Lire ou relire : « Stèles du point du jour » de Gabriel Mwènè Okoundji

Jeudi 26 Novembre 2020 - 19:57

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« Un poète est un monde enfermé dans un homme », affirmait Victor Hugo. L’illustre poète congolais confirme cette norme, en embarquant le lecteur dans un périple fantasmagorique pour immortaliser les souvenirs de sa terre natale.

Sous-titré « Dialogue d’Ampili et Pampou », ce recueil poétique décrit la fibre culturelle de Gabriel Okoundji, dont les caractéristiques principales demeurent l’oralité et la sagesse ancestrale. La fidélité à ce style dans l’ensemble de ses œuvres, révèle la verve négro-africaine du poète et en même temps son anticonformisme.

Ici sur chaque ligne, à chaque page, le lecteur s’abreuve d’une parole tutélaire qui résonne comme un oracle. C’est que le scripteur de ces vers magiques et sublimes, a passé plus de la moitié de sa vie en France, loin de son terroir auquel il reste très attaché. A l’image de Tagore, de Confucius ou d’Amadou Hampate Bâ, le poète du « stèle du point de jour » transmet à sa manière une philosophie de portée universelle, puisée dans l’inédit des « bibliothèques vivantes », ses parents et précepteurs, à qui il doit sa première instruction à l’aube de la vie.

Sa plume alerte et son langage policé présentent des images porteuses d’une cosmogonie issue du patrimoine immatérielle Tégué des terres de Mpama, dans la Cuvette-Ouest (République du Congo). Comme la nature couplée au silence peuvent faire éclore dans les cœurs attentifs et avisés, de nobles pensées teintées d’empathie envers toutes les créatures vivantes (hommes, animaux, végétaux, etc.), expression de l’humanisme Bantou. Considérons cette strophe qui rapporte les propos d’Ampili (la vénérable tante du poète) :

« Le cœur qui bat ne se réjouit point de la blessure du ver de terre/ de la mort de la fourmi/ du cri de douleur de l’animal. Pampou, il est dit : dans les pleurs des Hommes coulent les larmes de tous les êtres de la terre » (p. 40). Ou bien cet axiome écologique : « Où gémit l’arbre, périt l’homme » (p. 66).

Par ailleurs, l’attachement du poète à ses racines culturelles, lui donne davantage de considérer la trame mosaïque qui fonde la nation congolaise, sa patrie, en fustigeant le repli identitaire : « Qui que tu sois, où que tu sois/ de Loudima à Ndongou/ de Madingo-Kayes à Mossaka/ de Boko-Songho à Sembé/ ta naissance est l’instant comblé du Congo. / Ko ngo, Kwa ngo, Loa ngo ! / la grandeur implique l’union/ la division est une œuvre imparfaite / Qui l’affirme parle en connaissance / les Tégué de Kinkala-Lékana ne l’ignorent pas » (p.72).

Médecin spécialiste en psychologie clinique évoluant en France, l’écrivain congolais Gabriel Mwènè Okoundji est avec son compatriote Huppert Malanda, deux figures de proue de la poésie francophone mondiale, à l’exemple de leurs prédécesseurs U Tam’si et Tati Loutard. Il est lauréat du Grand prix littéraire d’Afrique noire et de bien d’autres distinctions internationales.

Aubin Banzouzi

Légendes et crédits photo : 

Photo: l'écrivain congolais Gabriel Mwene Okoundji

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