Opinion

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Foin de mots, l’exemplarité d’abord !

Vendredi 23 Janvier 2015 - 16:45

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En lisant la presse congolaise cette semaine, je suis  sidéré par les prises de position de certains hommes politiques volontairement amnésiques, quand ça les arrange. Le peuple n’est pas dupe. Depuis le début de la République les dérives ethno régionales actuellement décriées, à des fins politiciennes, sont récurrentes dans le paysage politique congolais comme l’illustre cette interpellation de Leyhet Gaboka, député  Msa. Elle a pour but de remettre les pendules à l’heure. Collectivement, nous avons failli, de ce point de vue et  n’avons fait aucun effort pour nous départir de ces comportements grégaires. Cessons donc de  nous poser en donneurs de leçons, quand bien même notre pratique nous disqualifie.

Mercredi 15 juin 1960, l’Assemblée nationale s’est réunie en séance plénière pour entendre une interpellation, écrit la Semaine Africaine, à ce sujet. Tous les députés de l’opposition, à part les membres du gouvernement, sont passés à la tribune, mais le grand débat a été mené par Monsieur Leyhet Gaboka, député de la Likouala-Mossaka. C’est par la fidélité au corps électoral déçu qu’il estime devoir rappeler au Gouvernement ses devoirs : « le peuple congolais attend de nous l’accomplissement de  tant de promesses dont nous l’avons abreuvé ». Il rappelle l’œuvre française et se demande  dans quelle mesure les changements survenus ont bénéficié aux populations depuis le départ de l’administration coloniale.

Il critique le gonflement des ministères : «  de juin 1959 à avril 1960, le personnel de 11 ministères passe de 60 à 77 postes politiques »

« Pour vous en convaincre, je vous invite à comparer le contenu du décret n°59/94 du 30 avril 1959 avec celui du décret 60/97  du 3 mars 1960. Prenez  le journal officiel du 1er juin 1959 et vérifiez ce qui a été publié à la page 373 par rapport à la page 245 du « J.O » du 1er avril 1960, en fait de postes  politiques crées au sein des cabinets ministériels grassement appointés. Viennent  encore 7 autres hommes politiques à qui   sont attribués des contrats de complaisance aux émoluments élevés, suivis de 4 autres postes. Soit autour de 11 ministères un total de 120 postes politiques  que je vous avais signalés lors de notre séance plénière du 21 mai 1960. Mais en réalité ce chiffre reste au-dessous de la réalité. Il nous revient en effet que des sommes substantielles sont prélevées du denier public et réparties par certains ministres entre leurs agents de propagande électorale qualifiés, pour officialiser la façade de « chargés de mission ». Et il parait que ces personnages seraient au nombre d’au moins quinze individus bénéficiant en plus d’autres avantages dits : frais de déplacement calculés suivant l’indice du groupe 1.

Ils peuvent, nous a-t-on  confirmé, obtenir des ordres  de mission qu’ils se font liquider (sic) par des agents spéciaux en brousse, ainsi opérant de cette manière , ils arrivent à se faire octroyer 45.000 francs par mois en plus des 50.000 qu’ils perçoivent régulièrement.

« D’autre part, entre Brazzaville, Dolisie et Pointe –Noire, il est effarant de constater le nombre impressionnant de voyages qu’effectuent ministres et secrétaires d’Etat, les innombrables « tournées » qu’entreprennent messieurs les « délégués politiques » à travers toute la République, sans oublier d’arbitraires affectations. et le tout aux frais de la princesse…

«  Sommes – nous élus pour satisfaire nos ambitions  personnelles et nous –mêmes ou bien pour travailler pour le peuple notre mandant et avec le peuple, seule entité de la Nation ? ».

Abordant un autre aspect de ses critiques, il s’en prend au gouvernement pour le racisme (1) qui, selon lui, réserve tous les privilèges « aux ressortissants d’une préfecture privilégiée ». «  Au total, nous comptons 116 Congolais actuellement en stage de perfectionnement en France, parmi lesquels nous affirmons que les trois quarts ne sont que des ressortissants d’une préfecture déterminée dont je tais le nom […] Nous déplorons  amèrement le racisme aberrant que notre gouvernement a instauré en son sein. Car nous ne devons pas faire des nôtres des panthères qui demain dévoreront les autres. Le soleil luit pour tout le monde…. les biens de l’État sont les biens de la masse et nul ne peut à lui seul s’en approprier. Prémonitoire ! A méditer.

 

1-Raciste est le terme usité à l’époque pour désigner le tribalisme

MFUMU

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

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