Italie : quelle politique africaine pour le nouveau président ?

Lundi 2 Février 2015 - 18:30

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Après l’élection de M. Sergio Mattarella, journalistes et observateurs sont dans l’attente des signaux sur la politique italienne en Afrique.

Il y aura à scruter dans l’action du nouveau président italien Sergio Mattarella la place qu’il réservera à l’Afrique dans son action. Les présidents en Italie disposent certes d’un pouvoir plutôt honorifique, mais il n’empêche que le président Giorgio Napolitano, son prédécesseur, a su ajouter à son humanisme communiste athé une vision africaine où le mot ‘solidarité’ a su constamment trouver sa place. À plusieurs reprises, il a pris position en faveur de l’Afrique, n’hésitant pas à la désigner comme terre d’espoir pour les investisseurs.

Ainsi, en novembre 2010, Giorgio Napolitano soutenait, à un moment où l’opinion n’était pas encore acquise à l’idée que le continent noir, continent de la désespérance par préjugé, était en mutation positive. « Quelque chose bouge en Afrique », soulignait-il devant des volontaires de la santé réunis à Padoue pour les 60 ans de l’ONG italienne CUAM. « L’Afrique n’est pas immobile ; elle n’est plus celle qu’on connaissait. Elle n’est déjà plus celle d’il y a seulement dix ans », indiquait-il dénonçant les idéologies économistes maintenant des tranchées entre pays « convergents » ou éternellement pauvres, exclus  à jamais du bien-être réservé aux seuls pays « affluents ».

« Si, aujourd’hui, nous voulions faire différemment qu’hier pour atteindre des objectifs et non mener une politique à fonds perdus, c’est en Afrique que nous devrions faire le plus ; plus aujourd’hui qu’hier. Il faut y croire ; lutter pour qu’il en soit ainsi », soulignait M. Napolitano dans ce qui restera comme l’un de ses discours les plus représentatifs en faveur de l’Afrique. Mais cette ligne de pensée ne le quittera jamais dans les audiences aux chefs d’État africains de passage à Rome comme, à diverses occasions, le président Denis Sassou N’Guesso.

Les amateurs de symboles verront d’ailleurs dans l’attachement de M. Napolitano à une coopération équilibrée avec l’Afrique une simple confirmation de la « volonté des astres », si l’on peut dire. Élu le 25 mai 2006, Journée de l’Afrique, c’est tout naturellement que sa toute première manifestation diplomatique internationale fut d’adresser un message de grande amitié aux ambassadeurs africains à Rome. Le vice-doyen du corps diplomatique africain était alors le Doyen actuel, M. Mamadou Dékamo Kamara, ambassadeur du Congo. C’est lui qui devait prendre le relais du « vieux » Michael Tabong Kima (Cameroun) et devenir l’interface africaine au Quirinal (présidence italienne).

Comme de juste, l’ambassadeur du Congo et doyen du corps diplomatique africain a été parmi les tout-premiers à féliciter le nouveau président Mattarella, augurant de la poursuite d’une coopération mutuellement bénéfique sous son leadership. Message protocolaire mais qui dénote tout de même une volonté certaine de renforcer des liens multiformes de haut niveau avec cette Italie. Et l’Afrique s’est trouvée, au fil des temps, plus de points d’accord que des divergences de fond. Le passage récent à Brazzaville, Oyo et Pointe-Noire de la délégation d’hommes d’affaires conduite par le vice-ministre du Développement économique Carlo Calenda en a encore donné  l’illustration il y a dix jours.

Il restera donc à scruter chez le président Sergio Mattarella, 73 ans, les signaux de la continuité (ou de la rupture) face au continent africain. Pour l’heure, l’homme jouit du préjugé favorable chez tous. Ses premières déclarations ne le placent d’ailleurs pas dans la lignée des frileux face à l’Afrique. « L'alliance entre les nations et les peuples a su vaincre la haine nazie, raciste, antisémite et totalitaire… La même unité en Europe et dans le monde saura battre qui veut nous entraîner dans une nouvelle ère de terrorisme », a-t-il déclaré samedi. Voilà qui augure d’une vision inclusive du monde, un monde où l’Afrique a sa place.

Une voix bien à sa place en ce moment d’interrogations, enthousiaste et pleine d’optimisme, s’est élevée ces derniers jours. C’est celle de Cécile Kyenge Kashetu, ancienne ministre de l’Intégration. Pour l’Italo-congolaise, il n’y a pas de doute: « le président Mattarella sera très certainement un point d’ancrage pour poursuivre l’œuvre de restauration de la confiance de notre pays (l’Italie) en Europe où, grâce au parti démocratique (le parti de Mme Kyenge et du premier ministre Matteo Renzi, Ndlr) l’Italie a retrouvé en peu de temps la place qui fut la sienne ». L’Afrique applaudit et attend.

Lucien Mpama