Interview. Makondele : « Ce serait une très bonne chose qu’un ancien Léopard dirige la Fécofa »

Jeudi 16 Juillet 2020 - 16:51

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René Makondele et Yannick Bapupa ont formé le duo congolais mémorable de la formation de Djugardens de Stockholm au championnat de football de première division en Suède, sacrée championne de cette épreuve en 2003 et en 2004, avec, à la clef, la participation au second tour des éliminatoires de la Ligue des champions. Ces deux anciens joueurs de l’ex-FC Kin City de la commune de Ndjili à Kinshasa, qui a fait sensation au début des années 2000, ont poursuivi leur carrière en Suède. Dans cet  entretien à bâton rompu accordé au Courrier de Kinshasa, en collaboration avec le free lance Franklin Sydney Mahuku, René Makondele se livre à cœur joie.

Le Courrier de Kinshasa : Voulez-vous présenter brièvement à nos lecteurs ?

René Makondele : Je suis René Makondele Muzola, natif de la commune de Ndjili à Kinshasa. J’ai débuté ma carrière au FC Lansanga, avant de jouer pour Jack Trésor en troisième division de l’Entente urbaine de football de Kinshasa (Eufkin)/Tshangu. Ensuite, ce fut l’aventure à l’Entente provinciale de football de Kinshaa (Epfkin) avec FC Kin City. Après, j’ai quitté le pays pour me retrouver à Djurgadens, en première division en Suède grâce au partenariat qui existait entre Kin City et ce club suédois. J’ai évolué dans ce championnat pendant dix-sept ans.

LCK : Vous avez raccroché depuis deux ans, et vous êtes maintenant entraîneur d’une équipe des jeunes…

RM : Oui, je suis actuellement entraîneur des U19 de la formation Sanvicken IF, le dernier club où j’ai joué en Suède. Les dirigeants du club m’ont proposé de prendre la formation des jeunes. J’ai débuté avec les moins de dix-sept ans l’année passée, et cette année 2020, j'ai la charge des moins de 19 ans.

LCK : Vous faites partie du staff d’un club européen. Y a-t-il d’autres anciens internationaux congolais dans les staffs des clubs en Suède ou ailleurs sur le vieux continent que vous connaissez ?

RM : L’encadrement des jeunes est une bonne opportunité pour débuter une carrière d’entraîneur de haut niveau.  Cela permet de grandir tant sur le plan de la maîtrise tactique en tant qu’entraîneur et, surtout, sur le plan de la gestion des joueurs et de la psychologie des athlètes. La plupart d’entre nous, anciens Léopards, sommes encore dans les équipes des jeunes comme Tico Tsholola, Marcel Mbayo, Mbala Biscotte, Hérita Ilunga, Cédric Makiadi et d’autres. Et je crois fermement que le football congolais doit en profiter.

LCK : Avez-vous suivi une formation d’encadreur technique où vous aviez été d’abord nommé entraîneur des jeunes et tout en suivant la formation ?

RM : Quand on m’a désigné à ce poste, j’ai d’abord accepté, et c’est au fur et à mesure que je suis des formations d’entraîneur que l’Uefa et la fédération suédoise organisent par-ci, par-là. J’ai commencé par la formation C. Et maintenant le club est en train de subventionner les autres niveaux pour atteindre le niveau Uefa A. Avec la reprise des activités en Europe, je vais continuer ma formation.    

LCK : Aujourd’hui, la formation de Kin City FC n’existe plus. Vous et les autres anciens de ce club qui sont en Suède, vous ne pensez pas faire quelque chose pour sa renaissance ?

RM : Il faut d’abord savoir que Kin City est né de la volonté du défunt coach et président Fedo Mukoko. Il avait été footballeur en suède et il avait des contacts très approfondis avec un des actionnaires de Djurgardens, M. Sanders. Et c’est lui qui apportait beaucoup sur le rayonnement du club. Après la mort de Fedo, le partenaire suédois s’est rétracté parce qu’il n’avait plus d’interlocuteur. D’où, la descente aux enfers du club. On était jeunes, on ne pouvait rien faire. Mais maintenant, comme nous avons évolué dans ce pays, nous pouvons ramener les mêmes partenaires pour l’ensemble du football congolais et, particulièrement, pour Kin City. Richard Tomba, Yannick Bapupa, et moi-même, nous sommes des produits Kin City, donc des exemples pour signer des partenariats. Personnellement, j’ai entamé des démarches dans ce sens, mais la situation mondiale avec la pandémie de covid-19, tout a été suspendu. Nous attendons la reprise des activités pour continuer des démarches.

LCK : Parlons un peu de votre passage chez les Léopards. Quels sont les souvenirs que vous gardez de la sélection ?

RM : Jouer en sélection de mon pays a été la réalisation d’un rêve d’enfance, une expérience riche et intéressante. Pour moi, les rassemblements avant les grandes rencontres ont été les grands moments en sélection, on a l’occasion de parler avec les coéquipiers qui vivent dans d’autres pays ou d’autres coins de la RDC, de manger et s’entraîner ensemble. Certes, il n’y a jamais de roses sans épines, mais j’ai gardé de précieux souvenirs de mon passage chez les Léopards.

