Italie : l’Afrique, terre d’opportunités mais de trop de pesanteurs

Vendredi 23 Juin 2017 - 18:47

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En réunion à Milan, des entrepreneurs italiens ont fait le point de la coopération avec le continent africain. En ombres et lumières.

Entre l’Afrique et les entrepreneurs italiens, c’est une histoire d’amour mais traversée par les agacements que suscitent les trop nombreuses paperasseries et contorsions bureaucratiques qui compliquent les affaires. Sans parler des incertitudes politiques qui, ici ou là, finissent par flétrir des initiatives qui s’annonçaient fleurissantes au lancement. C’est ce qui est ressorti jeudi dernier de la table ronde African Economic Outlook 2017 réunie par la banque Intesa San Paolo à Milan, la capitale économique italienne.

Responsable des marchés émergents à Intesa San Paolo, Raffaele Martino s’est réjoui que sa banque ait joué les facilitateurs pour des projets en Afrique pour une valeur globale de 2,5 milliards d’euros dans les 18 à 24 derniers mois. Il a fait part de sa satisfaction aussi, car son groupe apprend beaucoup de sa coopération avec des Petites et moyennes industries italiennes implantées de longue date en Afrique. « Nous parvenons à financer des projets qui aident à améliorer les conditions de vie de personnes : barrages, logements sociaux, et améliorations des filières productives » sont des secteurs à succès énumérés par M. Martino.

Mais tout n’est pas que rose sur le continent noir. A commencer par la féroce concurrence qui met des sociétés italiennes parfois implantées de longue date sur place avec de nouveaux venus plus agressifs. Les Chinois sont, bien entendu, au premier rang de ceux-ci. Mais aussi d’autres représentants des tigres asiatiques : Inde, Pakistan ou Turquie jouant des coudes pour s’installer sur des terres où leur présence n’étaient jusqu’ici qu’anecdotique.

« La compétition est très forte : les Chinois en Afrique ont une force extraordinaire, mais la qualité et le professionnalisme des entrepreneurs italiens a permis d’écrire une longue histoire de succès », a soutenu M. Martino. Il a cité l’exemple éclatant du groupe ENI qui a fait de l’Italie le troisième investisseur en Afrique après la Chine et  les Emirats Arabes. Le groupe pétrolier, aujourd’hui, ce sont 3.500 employés en Afrique, dont 80% d’Africains. ENI est présent au Congo dès l’indépendance, est-il rappelé, c’est-à-dire à une époque où peu pariaient sur l’avenir pétrolier de l’Afrique sub-saharienne.

Mais les ombres en Afrique sont aussi dans ce qu’un autre entrepreneur, Salini Impregilo, a défini comme « un manque de vision du futur ». Pour lui, « tous les problèmes en Afrique sont liés à la rareté des fonds. Or pour amener les entrepreneurs et les investisseurs privés à ramener de nouvelles ressources dans le continent, il faudrait un système de garanties aidant à minimiser les risques ». Il s’agit d’aider à surmonter cette étape des craintes paralysantes.

A Milan aussi on a entendu la voix de l’Afrique. En sa qualité de fondateur et directeur de Nucafe, organisation de cultivateurs de café, l’Ougandais Joseph Nkandu est venu dire aux entrepreneurs italiens les trois besoins pressants du continent. « En Afrique, nous avons besoin des trois choses essentielles que sont : un marché, des compétences et des infrastructures ». Nkandu est  le prototype du futur que vise le partenariat italien puisqu’il est diplômé des écoles supérieures de Milan avant son retour d’entrepreneur africain en Ouganda.

L’ancienne mairesse de Milan, Letizia Moratti, aujourd’hui présidente d’impact Foundation et une des principales initiatrices de la rencontre, a souligné la nécessité de partenariats « dynamiques ». Face à l’irruption sur le marché du travail de plus de 29 millions de jeunes africains d’ici à 2030, a-t-elle relevé, « l’Afrique aura besoin d’investissements à capital humain. Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est mettre ensemble diverses forces et énergies : des entrepreneurs intéressés par un marché émergent d’une part, et des institutions et fondations formant des entrepreneurs de l’autre ».

Lucien Mpama

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