Couleurs de chez nous : le Noir et le microbe

Vendredi 6 Juillet 2018 - 18:51

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Un tel titre fait penser à un ouvrage. Il n’en est rien. Sinon : la mise en exergue d’une culture partagée au Congo où l’on a tendance à penser que « le Noir ne meurt pas de microbe ».

On le dit, on le clame et on passe à l’action sans en mesurer les conséquences alors que chaque jour qui passe, on ne cesse de compter des décès sans explications et des maladies liées au manque d’hygiène. C’est ainsi que des mères laissent leurs nourrissons à même le sol, parfois dans la boue avec l’idée en tête que ce contact va l’immuniser et le prémunir contre les maladies.

Cette phrase acceptée par tous, ou presque, comme une vérité d’évangile s’explique par bien de facteurs, notamment l’inculture et la pauvreté. Parce que l’ignorance est un danger, les gens se permettent des comportements qui peuvent se retourner contre eux. De même que faute de moyens, on ne peut que se contenter de peu ou de rien qui peut se traduire en termes de qualité.

Il faut parfois des campagnes de sensibilisation pour changer les habitudes. La résurgence d’Ebola contraint les gens à se laver les mains avant de consommer un aliment alors que les mêmes, dans des conditions de manque d’eau, ont toujours clamé que « le Noir ne meurt pas de microbe ». C’est parce que l’on manque d’argent que l’on se contente de consommer des produits moins chers mais souvent exposés aux intempéries et aux mouches. D’où l’alibi du Noir qui ne meurt pas de microbe.

La diffusion récemment d’un reportage sur les conditions de fabrication du pain à Brazzaville a interpellé la conscience de ceux qui l’ont suivi avec, chez certains, l’engagement de ne plus consommer ce produit. Peine perdue peut-être car le pain n’est qu’un produit parmi tant d’autres dont les conditions de fabrication ou de vente ne répondent à aucun critère d’hygiène.

Il y a quelques jours, nous produisions une chronique titrée « QHSE » : Qualité – Hygiène – Sécurité –Environnement. Un sigle qui doit dicter notre pratique quotidienne. Dans nos rues et marchés, on voit des femmes vendre avec des enfants dans les bras ou jouant au sol. Et l’image venant d’elles est souvent inacceptable : servir les acheteurs après avoir torché l’enfant qui vient de faire des selles. Et que dire de ces femmes qui servent les morceaux de manioc, les mains nues, du matin au soir sans que l’on aperçoive un récipient d’eau pouvant témoigner de leur degré d’hygiène ?

 A la décharge de l’Etat, cette pratique rampante tranche avec sa politique en matière d’éducation nationale ou publique. Il n’est que de revoir les programmes scolaires ou de fixer le regard sur les programmes radio-télévisés pour comprendre que l’hygiène fait partie des priorités de l’Etat.

D’où ce résumé de questions : d’où vient cette pensée dangereuse sur le Noir qui ne meurt pas de microbe ? Et pourquoi ce refus collectif des règles d’hygiène dans notre vie privée et dans notre culture ? Donnons-nous cette peine d’observer nos faits et gestes pour mesurer la pertinence de cette chronique qui sonne comme une interpellation.

Van Francis Ntaloubi

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