Report des élections : des appels à la démission de Corneille Nangaa se multiplient

Samedi 22 Décembre 2018 - 17:00

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Depuis qu’il a annoncé l'ajournement des scrutins cette fois-ci au 30 décembre, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) aura vu sa cote dégringoler dans l’opinion avec, à la clé, un lynchage médiatique qui traduit le peu de crédit qu’une frange importante des Congolais accorde désormais au processus électoral.

Entre l’institution électorale et la majorité des Congolais, la confiance n’y est presque plus. Même l’échéance du 30 décembre évoquée par Corneille Nangaa ne rassure guère dans une opinion publique désormais en rupture de confiance avec la Centrale électorale. Malgré la couverture qu’il continue de bénéficier de la part de l’actuelle majorité qui dit comprendre les raisons techniques avancées pour justifier ce report, les coalitions « Lamuka » et « Cach », les deux plates-formes électorales de l’opposition les plus en vue, ne ratent plus une seule occasion pour tirer à boulets rouges sur Corneille Nangaa et son bureau.

« Corneille Nangaa a échoué. La Céni a failli ». Cette rengaine, l’opposition en a fait sa tasse de thé en faisant porter au président de l’institution électorale l’entière responsabilité du report des élections justifié, selon elle, par le faible déploiement du matériel électoral, notamment à Kinshasa où plusieurs équipements ont été détruits après l’incendie du principal entrepôt de la Céni. « Ça fait deux ans qu’elle est censée organiser ces élections mais elle n’a pas pu le faire. Je crois qu’on ne peut plus permettre à Nangaa et son équipe de nous conduire vers ces élections, ils doivent juste démissionner », avait tempêté l’unique candidate à la présidentielle, Marie-Josée Ifoku, sur un média périphérique capté à Kinshasa.

Plusieurs Congolais qui se sont exprimés sur le sujet à diverses circonstances mettent en relief l’incapacité de la Céni, sous Corneille Nangaa, à organiser les élections qui étaient censées avoir lieu depuis décembre 2016. La rallonge du calendrier électoral obtenue à la suite de l’accord de la Saint-Sylvestre n’aura été d’aucun effet pour autant que le processus actuel n’a pu conduire les Congolais aux urnes le 23 décembre et ce, après les deux cycles électoraux de 2006 et 2011. Ce qui a amené certains compatriotes à s’interroger sur l’expertise de Corneille Nangaa en matière électorale, d’autant plus qu’il a disposé suffisamment de temps pour conduire les Congolais aux urnes à cette échéance. L’intéressé avait plus d’une fois rassuré ses compatriotes sur le respect du calendrier par la Céni. Il s’en tenait mordicus au chronogramme électoral et n’envisageait nullement un quelconque report, estimant que cela risquait d’avoir des conséquences néfastes sur la stabilité et la légitimité des institutions ainsi que sur la consolidation de la jeune démocratie congolaise.

Corneille Nangaa rattrapé par son optimisme

Répondant à une requête d’un candidat à la présidentielle, Seth Kikuni, qui sollicitait en novembre un report des scrutins, Corneille Nangaa avait réservé une fin de non recevoir à sa proposition. Il n’y avait donc, pour lui, ni justification légale ni contrainte technique pour envisager une telle perspective.  Le président de la Céni affichait un optimisme débordant qui s’était renforcé avec l’acquisition des engins destinés au déploiement des kits électoraux dans les provinces. De moins en moins, la Céni se plaignait d’insuffisance des moyens financiers et logistiques pour organiser les scrutins. La logique souverainiste dans laquelle s’est alignée le gouvernement avait trouvé là une raison d’être et, surtout, d’espérer face à une communauté internationale qui n’avait guère baissé sa main tendue. Visiblement, tout semblait baigner dans l’huile, à en croire Corneille Nangaa qui occultait délibérément les difficultés qui s’amoncelaient sur le parcours des camions militaires chargés de convoyer les machines à voter et leurs accessoires dans certains territoires et localités difficiles d’accès ou dans certains axes livrés à la merci des coupeurs des routes.

L’incendie, il y a quelques jours, du principal entrepôt de la Céni qui a vu près de huit mille machines à voter (MAV) partir en fumée, a fini par ramener son président sur terre tout en démontrant l’étendue du travail qui restait à faire, à quelques jours du vote. À un rythme lent, les MAV dont il faut déjà rapatrier un grand nombre pour suppléer le déficit qu’accuse dorénavant  Kinshasa gagnent difficilement leurs lieux d’affectation. Du déploiement des bulletins de vote dans la capitale à la formation continue des agents commis dans les centres de vote et à la sensibilisation des Congolais dont des milliers expérimenteront la MAV le jour même du vote, en passant par les difficultés d’acheminer les kits électoraux dans des zones insécurisées, la tâche est ardue. Une semaine supplémentaire, pour être techniquement au point le 30 décembre, paraît donc une gageure pour la Céni appelée à démentir toutes les mauvaises prédictions à son encontre.                        

Alain Diasso

Notification: 

Non