Jazz : du delta du Mississippi aux abords du majestueux fleuve Congo

Samedi 26 Avril 2014 - 2:56

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Dans l’immense aspiration musicale du jazz, l’itinéraire osé d’un tel héritage est certes complexe. Mais puisqu’il s’agit d’œuvres chères à tant de Noirs d’Amérique – et d’Afrique ! -, retraçons leur parcours jusqu’au développement d’autres élans musicaux depuis la fin des années 1910

Le chant de travail des esclaves du début du XXe siècle mélange des musiques variées mais très élaborées qui ont eu pour enracinement la religion et les services religieux.

Cette musique a existé parallèlement au blues, genre musical où la prédominante et intense mais subtile relation entre les infortunes et la tristesse intériorisée a précisément donné naissance à l’expression « avoir le blues ». Cette aspiration naît dans le delta du Mississippi. Mais un autre courant musical contemporain s’affirme, le ragtime, dont la résonnance renvoie inévitablement à la dextérité au piano mais aussi à d’autres instruments comme le banjo ou même la guitare. Cette musique de salon sera développée principalement à Harlem par un grand nom, Scott Joplin.

À Harlem, le stride, improvisation assez difficile à assimiler mais qui requiert toujours  du doigté au piano ( avec la main principale, celle de droite) voit aussi le jour comme genre de jazz, à l’instar d’un genre très prisé comme le swing. Dans cette virtuosité toute naissante, James P. Johnson se distingue. Puis vient l’époque où le boogie-woogie prend place, précisément à Chicago.

Les historiens s’accordent pour situer proprement le début du style jazz classique en 1917 à la Nouvelle-Orléans, avec l’apparition d’un  orchestre original, le Dixieland Jazz Band. Ses membres vont d’ailleurs revendiquer l’invention du rythme ancestral.

Quelques noms liés à la création du jazz rythmique

Jelly Roll Morton, Kid Ory, Sydney Bechet ainsi que Louis Armstrong sont des noms de grands solistes maîtres de l’improvisation collective dans l’association intrinsèque de l’instrumental. Trompette, trombone et clarinette seront leur instrument de prédilection.

Bien après cette période de reconnaissance, dans les années 1930 apparaît le swing. Ce sera ce qu’on a appelé l’ère des big bands. Duke Ellington, Count Basie, Glenn Miller, Benny Goodman, Cole Porter, Richard Rodgers, Roy Eldridge, Coleman Hawkins vont signer de leur génie cette époque. Ce sont tous des solistes virtuoses aux côté d’un autre virtuose de talent, Tin Pan Alley.

D’autres genres nouveaux prennent place au milieu des années 1940, avec le be bop, innovation plutôt harmonique et rythmique emmenée par de nombreux autres talents : Charlie Parker, Dizzy Gillespsie, Kenny Clarke, Thelonious Monk. Une dizaine d’années après surgissent d’autres rois de l’improvisation, dont nous ne pouvons que souligner l’incontournable nom de John Coltrane, auquel le monde entend rendre un hommage mérité cette année pour la troisième Journée mondiale du jazz.

Et l’Afrique n’a pas été en reste !

Avec l’arrivée, quelques années plus tard, du cool, du funk, du R’N’B, le jazz subit des transformations toutes nouvelles qui s’accrochent les unes aux autres avec la remise en question du mouvement jazziste grâce à la contribution d’autres voix sensibles. Venues de toutes parts, ces voix sont cubaines, mexicaines ou mêmes africaines. Elles appartiennent aussi, ce qui était impensable jusque-là, à des jazzmen blancs !

Le percussionniste Babatunde Olatunji, du Nigeria, sort en 1959 un album dont la portée va développer chez les Noirs d’Amérique un réveil sur leur richesse culturelle ancestrale. Dreams of passion sera un succès commercial fou sur fond de rythmes nouveaux pour ces Noirs d’outre-Atlantique.

Max Roach sera le premier à s’approcher de lui pour jouer ensemble. Très vite un album va venir, We insist! Freedom now suite, qui sort en 1960. Une occasion rêvée pour le batteur américain de réunir dans ce seul morceau son engagement pour la cause noire, un style free jazz ainsi que l’originalité des sons africains.

Toujours en Afrique, un autre percussionniste  reconnu sera Solomon Ilori. Il marquera son époque. Mais l’Afrique centrale ne sera pas en reste, le Congo alignant sans complexe des Rido Bayonne, Jeff Louna, Biks-Bikouta et autres Bruno Houla. Mais surtout, ce son aura une empreinte particulière dans le negro-spiritual que les Palata inaugureront en premier sous le nom des Perles. Suivront Samouna et Chœur Maselafa qui s’inspireront pour leurs compositions pour la plupart oubliées aujourd’hui de cette richesse des abysses de l’histoire noire. Mais ces supports discographiques peuvent être réécoutés grâce à la Maison Biso na Biso qui se bat pour préserver tout l’ensemble de notre patrimoine musical propre.

Luce-Jennyfer Mianzoukouta

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : L'album de John Coltrane à l'honneur cette année. (© DR) ; Photo 2 : Louis Amstrong, une figure à ne pas oublier. (© Dr) ; Photo 3 : Des compositions toutes congolaise autour du negro-spiritual. (© DR)