Opinion

  • Réflexion

Libye : va-t-on connaître enfin la vérité ?

Samedi 25 Avril 2015 - 17:31

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimableEnvoyer par courriel


Qui aurait dit, ces derniers mois, que les tragédies en série survenant au large des côtes libyennes et l’afflux dramatique de migrants africains vers les côtes italiennes rouvriraient brutalement l’une des pages les plus obscures de l’Histoire moderne ? Oui, qui aurait imaginé que la noyade en Mer Méditerranée de milliers d’hommes, de femmes, d’enfants en quête d’asile aurait comme conséquence de faire ressurgir au cœur de l’actualité le complot ourdi, il y a quatre ans,  par un petit groupe de puissances dans le but d’abattre Mouammar Kadhafi ?

Les conséquences de cet assassinat, perpétré dans l’illégalité la plus totale, quoi qu’en disent la France, l’Angleterre et les États-Unis, sont telles pour l’Europe aujourd’hui que la vérité va inévitablement surgir du bunker où on l’avait enfermée. Et cette vérité, que l’on voit se dessiner, à petits pas, sera si terrible qu’elle creusera un fossé entre les nations du Vieux continent qui jusqu’à présent affirmaient leur entente, mais qui vont découvrir que deux d’entre elles ont agi sans les consulter, provoquant les drames humains que l’Union européenne s’avère désormais incapable de gérer.

N’anticipons pas sur les chapitres à venir de la pièce à tous égards dramatique qui se joue dans le moment présent, mais rappelons une fois de plus que ce qui se passe sous nos yeux effarés au large de la Sicile était inévitable dès lors que l’on abattait le « guide libyen ». Car l’implosion de la Libye ne pouvait avoir comme conséquence, à terme plus ou moins rapproché, que de plonger dans le chaos l’immense zone du Sahel et de transformer cette partie de l’Afrique en une zone où prolifèreraient les trafics les plus dangereux.

Les puissances qui ont commis cette erreur stratégique ne peuvent se cacher derrière personne, ni tenter de s’en défausser sur des tiers. Car l’Union africaine avait prévenu la communauté internationale des conséquences dramatiques que ne manquerait pas d’avoir la chute du « Guide » libyen. Et certains de ses dirigeants, Denis Sassou N’Guesso en particulier, n’avaient pas hésité à risquer leur vie en se rendant sur place pour convaincre Mouammar  Kadhafi de se retirer en instaurant une transition qui aurait évité les drames que nous vivons aujourd’hui. Sans, bien sûr, être écoutés par des hommes d’État pour qui l’Afrique n’était pas encore « entrée dans l’Histoire ».

Pourquoi les nations occidentales ont-elles ignoré délibérément la solution pacifique qui se dessinait ainsi ? Pourquoi Nicolas Sarkozy, alors Président de la République française, a-t-il décidé, contre l’avis des hauts responsables qui l’entouraient, de lancer l’opération aérienne ayant permis l’assassinat du « Guide » ? (1) Qu’est-ce qui peut expliquer le revirement brutal de la plus haute autorité française recevant avec un faste inégalé, à Paris, Mouammar Kadhafi pour, ensuite, mettre sur pied le dispositif militaire qui devait l’abattre ?

Les conséquences de cette tragédie sont telles aujourd’hui que ceux qui l’ont organisée vont devoir s’expliquer, devant la communauté européenne d’abord, devant la communauté internationale ensuite. Et cela nous promet des révélations qui feront voler en éclat le miroir aux alouettes que l’on avait dressé pour dissimuler la vérité.

La chemise blanche du très médiatique Bernard-Henry Lévy, qui soutint cette sinistre farce à grands renforts de déclarations enthousiastes, risque fort d’en sortir quelque peu salie.

 

  1.  Lire, sous le titre « Le jour où Nicolas Sarkozy décida d’intervenir en Libye », la relation faite par le site Internet Mondafrique  (www.mondafrique.com) de la réunion du conseil interministériel qui s’est tenue le 7 mars 2011 à l’Élysée, réunion au cours de laquelle Nicolas Sarkozy décida, contre l’avis de ses ministres et de ses conseillers,  d’intervenir en Libye pour chasser Mouammar Kadhafi du pouvoir.    
Jean-Paul Pigasse

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

Réflexion : les derniers articles