UE.

L’Afrique, avec une croissance moyenne de 5% par an depuis 10 ans, est un relais efficace de la croissance pour l’UE et pour les pays émergents. La Chine, le leader des BRICS qui détient 17,7% de la part de marché de l’Afrique, est devenue   le   principal   partenaire   commercial   de   ce   continent;   alors   que   les échanges de l’Afrique vers les USA stagnent à 110 milliards  de dollars USD.

Or, faiblement diversifiées et faiblement industrialisées, les économies africaines demeurent des fournisseurs des hydrocarbures et des produits miniers à 72% de leurs exportations vers l’UE, contre 28% seulement des produits manufacturés à valeur ajoutée.

III- Vers un accord de libre-échange global: Depuis 2002, l’UE négocie des Accords de Partenariat Economique (APE) avec les ACP, pour former une zone de libre-échange   UE-ACP.  Ces   accords  prévoient   dès   2007:   l'interdiction   de l'augmentation   ou   de   la   création   de   droits   de   douanes   à   l'importation, l'interdiction   de   quotas   d'importation   ou   d'exportation,   la   suppression progressive   des   subventions   à   l'exportation   des   produits   agricoles   de   l'UE, l'interdiction   des   pratiques   commerciales   déloyales  et   la   mise   en   place   des mesures de sauvegarde multilatérales temporaires.

Les pays de la Caraïbes ont signé un APE en 2009. Ceux d’Afrique de l'Ouest, Australe et Orientale ont conclu des APE adaptés en 2014. Les négociations peinent à aboutir dans la Configuration Afrique Centrale, unissant la CEMAC, la RDC et Sao Tomé. Le Cameroun a signé en 2009, un APE intérimaire avec l’UE, fixant un démantèlement tarifaire sur 17 ans.  Ratifié en juillet 2014, il est opérationnel depuis  le   04  août  2016.  Le  Congo a   signé, en  juillet 2016,  un accord  de   convertibilité   du   Franc CFA avec  le  Yuan chinois.  Ces   initiatives appellent   un APE et   un  accord   monétaire   équitables   avec   l’UE,   afin   que   la Configuration Afrique Centrale batte sa propre monnaie comme la CEDEAO en 2020. Ainsi,   le   profil   économique   des   ACP   exige   une   libération   progressive   et maîtrisée   de   leurs   marchés   commerciaux   et   monétaires   dans   le   cadre   d’un Programme Régional d’Accompagnement du Développement, renforçant leurs capacités   avant   l’instauration   d’une   zone   de   libre-échange   UE-ACP.   Une meilleure   coordination   de   leurs   intérêts   s’impose,   pour   mieux   conjuguer   les conséquences de l’ouverture généralisée des marchés.

 

Par: Emmanuel OKAMBA Maître de Conférences HDR en Sciences de

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