Paix : appels unanimes à une solution africaine au conflit en Libye

Lundi 17 Août 2020 - 17:05

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Après plusieurs mois de combats, les forces fidèles au Gouvernement d’union nationale (GNA), basé à Tripoli, reconnu par l’ONU et dirigé par Fayez al-Sarraj, et les partisans de l’Armée nationale libyenne (ANL), du maréchal Khalifa Haftar, ne sont toujours pas prêts à enterrer la hache de guerre. Sur le plan diplomatique, la communauté internationale dénonce les ingérences étrangères, appelle à un règlement politique de la guerre civile et plaide pour un dialogue inclusif afin de sortir le pays de l’impasse.

Estimant que la situation en Libye a un impact néfaste sur tous les pays du Sahel, d’Afrique du nord, du Sahara et ailleurs, l’Union africaine (UA) veut que la conférence de réconciliation nationale interlibyenne qui était prévue en juillet 2020 à Addis-Abeba, en Ethiopie, se tienne dans les meilleurs délais. Ce forum devra proposer une période de transition, présenter l’avant-projet de Constitution et suggérer la date du référendum constitutionnel ainsi que celles des élections présidentielle et législatives.

Les dirigeants africains soutiennent que l’Afrique, longtemps ignorée sur ce dossier géré principalement par l’ONU, est « mieux placée pour faire avancer la paix en Libye ». Le continent souhaite un renforcement de la collaboration avec l’instance onusienne en vue de la recherche d’une solution au conflit libyen. Pour l’UA, il n’y aura pas de paix en Libye tant qu’elle n’aura pas de mainmise sur la situation dans ce pays.

« La guerre de la Libye est maintenant une guerre internationale, une guerre sous procuration », s’en est inquiété, par exemple, le président Idriss Déby Itno, qui s’exprimait devant la presse, à l’occasion des 60 ans d’indépendance du Tchad. Il faisait allusion à l’implication de plusieurs puissances étrangères dans le conflit libyen. « La Turquie n’est pas le seul pays à se mettre dans la danse. Il y a beaucoup d’agendas et tous ne militent pas en faveur de la stabilité, du retour à la paix, d’une réconciliation des Libyens, au grand dam des pays du Sahel qui sont les premières victimes », a insisté le chef de l’Etat tchadien qui, comme plusieurs de ses pairs africains, milite pour un règlement de la crise libyenne par les Africains.

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, veut aussi que l’Afrique occupe une place centrale dans la résolution du conflit libyen. « L’UA est essentielle dans la résolution du conflit libyen », soulignait-il en février dernier. C’est fort de cela que certains pays occidentaux, dont les Etats-Unis, ont réitéré leur appel à un règlement politique de la guerre en Libye. Washington a même imposé des sanctions à des Libyens soupçonnés d’alimenter le conflit en menant un trafic de pétrole et de drogue et condamné la présence de forces militaires étrangères sur place, affirmant qu’il n’y avait pas de « gagnant » dans la guerre civile qui déchire le pays.

Mise en garde contre la marginalisation de l’Afrique

Lors de la réunion inaugurale du groupe de contact ONU-UA sur la Libye tenue le 12 mars dernier à Oyo, à 400 km au nord de Brazzaville, le président en exercice de l’organisation continentale, Cyril Ramaphosa, avait plaidé pour la tenue des négociations interlibyennes. « Nous tenons à réitérer le fait qu’il ne peut absolument pas avoir de solution militaire au conflit qui sévit en Libye ; toutes les parties libyennes et les responsables, les dirigeants communautaires, les organisations non gouvernementales, doivent s’engager en faveur du dialogue », déclarait-il. A ce sujet, le président du Comité de haut niveau de l’UA sur la Libye, Denis Sassou N’Guesso, avait déjà mis en garde la communauté internationale contre la marginalisation de l’Afrique dans la résolution de la crise libyenne, qualifiant de « contre-productif » tout règlement qui ne tiendrait pas compte du continent.

Malgré des appels au dialogue au moment où l’Afrique s’apprête à convier tous les protagonistes à des pourparlers directs, certains pays continuent d’attiser le feu pour fragmenter la Libye en plusieurs entités. Dans leurs agendas, des mercenaires étrangers se battent en Libye dans le but d’assouvir les ambitions inavouées de leur Etat. C’est le cas de la Turquie qui apporte un soutien militaire accru au GNA depuis fin 2019. Ankara a notamment fourni des conseillers militaires au camp de Fayez al-Sarraj et y a également envoyé des combattants syriens en renfort à ses effectifs, des drones et des systèmes de défense anti-aérienne. Tripoli bénéficie également du soutien du Qatar et de l’Italie.

Frontalier de la Libye, l’Egypte a réagi ces derniers temps contre l’extension du conflit libyen, craignant pour la sécurité de son peuple. Et comme on pouvait s’y attendre, le torchon brûle maintenant entre le GNA et le Caire qui soutient le maréchal Khalifa Haftar et menace d’intervenir militairement en Libye si les troupes pro-Tripoli avancent vers la ville stratégique de Syrte.

La Russie joue aussi un rôle majeur en Libye où l’on note la présence de mercenaires appartenant à la société privée Wagner, considérée comme proche de Vladimir Poutine, l’actuel président russe.  Ces mercenaires sont engagés dans les combats aux côtés du maréchal Khalifa Haftar.

Outre l’Egypte et la Russie, l’homme fort de la Cyrénaïque est aussi appuyé par les Emirats arabes unis et l’Arabie Saoudite. Quant à la France, elle reconnait avoir aidé Khalifa Haftar en matière de renseignement, mais dément tout soutien miliaire aux troupes de ce dernier.

 

Nestor N'Gampoula

Légendes et crédits photo : 

Les rivaux libyens Fayez al-Sarraj et Khalifa Haftar

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