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Le golfe de Guinée, un enjeu stratégique majeur

Lundi 17 Mars 2014 - 0:53

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Il fut longtemps un simple lieu de passage pour les navires qui reliaient les deux hémisphères. Il devient, au fil des années, l’un des enjeux majeurs du monde très ouvert dans lequel nous vivons, et son importance ne cessera de s’affirmer tout au long de ce siècle. Deux faits en sont la cause.

Le premier est que le Bassin du Congo va connaître un formidable essor grâce à la stabilisation progressive de ses territoires, à une meilleure exploitation de ses ressources naturelles, à l’accroissement continu du niveau de vie de ses habitants et à l’intégration régionale qui génèrera très vite un marché de quelque deux cents millions de consommateurs.

Le deuxième est que le golfe de Guinée, comme tous les passages maritimes obligés du globe, verra simultanément se développer toutes sortes de trafics et s’accroître la piraterie qui en découle naturellement, avec comme conséquence une insécurité que nous voyons s’esquisser aujourd’hui et qui finira par mettre en péril la navigation.

Il est acquis dès maintenant que le processus d’émergence de cette vaste zone maritime qui borde une dizaine de pays sera accéléré par la dégradation de la situation au Moyen-Orient et dans le golfe Persique, par où transite aujourd’hui près du tiers des cargaisons pétrolières de la planète. Le conflit latent entre Israël et les pays qui l’entourent, l’Iran notamment, mais aussi les tensions qui croissent entre les pays arabes – le Qatar et l’Arabie saoudite pour ne citer qu’eux – ne peuvent en effet que s’aggraver dans le proche avenir.

La fermeture du détroit d’Ormuz étant une perspective que l’on ne peut exclure, toutes les grandes nations industrielles étudient, sans le dire ouvertement, l’hypothèse d’un approvisionnement énergétique en provenance du golfe de Guinée. Et cette hypothèse apparaît d’autant plus crédible que les ressources pétrolières et gazières de la région, off-shore comme on-shore, ne cessent d’augmenter grâce aux progrès accomplis dans le domaine de l’exploration des hydrocarbures.

Dans un pareil contexte, les questions de sécurité deviennent évidemment prioritaires pour quiconque pénètre dans le golfe de Guinée. Elles vont conduire d’une part, les pays de la région à mettre rapidement en place les structures nécessaires pour se protéger contre les agressions qui se multiplieront à coup sûr dans leurs eaux territoriales et amèneront, d’autre part, les grandes puissances à soutenir de façon très concrète l’ensemble de la région dans sa quête d’une protection navale qui s’avèrera vitale.

Les nations du golfe de Guinée, qui agissaient jusqu’à présent en ordre dispersé, vont devoir s’organiser pour relever le défi qui leur est lancé. Au-delà du renforcement de leurs infrastructures portuaires qui permettra aux navires de s’approvisionner et de se mettre à l’abri si nécessaire, il leur faudra édifier un système de sécurité collective qui permette de combattre efficacement la piraterie. Et dans ce nouveau contexte, le Congo sera appelé à jouer un rôle essentiel en raison du développement du port en eau profonde de Pointe-Noire, des travaux en cours qui en feront à brève échéance l’un des mieux équipés de cette partie de l’océan Atlantique, mais aussi de l’aménagement de voies de communication rapides vers le cœur de l’Afrique centrale.

Comment tirer le meilleur parti du vaste mouvement géostratégique qui s’amorce est certainement aujourd’hui l’un des axes de réflexion les plus importants qui s’imposent aux autorités congolaises.

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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