Formation du prochain gouvernement : le FCC prêt à négocier avec Félix Tshisekedi

Lundi 14 Janvier 2019 - 18:00

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La République démocratique du Congo s'achemine vers une cohabitation sans précédent entre un président issu de l'opposition et le pouvoir sortant qui garde la majorité au parlement.

Alors que le pays est en attente de l’arrêt de la Cour constitutionnelle qui examine présentement le recours introduit par Martin Fayulu, en contestation des résultats publiés par la Commission électorale nationale indépendante donnant Félix Tshisekedi gagnant de la présidentielle du 30 décembre, le Front commun pour le Congo (FCC) se dit d’ores et déjà prêt à entamer des négociations avec le nouveau président élu, en vue de la formation du prochain gouvernement. C’est ce qui ressort du communiqué ayant sanctionné la réunion qu’a présidée, le 13 janvier,  Joseph Kabila, en tant qu’autorité morale de ce regroupement politique. Le président de la République sortant, qui a réuni autour de lui quelques cadres de l'ancienne majorité au pouvoir, en a profité pour faire le point, avec ses interlocuteurs, de la situation politique du pays à la lumière des résultats des élections présidentielle, législatives nationales et provinciales. Il ressort de cette entrevue que la majorité parlementaire est prête à entamer des négociations avec le nouveau président élu qui aboutiraient à la mise en place du prochain gouvernement. « La majorité présidentielle (sortante, Ndlr) se tient prête à entamer avec le président élu et ce, sous la houlette de son autorité morale, le président Joseph Kabila Kabange, toutes les négociations nécessaires en vue de déterminer les modalités pratiques de collaboration pour une gouvernance efficace du pays », indique le communiqué signé par André-Alain Atundu, porte-parole de cette majorité.

Fort  de ses trois cent cinquante députés nationaux provisoirement élus, il est clair que le FCC sera aux commandes du prochain gouvernement avec un Premier ministre qui sera forcément issu de ses rangs. Ce qui ouvre inévitablement la voie à une cohabitation entre deux camps diamétralement opposés de part leur vision politique, en l’occurrence le FCC et la coalition Cap sur le changement (Cach) du tandem qui n’a pu réunir le seuil requis pour prétendre gouverner seul. Félix Tshisekedi sait qu’il n’a pas de choix et qu’un rapprochement avec la majorité FCC s’avère inéluctable pour lui garantir une marge de manœuvre suffisante afin de gérer le pays en toute quiétude. Depuis qu'il apparaît clairement que la coalition du président Kabila gardera à coup sûr la main sur les deux assemblées du pays (Assemblée nationale et éventuellement le Sénat sauf miracle), la froideur a gagné le camp du Cach où l’heure paraît être à la résignation face à ce cas de figure quasi inattendu. « À quoi bon un nouveau président aux affaires s'il n'a pas les leviers du pouvoir ? », s'est emporté un diplomate de la Sadc qui est loin d’être le seul à redouter que Félix Tshisekedi ne soit « réduit » à devenir un président « protocolaire».

Mais à en croire des sources relayées par l’AFP dont Jeune Afrique s’est fait le relais, un accord existerait effectivement entre le FCC et Cach qui garantirait au président sortant une majorité au parlement et un droit de regard sur des postes stratégiques (Défense, Finances, gouverneur de la Banque centrale). Et, par ailleurs, la révocation ou la permutation des commandants des grandes unités de l’armée et de la police ne peuvent s’opérer sans l’avis de ce dernier.

Si Félix Tshisekedi peut bien jouer le jeu en acceptant de convoler avec le FCC dans le cadre d’un gouvernement d’union nationale, plusieurs de ses lieutenants semblent très sceptiques, redoutant que leur leader ne soit broyé par l’engrenage « kabiliste ». Car, fait-on remarquer en coulisses, le président sortant, en tant qu’autorité morale du FCC, va continuer à tenir les leviers du pays par le truchement de ses fidèles lieutenants qui, assurément, seront bien positionnés dans la nouvelle configuration politique. « Là où ils ont échoué, accepteront-ils que les autres réussissent ? », s’est interrogé un militant de l’Union pour la démocratie et le progrès social qui pense que dans la perspective d’une collaboration entre les deux camps, rien ne garantit que le FCC se montrera fair-play en accompagnant Félix Tshisekedi dans la réalisation de son programme politique. Est-il que tout ceci ne sera formalisé que lorsque l’informateur désigné par le président de la République trouvera la majorité parlementaire après consultation des forces politiques en présence à la chambre basse. D’où question, quid de l’action amorcée par Martin Fayulu à la Cour constitutionnelle qui, en somme, semble ne pas préoccuper les esprits dans un contexte où le tour semble déjà joué ?     

Alain Diasso

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