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État islamique : angoisse et latence de la communauté internationale

Lundi 25 Mai 2015 - 13:30

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Comment comprendre le jeu auquel se livrent les puissances occidentales au Proche Orient, dans la lutte qu’elles ont engagée contre les djihadistes de l’État islamique ? Au même moment, en effet, où elles multiplient les déclarations apitoyées et apeurées sur l’avenir de cette région au cas où les islamistes parvenaient à leurs fins, elles regardent sans sourciller s’effondrer le régime de Damas. Car, même si le président syrien Bachar Al Assad n’a pu souscrire aux appels de la Communauté internationale qui lui demandait, entre autres, de composer avec son opposition armée « modérée » s’aliénant de fait les sympathies des « grands » de ce monde, la guerre que mène ce qui reste de ce pouvoir aujourd’hui est dans une certaine mesure aussi dirigée contre la nébuleuse terroriste.

Au regard de la double pression militaire et diplomatique, chaque jour grandissante, qui s’abat sur le pouvoir en place à Damas, de la part des djihadistes et des puissances qui lui sont hostiles, il est permis de croire à un écroulement rapide de ce régime. Depuis quatre ans, Bachar Al Assad et ses partisans auraient tout tenté pour résister à l’isolement international qui les étreint, ils se sont dépensés pour contenir la furie des rebelles, le vent ne tourne plus en leur faveur. À présent que les insurgés contrôlent plus de 50% du territoire syrien et s’enfoncent inexorablement en Irak, les y déloger ne va pas être une tâche facile. La preuve, depuis plusieurs mois, les États-Unis et la France ne parviennent pas à modifier le rapport des forces sur le terrain en dépit d’un engagement aérien soutenu.

On se trouve dans une situation paradoxale où, devant le même ennemi honni par tous – l’organisation de l’État islamique en l’occurrence -, les forces qui jurent le combattre s’affaiblissent mutuellement. Imaginons le scénario, plus que probable, où les rebelles islamistes conquièrent Damas, la capitale syrienne, et y établissent leur administration. Ils renforceraient même moralement tous les groupuscules créés ici et là, qui lui ont fait allégeance. De quelle marge de manœuvre disposerait alors la Communauté internationale pour réagir ? De la même, presque, peut-on dire, comme c’est souvent le cas en de telles circonstances, qui consiste à appeler à la formation d’une vaste coalition entérinée par les Nations unies, afin d’« empêcher par tous les moyens l’avènement d’un régime obscurantiste et barbare dans un monde libre ».

La même erreur fut commise en Libye lorsque la coalition menée par la France obstrua toute démarche de l’Union africaine d’user du dialogue pour convaincre Mouammar Kadhafi de réaliser qu’il ne s’en sortirait pas au moyen des armes dont il disposait. Le change est donné, depuis, par l’installation du chaos en Libye. Même si des efforts sont entrepris pour remettre ce pays en ordre, cela passera encore par d’énormes sacrifices que devront endurer les populations civiles livrées à elles-mêmes.

Dans un an, ou deux, sait-on jamais, il pourrait se produire la même chose en Syrie. Le fait accompli est-il peut-être même proche. Quand ce sera le cas, Bachar Al Achad perdrait ainsi le pouvoir qu’il dispute à ses ennemis depuis de longues années avec le décompte lugubre des dizaines de milliers de vies de ses compatriotes sacrifiées. Pour ce qui la concerne, et si l’on observe que les cinq membres du Conseil de sécurité de l’Onu  (États-Unis, Russie, France, Grande-Bretagne, Chine) convoitent de déterrer la hache de la guerre froide, la Communauté internationale a montré sur plusieurs terrains ravagés par des conflits armés du même type, qu’elle est en perte de vitesse et d’initiative. Elle a  globalement perdu le réflexe de savoir choisir entre ce qui est bon, ce qui est moins bon, et ce qui est pire. Les théâtres syrien, libyen, irakien, yéménite et ukrainien montrent, s’il en était besoin, qu’elle ne se montrera pas à la hauteur de sitôt.

Gankama N'Siah

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