Ebola : des dégâts économiques de grande ampleur en cas de scénario catastrophe en Afrique

Samedi 11 Octobre 2014 - 5:00

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Face à l’incertitude sur la capacité de contenir l’épidémie d’ici à décembre 2014, la dernière étude de la Banque mondiale (BM) publiée le 8 octobre projette deux cas de figure, dont le pire scénario qui verrait le virus mortel se propager dans la région, entraînant des pertes de l’ordre de 32,6 milliards de dollars américains à la fin de l’année 2015

Une telle perspective ne peut que pousser à une mobilisation de la communauté internationale pour empêcher le virus de progresser dans les pays voisins avant l’ultime étape qui verrait toute la région africaine être en proie à une épidémie mortelle sans précédent. En termes de décès, cette épidémie remporte déjà un triste record : plus de 3 400 morts dans les trois pays les plus touchés, en l’occurrence la Guinée, le Libéria et la Sierra Leone. Si le virus gagne encore du terrain, principalement dans les pays voisins, les grandes économies de la sous-région d’Afrique de l’Ouest seront très affectées, du moins dans un premier temps.

Pour l’heure, la seule certitude est la difficulté de maîtriser l’épidémie dans les mois à venir. Et la raison est évidente. En effet, au stade actuel, il est impossible de prévoir son parcours ou sa progression. Aussi les experts de la BM ont-ils tablé sur deux cas de figure à moyen terme, c’est-à-dire d’ici la fin de l’année 2015. Dans le tout premier cas, l’étude se place dans un scénario de maîtrise rapide de l’épidémie dans les trois pays les plus affectés. Mais dans le second cas, du reste plus probable à défaut de réunir les moyens nécessaires pour une forte riposte internationale, l’étude se rapproche alors d’un scénario de progression du virus avec le risque d’une contagion à l’ensemble de la région.

En termes d’impact, la seconde alternative fait profiler des conséquences économiques notables sur la région. Il faut dès lors compter sur une mobilisation plus accrue pour faire face à l’épidémie avant qu’il ne soit trop tard. Une action à l’échelle nationale et internationale peut aider à barrer la route au virus d’Ebola. Et justement les cas plutôt intéressants du Sénégal et du Nigeria prouvent à suffisance que le virus n’est pas invincible et que la mise à niveau du système de prise en charge sanitaire peut opérer un vrai miracle. Il faut ainsi plus de médecins et de personnel qualifié, des lits d’hôpital en quantité suffisante et le soutien aux services de santé, a martelé l’étude.

La plus grosse inquiétude n’est pas seulement liée au nombre de décès enregistrés, mais il y a aussi le phénomène de psychose qui pousse les États à prendre des mesures préventives draconiennes pour se protéger du virus. On l’a vu avec les compagnies aériennes régionales ou internationales qui se sont empressées de suspendre leurs vols. Désormais, les experts classent Ebola au même titre que d’autres risques majeurs pour la croissance économique africaine, notamment le terrorisme.

Dans l’immédiat, la forte hausse des investissements publics dans les infrastructures, l’augmentation de la production agricole et le développement des services dans les domaines du commerce, des télécommunications, des transports et de la finance continueront à alimenter la croissance économique africaine. Sur ce point, les projections restent optimistes, en dépit de la baisse du prix des matières premières et des investissements directs étrangers par l’effet du ralentissement de l’économie mondiale. Il ne faut pas perdre de vue que les matières premières représentent les trois quarts des exportations africaines. Mais la progression d’Ebola, au même titre que celle des activités terroristes de Boko Haram et Al Shabab, aura tout simplement des conséquences dramatiques sur les économies africaines.

Laurent Essolomwa