Espace culturel Pamoja : une source d’inspiration pour les artistes africains

Samedi 10 Mai 2014 - 1:30

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L’espace culturel Pamoja a ouvert ses portes le 18 avril et s’apprête à lancer sa première exposition. Christian Tchicou, le directeur des lieux, affiche de grandes ambitions. Nous l'avons rencontré

Avant même son ouverture, l’espace Pamoja avait de belles cartes en main : Youssou N’Dour comme parrain, Claudia Sassou-N’Guesso comme marraine, et le chef de l’État comme président du comité du haut patronage conjoint. Avec une surface de 246 mètres carrés, l’espace entend se consacrer entièrement à l’art. « 200 mètres carrés seront dédiés à la peinture et le reste ne présentera que de la sculpture », précise Christian Tchicou. Les visiteurs se retrouveront au rez-de-chaussée, au milieu des sculptures, avant de monter à l’étage pour être entourés de peintures. Pour l’exposition, le directeur a choisi de miser sur la nouveauté.

Contrairement aux infrastructures habituelles, les tableaux ne seront pas posés contre un mur mais suspendus et en double face. « Les toiles sortiront du mur pour qu’on puisse se mouvoir dans l’espace », confie-t-il. La première de ces toiles nouvelle génération a d’ailleurs été acquise par le président Sassou-N’Guesso et sera dévoilée fin mai lors de l’inauguration de l’espace. Les premières œuvres et les premiers artistes seront alors présentés au grand public. Dans la foulée, une grande exposition-dîner de gala aura lieu au mois d’août, où soixante-dix œuvres inédites seront exposées.

Un forum Pamoja se prépare autour du thème « L’art africain contemporain au service de l’identité, de la culture, de la paix et de l’émergence ». Tous ces événements programmés vont se tenir dans le cadre de la première des cinq biennales d’art contemporain africain prévues à Brazzaville entre 2014 et 2024 et devraient également s’installer en France.

En plus d’organiser des événements culturels, Christian Tchicou entend  bousculer les habitudes et la vie culturelle et artistique du Congo en relevant certains « défis ». L’un d’entre eux était la création d’un fond de soutien Pamoja au bénéfice des plasticiens africains qui ne bénéficient pas d’aide financière de l’État ou du ministère de la Culture : « Nous avons ouvert un compte sur lequel nous avons mis des fonds qui sont destinés à soutenir les plasticiens africains d’où qu’ils soient. ». Ce projet s’applique aux nouveaux artistes et également à ceux que l’on connaît peut-être, déjà issus de structures existantes.

L’espace Pamoja entretient d’ores et déjà des relations avec l’atelier Sahms, dirigé par l’artiste Bill Kouélany, et le collectif Art Kintuadi : « Ce sont des jeunes très talentueux, de vrais artistes, qui m’ont ému ». Pamoja doit avant tout servir de vitrine aux plasticiens et à leurs créations. « Nous devons les porter, les soutenir et les présenter de manière optimale pour qu’ils se fassent connaître » affirme Christian Tchicou.

Cette philosophie est valable pour les artistes qui vivent sur le continent mais aussi pour ceux qui ont choisi de s’expatrier en Europe ou en Amérique du Nord. Dans un monde aujourd’hui interconnecté, l’espace Pamoja a l’ambition de faire venir la diaspora congolaise d’elle-même auprès du centre : « Pamoja se bat pour devenir un monument d’inspiration, qui inspirera tout les jeunes d’Afrique et de la diaspora. Tous ceux qui se reconnaîtront dans nos valeurs viendront. »

Christian Tchicou marque donc son souhait de réunir le plus de plasticiens possible mais aussi éventuellement d’autres artistes. Pour l’instant, l’espace se concentre sur la promotion des arts plastiques. « C’est notre colonne vertébrale », lance-t-il, et d’ajouter : « Nous sommes en train de nous structurer pour devenir une référence. » À long terme, la direction prévoit d’accueillir d’autres formes d’art afin de devenir un véritable « bouillon de culture » et mettre à l’honneur l’ensemble des disciplines artistiques d’Afrique ou du monde.

Si le maître des lieux défend à ce point l’art, c’est qu’à ses yeux il est essentiel à la fois aux hommes et aux États. Ainsi explique-t-il que « l’art est une matière première au même titre que l’or et le pétrole. Il faut remettre la culture au centre du débat et elle doit devenir un pilier du développement. L’Afrique doit reconsidérer la culture. » Voilà d’où vient l’ambition d’installer au sein même de l’espace Pamoja une salle de vente de prestige à l’image de celles des grands groupes étrangers comme Christie’s ou Sotheby’s, deux leaders mondiaux du marché de l’art. Une telle salle de vente pousserait les acheteurs et les personnalités éminentes de l’art à se déplacer en Afrique pour y voir les œuvres réalisées.

En véritable passionné d’art africain contemporain, Christian Tchicou veut montrer par le biais de l’espace Pamoja qu’un artiste africain peut-être vendu comme un artiste américain ou européen lors des grands rendez-vous internationaux « au même titre et au même prix », affirme celui qui veut surtout montrer « qu’en Afrique on est capable de réaliser, de créer et d’innover ».

Maëva Bemba