Les Bantous de la Jamaïque dans la formation du reggae

Samedi 10 Mai 2014 - 1:30

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Le reggae est apparu à la fin des années 1960. Il est la plus populaire des expressions musicales jamaïcaines et tire ses origines de la musique mento, la musique des paysans jamaïcains. Après leur journée de labeur, ces derniers  aimaient jouer et écouter le « mento » pour se divertir et oublier un instant la dureté de leurs conditions de vie

D’après l’œuvre Les Origines du reggae de Jeremie Kroubo Dagnimi aux Éditions L’Harmattan (2009), le reggae plonge ses racines dans les rituels ashanti du Ghana et ceux du Kongo. Les  deux peuples constituaient la majorité des esclaves de Jamaïque. Selon Nathaniel Samuel Murrell, auteur d’Afro-Caribbean Religions: An introduction to their historical, cultural and sacred tradition (Temple University Press, 2010), c’est la musique kumina qui se trouve à la fondation du reggae.

Venue d’Afrique, la musique kumina est à la fois une religion et une musique pratiquée par les Kongos de la Jamaïque, concentrés à l’est (St. Thomas et  Portland). Il s’est ensuite diffusé à St. Mary, St. Catherine et Kingston. Le kumina, c’est chanter et danser. Ces cérémonies sont associées aux naissances et aux invocations pour le bien et le mal. Le kumina est la plus africaine des expressions que l’on puisse trouver en Jamaïque.

Premier rastaman de Jamaïque, Leonard Percival Howell est le véritable fondateur du mouvement rastafari. Il est également le fondateur du Pinnacle, un quartier rastafari à l’est de la Jamaïque peuplé d'Afrojamaïcains de descendance Kongo. Selon Nathaniel Samuel Murrell, professeur en histoire des religions à l’université de Caroline du Nord, Leonard Howell avait introduit le kumina dans ses rituels. La musique est une source importante du mouvement rastafari qui développera le reggae.

La philosophie du reggae aura donc pour base spirituelle les traditions kongos, l’image symbolique d’Hailé Selassié, leur messie, et les directives de Marcus Garvey qui disait : « Nous sommes les descendants d’un peuple qui a beaucoup souffert. Nous sommes les descendants d’un peu déterminé à ne plus souffrir. »

Le reggae va prôner le retour à Zion (l’Afrique), terre des ancêtres. Les rastamen vont détester Babylon (les esclavagistes) et ils laisseront pousser les cheveux (les dreadlocks) pour ne pas rompre le contrat passé avec Dieu. Ils adopteront une alimentation végétarienne et trois couleurs emblématiques : le vert, symbole de la végétation et de la beauté naturelle du continent noir ; le jaune, symbole de l’or, la richesse de l’Afrique ; et le rouge, pour représenter le sang des martyrs noirs.

Bob Marley, né en 1945 en Jamaïque, sera distingué comme la plus grande star du reggae pour avoir rencontré de son vivant un succès mondial et le reste à ce jour, avec plus de 200 millions de disques vendus à travers le monde. Parmi les plus célèbres chanteurs de reggae de Jamaïque qui reconnaissent leur racine chez les Kongo figure Daweh Kongo, Natthy  Kongo et l’orchestre musical The Congos.

 

Arsène Francoeur Nganga est chercheur en histoire et anthropologie culturelle des Noirs des Amériques

Arsène-Francoeur Nganga