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Le grand réveil de l’Église catholique

Lundi 22 Juillet 2013 - 11:00

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Née il y a deux mille ans sur la rive orientale de la Méditerranée, cette église a connu comme toutes les sociétés humaines des hauts et des bas, des périodes de gloire et des crises profondes qui auraient pu la faire disparaître. Mais elle a survécu à tout, s’est ancrée sur tous les continents, a influencé profondément le cours de l’Histoire et se trouve ainsi au cœur de tous les grands débats du temps présent. Que l’on soit croyant ou non, Rome est aujourd’hui comme hier une puissance spirituelle incontournable dont les évolutions à venir marqueront profondément notre futur. Et c’est pourquoi il convient d’observer avec attention les changements qui s’y dessinent.

Alors que les yeux du monde entier sont braqués sur Rio de Janeiro, où se déroulent à partir d’aujourd’hui les Journées mondiales de la jeunesse, trois grands mouvements sont en cours au cœur même de l’Église catholique.

Le premier, que nous avons évoqué ici même à plusieurs reprises, est le déplacement vers le Sud du centre de gravité de la chrétienté. Nous ne le commenterons pas plus avant tant l’élection du pape François le rend évident, mais nous insisterons en revanche sur ses conséquences, car, à très court terme, il provoquera un changement radical de la gouvernance vaticane ; ce qui exigera du successeur de Benoît XVI une volonté de fer, une énergie farouche, car les pesanteurs héritées de l’Histoire sont grandes au sommet de l’Église. S’il est vrai que le nouveau pape semble bien armé pour conduire jusqu’à leur terme les changements nécessaires, il n’est pas certain que les puissantes administrations auxquelles il demande de se réformer se laisseront faire. Autrement dit, la bataille n’est pas gagnée d’avance.

D’où le deuxième mouvement qui nous paraît se dessiner et sans lequel rien ne serait possible, aussi grande que soit la détermination du pape François : l’affirmation dans les structures du Vatican des représentants de ce que l’on appelait jadis le « tiers-monde » et que l’on désigne aujourd’hui sous le nom de « monde émergent ». De la même façon, en effet, qu’un pape latino-américain succède à une très longue lignée de papes européens, la Curie romaine va devoir se réformer de l’intérieur afin de donner aux chrétiens du Sud la place qui leur revient naturellement par leur poids humain et la vitalité de leur foi. Pour dire les choses clairement, il n’y aura pas véritablement de changement à Rome si les cardinaux, les évêques, les prêtres, les religieux et les religieuses venus du Sud demeurent marginalisés comme ils le sont aujourd’hui, quoi que l’on dise dans les couloirs du Vatican.

Mais il faudra pour cela, et c’est le troisième mouvement que nous voudrions noter ici, que les communautés chrétiennes de ces régions se préoccupent mieux qu’elles ne l’ont fait jusqu’à présent de faire entendre leur voix à Rome. S’il est vrai que l’accession d’un pape venu d’Amérique latine est une révolution en soi, il ne l’est pas que les prélats du Sud aient pour autant pris la mesure de l’occasion historique qui s’offre à eux de rééquilibrer l’Église de l’intérieur. Et ce ne sont pas les quelques personnalités africaines, asiatiques ou latino-américaines présentes à Rome de façon constante, aussi actives et respectées qu’elles soient, qui y changeront quelque chose.

Encore une fois, mais il n’est pas mauvais de se répéter, le pape François, s’il veut aller jusqu’au bout de son propos et asseoir sur des bases solides le destin de l’Église, doit dire haut et fort que le temps est venu pour elle de se réformer de l’intérieur. De le dire non depuis Rome, mais depuis l’une des régions du monde où va se jouer cette partie vitale, c’est-à-dire l’Afrique. Et sincèrement est-il un lieu plus évident pour le faire que le Bassin du Congo où vit et prospère l’une des communautés catholiques les plus nombreuses, les plus vivantes, les plus ferventes de la planète ?

Après Rio de Janeiro, Brazzaville et Kinshasa, le cœur de l’Afrique…

 

Jean-Paul Pigasse

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

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