Musique : Aslesh enragé se déchaîne

Samedi 19 Mai 2018 - 13:15

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Après le succès sans précédent d’O’a motema mabe sur les réseaux sociaux en fin 2017 et au début de 2018, le rappeur a lancé, le 14 mai, Biloko ya boye , un nouveau son toujours en lingala dans lequel, encore une fois, il apostrophe et appelle à un changement d’attitude et de mentalités de la société congolaise.

O’a motema mabeAlain Chirwisa, alias Alesh ou encore King Lesh, toujours aussi engagé qu’à ses débuts, se montre plus incisif ces derniers mois. C’est désormais sur un ton exaspéré qu’il s’exprime au travers de ces deux derniers titres O’a motema mabe et Biloko ya boye. Pour ces sons qu’il veut dorénavant populaires, et il a réussi son coup, Alesh a décidé de faire les choses différemment.

D’ordinaire très méticuleux dans la composition de ses textes, cette fois-ci, il a choisi d’user d’un vocabulaire commun, quitte à faire même une croix sur le français pour laisser entièrement la place à un lingala familier, de la rue. Et qui plus est, sans pas trop de littérature. C’est tout simplement, dit-il, qu’il a choisi de marcher « sur les pas de Franco Luambo Makiadi ». Et, donc, l’on ne peut lui reprocher de faire comme s’y attelait ce dernier de son vivant de faire. «  De notre quotidien, la principale inspiration qui nourrit ma musique depuis seize ans », affirme-t-il.

Dans O’a motema mabe et maintenant encore dans Biloko ya boye, il « raconte nos peines, nos joies, nos frustrations, nos peurs, nos espoirs, etc. » à sa manière, mais surtout à celle de la rue afin de mieux se faire comprendre. Ou, plutôt, de pouvoir toucher un plus grand nombre, bien plus qu’il ne le faisait alors qu’il chantait dans la langue de Molière ou de Shakespeare. Normal donc, qu’il exulte le 14 avril dernier, annonçant l’entrée de la vidéo d’O’a motema mabe dans la playlist de Trace Urban alors que l’audio de cette satire chantée jouait déjà en boucle sur Trace FM et pouvait aussi se suivre sur Trace Kitoko. Un pari gagné donc pour une meilleure diffusion de ce son qu’Alesh avait lancé sur Facebook, quelques mois plus tôt et demandant aux mélomanes d’y adjoindre une vidéo personnelle selon ce qu’il leur inspirait. En un temps record, le morceau d’à peine trois minutes et quelques secondes avait créé un énorme buzz sur les réseaux sociaux en fin d’année pendant plusieurs semaines. Les messages fusaient de partout d’Afrique, d’Amérique et d’Europe comme l’a soutenu le site Talents2kin qui l’avait aussi publié.

Non à l’inaction

Destiné, comme l’a dit Alesh, « au gars de la rue qui aime beaucoup danser », le rythme est très dansant et le clip l’illustre bien. Cette première chanson se résume à une rengaine facile à retenir : Mokonzi o’a motema mabe ! (Chef, tu es de mauvaise foi !). En sus, Alesh souligne que contrairement à lui, il ne va pas se compromettre mais s’en tenir au bien qu’il lui a fait car « Voler n’est pas bon ». Il ne s’arrête pas à cette phrase extraite d’une anecdote bien kinoise. Toujours sur le ton de la réprimande, King Alesh apostrophe le « chef » avec sa question : « Nini’ango esilakate ? » (C'est quoi cette chose qui n’a pas de fin ?)… « Même le film de Jésus a une fin et même Mobutu est mort !, la galère de Kinshasa ne devrait-elle pas elle aussi finir ? », continue l’artiste qui a toujours pris un ton interpellateur. Le label Mental engagé qu’il a fondé sert beaucoup à cela. Avec une perspective assez large sur les vraies difficultés que rencontrent les Congolais, l’artiste rappelle qu’il a beaucoup voyagé dans le pays et se dit en droit de dénoncer l’innommable.Biloko ya boye

Dans Biloko ya boye, dont le clip devrait être tourné à partir du 29 avril, selon l’annonce faite aux mélomanes intéressés d’y prendre part, Alesh étend son audience. En effet, son discours se veut interpellateur aussi pour le citoyen lambda au-delà de l’autorité qui, pour cette fois, n’est pas la seule mise en cause. Car, dit-il, « Je reste convaincu que sur ce tas de ruines que nous lèguent les générations antérieures, il est possible de s’inventer un bonheur ». Et donc, c’est à une adhésion plus populaire qu’il invite ses concitoyens au travers de ce nouveau titre. Sa démarche, fait-il savoir, se résume à « écrire notre histoire avec de mots simples, le langage de la rue, un langage que tout le monde pourrait comprendre, afin de dire “Non“ à l’inaction ». Aussi leur fait-il cette adresse directe : « Bo’o mona to bo’o mona te ? (Voyez-vous ou ne voyez-vous pas ?) ». Il veut les porter à considérer qu’ils sont seuls responsables de leur environnement insalubre, par exemple, que cela appelle à agir différemment. Et, l’appel à une conduite correcte concerne tous et chacun. Biloko ya boye fait quand même une vraie mise en garde aux députés : « Bino toko voter lisusu ! (Attendez-vous à ce que l’on vous élise une fois de plus car nous ne sommes pas idiots à ce point) » avec tout ce que « nous endurons au quotidien et dont vous êtes témoins mais vous gardez de dénoncer ». « De qui avez-vous donc peur ? », leur demande-t-il en fin de compte.

 

 

 

 

 

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : O’a motema mabe Photo 2 : Biloko ya boye

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