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Le Pape François et la révolution vaticane

Samedi 27 Juin 2015 - 11:45

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Lentement mais sûrement, contournant un à un les obstacles qui s’élèvent sur sa route sans jamais se départir du sourire subtil qui adoucit son visage, le successeur de Benoît XVI impose à l’Église catholique le changement de cap qu’elle attendait consciemment ou inconsciemment depuis longtemps. Rien n’est joué au sein d’une institution deux fois millénaire que sa pesanteur interne sauva à maintes reprises des séismes politiques ou sociaux qui la menaçaient. Mais à de multiples signes, l’on perçoit qu’une révolution est en cours qui lui redonnera le dynamisme, la mobilité, la capacité d’adaptation indispensables.

Trois changements majeurs sont en cours dans les instances supérieures de l’Église :

° Le premier est le retour aux fondements même du christianisme, à savoir la foi,  l’humilité, la simplicité, la proximité avec les pauvres, la solidarité. Un retour qui se manifeste dans le comportement personnel du Pape qui a délaissé le vaste appartement situé dans l’étage supérieur de l’aile gauche du Vatican pour la modeste Résidence Sainte Marthe, dans le jardin  proche de la Basilique Saint Pierre, où il reçoit en toute simplicité de nombreux visiteurs.

° Le deuxième est la mise au pas progressive, mais ferme, des institutions supérieures de l’Église, tout spécialement la Curie qui constituait jusqu’à présent le cœur de la gouvernance vaticane, mais qui se voit peu à peu entourée d’organismes moins voyants que le Pape consulte de façon constante. Cette mise au pas concerne tout particulièrement les finances vaticanes dont les dérives successives avaient fini par mettre en péril l’Église toute entière.

° Le troisième, sans doute le moins visible mais à coup sûr le plus important, est le rôle croissant que jouent les chrétiens du Sud dans la modernisation de l’Église entreprise par le Pape. À un système que dominaient depuis toujours les prélats européens en général, et les prélats italiens en particulier, le Souverain Pontife a entrepris de substituer un mode de gouvernance au sein duquel les peuples émergents jouent un rôle de plus en plus important .

Il va de soi que ces changements ne vont pas sans provoquer des réactions négatives au cœur même de l’Église, mais tout indique que le Pape François ira jusqu’au bout de son projet qui vise à adapter la gouvernance vaticane aux réalités du temps présent. Confronté au problème majeur que ses prédécesseurs n’ont pas su résoudre, celui de l’affaiblissement constant de la religion chrétienne là où elle prit son essor dans les siècles précédents, l’Europe, le premier Pape venu du Sud a entrepris de donner à l’Afrique, à l’Amérique latine, à l’Asie, la place qui doit leur revenir naturellement dans la gestion de l’Église.

Il sait, bien sûr que le temps dont il dispose pour réaliser ce grand dessein est limité à la fois par son âge et par l’importance des obstacles à franchir, mais il sait aussi que dans le moment présent, est de lancer ce grand chantier. Comme cela s’est produit à maintes reprises tout au long de sa très longue histoire, l’Église doit s’adapter ou disparaître. Elle ne peut en aucun cas demeurer figée sur ses positions, ignorer les changements qui se dessinent à l’échelle de la planète, ne rien changer à ses comportements. Et le Pape François entend bien l’en convaincre tant qu’il en a la force.

Nous venons d’en avoir une preuve éclatante avec l’encyclique « Laudato si’ » qui a placé l’Église, sans que personne l’ait prévu, au cœur du débat planétaire sur la protection de l’environnement. 

 

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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