Couleurs de chez nous : sorcier !

Vendredi 19 Janvier 2018 - 18:02

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Ni injure, ni statut. Plutôt un phénomène de société qui, au Congo, connaît une inflation des plus inquiétantes. Les uns sont accusés, les autres sont d’éternelles victimes et, au centre : celles et ceux qui tirent les marrons du feu et se satisfont des conséquences.

Hier, le sorcier, c’était l’oncle qui, pour des raisons diverses, nuirait à la vie de ses neveux et nièces. Faisant trépasser certains ou bloquant l’évolution sociale et professionnelle des autres. Au moindre décès dans la famille, on recourait au féticheur, marabout ou voyant pour déterminer la cause et l’auteur. Et ceci, quelle que soit la nature du décès et l’âge de la personne.

Une femme qui a des soucis de procréation ou qui peine à trouver un mari a vite trouvé un alibi : le sorcier. Année après année, le phénomène devient un fonds de commerce. Un moyen de manipulation.

Pourtant, malgré les ravages, le sujet semble ne pas interpeller. Car les  pouvoirs publics restent sourds et aveugles alors que, chaque jour, des plaintes dans ce sens sont déposées au niveau des tribunaux traditionnels. Ajoutant au désordre, les médias alignent des productions aux allures de vulgarisation du phénomène.

Comme ces derniers, des prophètes y tirent un contenu à servir à celles et ceux qui les consultent. Et que dire de ces pasteurs dont les homélies reposent essentiellement sur la sorcellerie comme cause des échecs de leurs adeptes ?

Dans les familles, les querelles sont légion et nombreux sont ces frères et sœurs qui se regardent en chiens de faïence, parce que celles-ci soupçonneraient ceux-là d’être à l’origine de leurs malheurs. Les mêmes accusations ne manquent pas entre conjoints. L’adultère, considéré comme la première cause du divorce, n’existe plus que de nom car, dans la pratique, il est facilement pardonné que ne l’est un simple soupçon de sorcellerie surtout s’il est distillé par le pasteur. C’est peu dire !

Ils ne se comptent plus ces cadres qui vivent reclus, parce que sur eux s’est posé un regard accusateur. Les proches oublient les sacrifices faits par ce dernier qui suait sang et eau pour affronter ses études et décrocher des diplômes. La moindre réussite sociale devient un motif et vous expose aux critiques.

Interprétant mal les contenus et les objectifs des films nigérians, les Congolais font dans l’excès, la déviance et le déni pour vouer aux gémonies ceux des leurs dont ils ne comprennent pas ou s’expliquent mal l’émergence dans la vie. Au-delà de tout, cette déviance sociale reste le fruit de l’analphabétisme. En effet, ceux qui accusent les autres cèdent facilement aux supputations entendues et, surtout, aux idées reçues.

Faut-il dire que la sorcellerie n’existe que de nom ? Non, assurément. Parce qu’il n’est pas dans nos intentions de frustrer nos lecteurs ou une catégorie de Congolais. On retient seulement une chose : accuser l’autre de sorcier est devenu monnaie courante au point que le phénomène, dans son ancrage et son extension, intègre les caractères qui font la société congolaise d’aujourd’hui plus que d’hier. Pour preuve : il nourrit l’inspiration des artistes./-

 

 

    

 

 

 

 

 

 

 

Van Francis Ntaloubi

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