LCK : Quels sont les matchs mémorables pour vous en club et chez les Léopards ?

RM : Plusieurs matchs m’ont marqué, tant avec les Léopards qu’avec mon premier club suédois, Djurgardens. Chez les Léopards, c’est le match amical contre la Côte d’Ivoire à Rouen en France où j’ai marqué le premier but des Léopards, on a fait deux buts partout. Et il y a aussi la rencontre des éliminatoires Mondial/CAN 2006 face au Ghana à Kinshasa, dans un stade des Martyrs plein à craquer, le public nous a poussés à la victoire, mais on a fait un but partout. En club, j’ai encore  en mémoire notre match de la Ligue des champions contre la Juventus de Turin. Je venais fraîchement d’Afrique et j’étais en face des joueurs comme Del Piero, Bouffon, Trezeguet, etc. Après le match, j’ai parlé avec Lilian Thuram avec qui j’ai échangé le maillot. Ces sont des moments forts, j’aimerais bien qu’un tel événement puisse se dérouler au stade des Martyrs.     

LCK : D’après vous, qu’est-ce qui manque aux Léopards pour gagner la Coupe d’Afrique des nations (CAN) ou se qualifier à une phase finale de Coupe du Monde ?

RM : Ce sont de petits détails qui font défaut pour que l’on soit présent dans une phase finale de Coupe du monde Fifa ou remporté une CAN après 1974. Nous avons loupé de près d’aller en Russie en 2018, nous menions 2 buts à 0 au stade des Martyrs à Kinshasa face à la Tunisie, avant d’être rejoint à 15 minutes de la fin du match. Certes, c’est une déception, mais c’est un grand pas qu’il faut capitaliser. Nous ne sommes plus loin. Même sur le plan organisationnel autour des Léopards, c’est toujours de petits détails qu’il faut cerner pour faire un grand bond en avant. Ici, je voudrais saluer publiquement tous ces jeunes qui sont actuellement dans la sélection, nous devrions tous nous réunir, nous anciens Léopards qui sont dans des staffs techniques des clubs européens, pour pousser l’équipe nationale à aller de l’avant. N’oublions pas que l’équipe nationale, c’est le pays tout entier.

LCK : Et si la Fécofa vous proposait de diriger les Léopards cadets ou juniors ? Qu’est-ce-que tu vas demander pour atteindre tes objectifs ?

Je suis un ancien Léopard, si on me donne l’opportunité de diriger les jeunes, je ne pourrais pas refuser, mais j’aurais besoin du temps et des moyens pour atteindre les objectifs que je me serais assignés, et une organisation efficace autour des sélections des jeunes pour leur développement efficient. D’ailleurs, je serais très fier de diriger une sélection des jeunes en tant qu’ancien Léopard.  

LCK : Pensez-vous qu’un ancien joueur à la tête de la Fécofa serait une bonne chose ?

RM : Oui, ce serait une très bonne chose qu’un ancien Léopard dirige la Fécofa, afin de faire voir à toute la communauté que ce n’est pas seulement sur le terrain, mais même hors du terrain, les footballeurs, en dehors des pieds, nous avons des cerveaux pour réfléchir, et aussi pour les jeunes footballeurs, se rendre compte que le football, c’est aussi la noblesse. Michel Platini a été jusqu’à être président de l’Uefa. Et dans ma génération, il y a des gens qui peuvent  diriger le comité exécutif de la Fécofa comme Shabani Nonda, Herita Ilunga, Trésor Lualua, pour ne citer que ceux-là. La Fédération, ce n’est pas seulement la présidence, il y a aussi les commissions et les autres postes qui peuvent être occupés par les anciens Léopards capables de bien prester pour le développement du football congolais.

LCK : Votre mot de conclusion de cet entretien ?

RM : Je vous remercie d’avoir pensé à ma modeste personne, et je demande à tous les supporters des Léopards de soutenir toujours l’équipe nationale comme ils l’ont fait à notre époque. Je demanderais à tous les anciens Léopards de lever le défi du développement de notre football en suivant les formations ayant trait aux métiers du sport. Nous ne deviendrons pas tous des entraîneurs. Et le football, ce n’est pas seulement les joueurs et les entraîneurs, il y a des directeurs sportifs, il y a l’administration des sports et la gestion des clubs, etc. Tout cela requiert une formation adéquate et une connaissance requise. Enfin, Je dis aux dirigeants des clubs de notre pays que leurs frères et enfants qui ont joué à l’équipe nationale et qui sont en Europe se forment pour acquérir des connaissances qui seront profitables pour la gestion et le développement de nos clubs et de notre football.

Martin Enyimo

Légendes et crédits photo : 

L'ancien milieu offensif international congolais, René Makondele

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