Projet Inga 3 : les experts soulèvent des préoccupations sur l’accord de financement

Jeudi 25 Octobre 2018 - 19:36

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Une large partie de l’opinion nationale pense que la RDC a remporté une grande victoire en arrachant quasiment un financement de quatorze milliards de dollars américains auprès des partenaires chinois et européens, espérant que le  pays va enfi réaliser son rêve de plus de trente ans.

 

Au-delà de l'espérance, des incertitudes persistent, notamment la question essentielle du remboursement de l’énorme dette au regard de l’instabilité du pays et la non-prise en compte de la population dans la distribution du courant électrique généré par Inga 3. Dans un document parvenu à notre rédaction, Global strategies and local governance livre une lecture intéressante sur la nouvelle donne, rappelant quelques informations importantes sur le projet Inga 3. Après trente ans de recherche des partenaires, la  République démocratique du Congo (RDC° vient de conclure un partenariat historique avec un groupement de chinois conduit par China Three gorge et un autre d’Européens conduit par l’espagnol Actividades de construccion y sericios. Il s’agit d’un accord de financement d’une hauteur de quatorze milliards de dollars américains visant ce très budgétivore projet . Ce dernier va générer une production de 5 GW d’électricité qui serviront, notamment, à alimenter l’industrie minière de la RDC et les besoins en électricité de la République d’Afrique du Sud. Voilà pour l’essentiel.

L’analyse du cabinet en stratégie révèle au moins quatre points essentiels. Tout d’abord, cet accord de financement est l’un des plus importants investissements en Afrique au cours des derniers vingt-quatre mois. Depuis trente ans, poursuit Yvonne Andiva, personne n’a osé s’y aventurer. « Personne n’y a vu la moindre opportunité, tout le monde y a vu danger sur danger », a-t-elle dit.  Il faut reconnaître également que le moment choisi pour présenter le projet Inga 3 était un peu spécial pour le pays, avec les tensions politiques et la crise économique qui a conduit à l’essoufflement de la croissance économique. La RDC était, d’ailleurs, classée dans le top 3 des pays à très haut risque pour tout investissement d’au moins deux cent cinquante mille dollars américains, révèle le cabinet.

Après ce premier constat, le cabinet passe au deuxième point relatif cette fois au projet lui-même. « Les chutes d’eau à Inga sont uniques en leur genre, permettant une chute de près de quarante-deux millions de tonnes par seconde d’eau ». Par conséquent, le site est capable de produire une énergie hydroélectrique exceptionnelle dans un environnement de quatre-vingt-six millions d’habitants, a insisté Yvonne Andiva. Pour comprendre l’importance du projet, l’on parle aujourd’hui de tripler la capacité productrice d’Inga pour atteindre 5 GW. La première préoccupation de l’experte intervient justement au niveau de ce deuxième point essentiel. Des études de faisabilité suggèrent que la capacité d’Inga atteigne les 11 GW. « Cela sera moins coûteux en termes d’intérêt que lorsqu’on s’y attelle que pour 5 GW. On aura plus dépensé pour gagner moins », précise le cabinet.

Par rapport au troisième point essentiel, Yvonne Andiva fait remarquer l’absence de certains aspects essentiels du projet, notamment la dimension sociale. Il se dégage une impression assez alarmante à ce sujet. « Dans le contrat, une seule chose compte. C’est l’alimentation du secteur minier et le ravitaillement en énergie électrique de la République sud-africaine », poursuit-elle.

Enfin, le quatrième point essentiel se rapporte au poids du contrat et l’épineuse question de la responsabilité. Théoriquement, China three Gorge et ACS vont se partager la responsabilité des conséquences sur l’environnement et les communautés locales. La dette sera supportée par la population présente et future de la RDC. « Comment ces multinationales parviendront-elles à récupérer leurs quatorze milliards USD investis dans ce mégaprojet au moment où tout le monde est conscient du plus haut risque d’investir dans ce pays », s'interroge le cabinet?

En définitive, les préoccupations soulevées contribuent à lancer un grand débat sur la question. On le sait, le secteur minier est au cœur de la stratégie du gouvernement central pour redémarrer la croissance économique en panne, au regard des perspectives plus prometteuses surtout pour le cobalt. « Le secteur minier est emprisonné dans un système qui devra récupérer les quatorze milliards de dollars américains qui sont placés aujourd’hui dans son exploitation », indique l'étudeTout est dit. La recherche d’une solution durable à la question énergétique ne devra pas se faire au détriment des priorités dans le secteur social et économique.

Laurent Essolomwa

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