Kongo central : un « stress océanique » à Banana et Nsiamfumu

Vendredi 5 Janvier 2018 - 17:33

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D’ici à 2050, il n’existera aucune trace physique de la route Banana - Moanda si l’on en juge par la progression ininterrompue de l’océan dans les terres de la cité mythique. L’érosion côtière est une menace à prendre très au sérieux pour ses conséquences dramatiques sur la population autochtone qui affronte le phénomène de réchauffement climatique en zone côtière sans moyens financiers et sans capacités techniques pour espérer le contrer dans la mesure du possible.

La toute dernière alerte vient du Pr Albert Kabasele, un spécialiste des sciences spatiales et physique des satellites du climat. Elle vient ainsi se rajouter à d’autres alertes de la même ampleur émanant des cabinets spécialisés. D’une manière générale, le message clé est le recul du trait de la côte littorale, une situation perceptible même à l’œil nu par le commun des mortels. L’océan avance et son rythme de progression devrait même s’accélérer au cours des prochaines années. En août 2015, l’on estimait que la proportion des terres perdues touchant la mer va doubler de 200 m autour de Nsiamfumu et de 100 m entre la cité de Moanda et Banana. La projection d’élévation du niveau de la mer confirmait, au pire, le recul d’au moins 50 à 100 m l’an d’ici à l’an 2100.

Rebondissant sur cette série de renseignements, le Pr Kabasele vient de publier un document intitulé « Transition énergétique et technologiques vertes dans le cadre de la Cop 23 : quels avantages pour la RDC ? ». Bien entendu, le document comporte des nouvelles données sur l’érosion côtière, une preuve de plus des « bouleversements climatiques en cours » qui entraînent des effets néfastes sur le Kongo central, la seule province à disposer d’une façade maritime d’une trentaine de kilomètres. Selon l’expert, la marée haute a augmenté au fil du temps de 75 cm de hauteur par rapport aux valeurs normales. C’est le signe, insiste-t-il, d’un « stress océanique » à Banana (km 5) et à Nsiamfumu. Albert Kabasele va plus loin en proposant des pistes de solution à court terme. Il s’agit, martèle-t-il, de mettre en pace une police environnementale capable de mener des actions de soutien à la population victime.

La deuxième forte révélation du document suscite une certaine stupeur. En effet, le Pr Kabasele s’est voulu plus précis sur les chiffres. Selon lui, la progression de l’érosion était plus lente entre 1986 1998. Il parle de 15 m des terres gagnées par l’océan en raison de 3 mm par jour. Puis, le rythme s’est accéléré au fil des années. Entre 1998 et 2006, la progression était tout simplement ultra rapide. Il parle cette fois de 34 à 40 m gagnés par l’océan en raison de 12,4 mm par jour. Enfin, la troisième période est plus lente. Celle-ci s’étend de 2006 à 2016. Il y a eu 6 m de terres gagnées par l’océan en raison de 1,55 mm par jour.

En moyenne, l’océan avance dans les terres de Moanda à une vitesse de 5,65 mm par jour. Le Pr Kabasele reste inquiet sur l’avenir d’autant plus que le réchauffement climatique, selon lui, est bien responsable des inondations en Ituri, à Boma au Kongo Central et même des feux de forêt au Katanga, sans oublier l’érosion côtière à la côte atlantique. Il reste convaincu, pour sa part, de la nécessité de faire payer les dommages et les pertes humaines. Des initiatives passées ont visé d’abord à répondre à des urgences. Le projet Pana-zone, initié pour la période 2015 à 2020, permet de renforcer la résilience des communautés et des écosystèmes aux changements climatiques le long de la côte. Nous y reviendrons.

Laurent Essolomwa

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