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Les leçons d’Orlando

Samedi 18 Juin 2016 - 18:00

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Le drame qui s’est déroulé la semaine dernière à Orlando, avec sa centaine de victimes innocentes, témoigne de l’ampleur du problème que l’humanité doit désormais résoudre. L’humanité tout entière et non, comme cela se dit ou s’écrit trop souvent, la poignée de nations visées par les Islamistes qui en viennent à semer la mort après avoir fait une allégeance réelle ou supposée à l’Etat dit « islamique ».

Mieux vaut, en effet, ne pas se faire d’illusion : ce qui se passe sous nos yeux effarés n’est que la poursuite, l’amplification d’un processus destructeur commencé il y a deux décennies lorsque les pays occidentaux entreprirent d’abattre des régimes qui n’étaient certes pas démocratiques, mais qui du moins empêchaient les dérives ethniques ou religieuses sur leur territoire et leur extension dans les pays environnants. Faire disparaitre Saddam Hussein et Mouammar Kadhafi, tenter d’en faire autant avec Bachar al Assad comblait certainement les attentes de quelques intellectuels parisiens, mais ne pouvait avoir comme conséquence, à court ou à moyen terme, que de plonger dans le chaos des millions d’hommes, de femmes, d’enfants. Et aussi, admettons-le, de faire proliférer le cancer naissant de l’extrémisme religieux.

L’irréparable ayant été commis, quelles leçons peut-on, doit-on, tirer de la tuerie d’Orlando, cette ville pacifique des Etats-Unis où quelques centaines de « gays » s’étaient réunis pour une soirée festive et où un homme seul a commis l’un des crimes les plus graves de l’histoire américaine ?

Sans prétendre, bien sûr, épuiser le sujet, nous en énoncerons quatre :

  1. Aucun pays, aucune nation n’est plus à l’abri de semblables drames. Perpétrés soit par de petits groupes d’extrémistes organisés en commandos, soit par des individus isolés dont il est impossible de prévoir les actions meurtrières, ils se multiplieront dans les années à venir. Et, bien entendu, aucun Etat ne pourra les prévenir sur son sol.

  2. Aussi riches et puissamment armées soient-elles, les nations visées par ce type d’attaques terroristes ne parviendront pas à s’en protéger avec les moyens à leur disposition. Il leur faudra donc modifier tout à la fois leurs systèmes de renseignement et leurs modes de lutte contre le terrorisme. S’en suivra une véritable révolution dans la prévention et la gestion de ce type de crises.

  3. L’extrême gravité des actes que commettent aujourd’hui les extrémistes réveillera, sans doute à très court terme, les démons du rejet social, racial, religieux que la généralisation de la démocratie avait fini par neutraliser. Si bien que l’on verra se creuser à nouveau au sein de la société, dans nombre de pays, des fossés que l’on croyait à jamais comblés.

  4. Les techniques modernes de communication procurant aux terroristes des moyens d’action aussi puissants qu’inédits, seule une mutualisation du renseignement permettra aux pays visés de se prémunir contre ce genre d’attaques. Mais un tel mouvement  ne sera possible que si les Etats concernés s’accordent tout à la fois sur ses objectifs et sur ses méthodes. On en est évidemment très loin dans le moment présent.

Ce que démontre finalement l’action criminelle menée à Orlando par un homme isolé c’est qu’en dépit des apparences les grandes puissances ne sont nullement préparées à la nouvelle forme de guerre asymétrique qui se dessine. De conclure qu’il faudra du temps, beaucoup de temps, pour y répondre il y a un pas que nous n’hésitons pas à franchir.

 

 

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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