Présidentielle au Sénégal: Karim Wade et Khalifa Sall mis hors-jeu

Samedi 1 Septembre 2018 - 17:30

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Les deux figures politiques sont quasiment hors de la course pour le scrutin présidentiel de février 2019 dans le pays. La condamnation de l’un et l’exclusion sur les listes électorales de l’autre ont mis au rouge leur espoir de briguer la magistrature suprême.

Le 31 août, Khalifa Sall comme Karim Wade ont chacun essuyé un revers judiciaire. Le premier, lun des principaux opposants au pouvoir de Dakar, a vu sa peine de cinq ans de prison pour escroquerie sur les deniers publics confirmée par la Cour d'appel et vient d'être révoqué de ses fonctions de maire de Dakar par décret du chef de l'Etat. L'ambition présidentielle de Khalifa Sall demeure de fait à la merci de la justice.

Une révocation dénoncée par plusieurs défenseurs des droits de l’homme. « C'est catastrophique à ce stade de la procédure que le président Macky Sall prenne un décret pour révoquer Khalifa Sall. C'est admettre qu'il est fautif, alors que les voies de recours ne sont pas encore terminées », a déclaré Babacar Ba, du Forum du justiciable, une organisation de défense des droits de l'homme.

Karim Wade est, lui, exclu des listes électorales. La Cour suprême s'est dit incompétente pour statuer sur son recours mais son avocat estime qu'il conserve des chances de se présenter à la présidentielle de février 2019. Le fils de l’ancien président, Abdoulaye Wade, avait vu sa demande d'inscription sur les listes électorales rejetée, le 2 juillet, par le ministère de l'Intérieur qui avait invoqué des dispositions du code électoral, privant de droits civiques toute personne condamnée à plus de cinq ans de prison, alors que la Cour de répression de l’enrichissement illicite, juridiction spéciale qui l’a condamné, a expressément exclu dans sa décision la déchéance des droits civiques. Il avait été condamné en 2015 à six ans de prison ferme, à plus de deux cent-dix millions d'euros d'amende pour « enrichissement illicite » et à la confiscation de tous ses biens.

A Dakar, le camp de Khalifa Sall comme celui de Karim Wade pointent du doigt des décisions politiques et portent la même accusation : une cabale politique menée par le pouvoir pour les écarter de la présidentielle. Les proches de l'ex-maire de Dakar n’ont pas changé leur discours depuis son arrestation en mars 2017. « Cette affaire est la preuve d’une instrumentalisation de la justice, qui a perdu toute crédibilité », lâchent-ils en substance.

Mais la décision en appel qui confirme sa condamnation, à cinq ans de prison pour escroquerie, n'empêchera pas Khalifa Sall de mener campagne pour la présidentielle, même depuis sa prison, affirme son entourage. Il s’agit désormais d’affûter ses armes pour l’élection : définir un programme, rallier des partis autour de sa candidature et lancer la collecte des parrainages.

Le clan de Karim Wade se montre plus menaçant. Les leaders de son mouvement politique, le Parti démocratique sénégalais, appellent à un combat de rue pour imposer la candidature du fils de l’ancien président, Abdoulaye Wade. Tous les moyens sont désormais permis pour rallier les citoyens autour de leur poulain comme une sorte de déclaration de guerre envers le pouvoir. Le refus de l’inscription de Karim Wade sur les listes électorales est « scandaleux », ont-ils déclaré.

Cette concordance de calendrier lie en quelque sorte leur destin politique. Khalifa Sall est encore en sursis. Sa défense va se pourvoir en cassation auprès de la Cour suprême après sa condamnation en appel. Cette juridiction ne rejuge pas l’affaire sur le fond mais vérifie si la loi a été respectée. La défense de l'ancien maire de Dakar refuse de communiquer sur les délais dans lesquels elle va saisir la Cour suprême. Sa stratégie consiste à gagner du temps. « Khalifa Sall est toujours présumé innocent. Où sont les conseillers et les juristes du président de la République », s'est interrogé Babacar Ba.

Quant à Karim Wade, ses recours devant la justice sénégalaise sont épuisés. Il est définitivement exclu des listes électorales et ne peut donc pas être candidat à la présidentielle. Mais son parti fait fi de toute décision de justice et maintient sa candidature.

Josiane Mambou Loukoula

Notification: 

Non