Ressources naturelles : le pillage des forêts et des océans freine la progression de l’Afrique, estime Kofi Annan

Jeudi 8 Mai 2014 - 12:45

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Le rapport 2014 de l’Africa Progress Panel - un groupe qui assure un plaidoyer en faveur du développement durable et équitable en Afrique auprès des plus hautes instances - a été présenté ce jeudi 8 mai par l’ancien secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, son président. Le texte invite les dirigeants africains à s’attaquer aux inégalités et exhorte la communauté internationale à prendre des mesures contre le pillage des ressources naturelles du continent

Intitulé « Céréales, pêche et capitaux : financer la révolution verte et la révolution bleue de l’Afrique », ce rapport d’Africa Panel Progress, que dirige Kofi Annan, invite notamment les dirigeants politiques africains à prendre dès maintenant des mesures concrètes afin de réduire les inégalités en investissant dans l’agriculture. Il réclame une action internationale pour mettre un terme à ce qu’il décrit comme le pillage des forêts et des océans du continent.

L’analyse indique que les abondantes ressources naturelles de l’Afrique représentent une occasion unique d’améliorer considérablement la vie des citoyens africains, mais ces ressources sont trop souvent pillées par des fonctionnaires corrompus et des investisseurs étrangers. « Le pillage des ressources naturelles est un vol organisé sous couvert de commerce. Certains chalutiers commerciaux opèrent sous pavillon de complaisance et déchargent leur pêche dans des ports qui ne consignent pas leurs captures, ce qui est contraire à l’éthique », a affirmé Kofi Annan lors de la présentation officielle du rapport. Il a souligné que ces activités criminelles aggravaient le problème de l’évasion fiscale et des sociétés-écrans.

« L’Afrique est un continent d’une grande richesse, alors pourquoi la part de l’Afrique dans la malnutrition et les décès d’enfants à l’échelle mondiale augmente-t-elle si vite ? Parce que les inégalités altèrent le lien entre la croissance économique et les améliorations en matière de bien-être, a expliqué Kofi Annan. Après plus de dix années de croissance, il y a matière à se réjouir (…). Mais il est temps de se demander pourquoi une telle croissance n’a que si peu contribué à sortir la population de la pauvreté, et pourquoi une si grande partie des richesses naturelles de l’Afrique est gaspillée dans des pratiques de corruption et des activités d’investissement peu scrupuleuses. »

Bien que le revenu moyen ait augmenté d’un tiers ces dix dernières années, il y a davantage d’Africains qui vivent dans la pauvreté aujourd’hui (environ 415 millions) qu’à la fin des années 1990. Les nouveaux objectifs mondiaux de développement viseront sans doute à éradiquer la pauvreté d’ici 2030, mais si les tendances actuelles se poursuivent, un Africain sur cinq souffrira encore de la pauvreté à cette échéance. Kofi Annan, qui avait joué un rôle central dans la définition des objectifs du Millénaire pour le développement, a affirmé : « En souscrivant au nouveau cadre de développement mondial, les pays devraient s’engager non seulement à réaliser des objectifs ambitieux, mais également à réduire les écarts injustifiables qui existent dans la région entre les riches et les pauvres, entre les populations des zones urbaines et rurales, et entre les hommes et les femmes. »

L’étude présente l’agriculture comme la clé d’une croissance qui réduira la pauvreté. « Les pays qui ont bâti leur croissance sur un secteur agricole dynamique, notamment l’Éthiopie et le Rwanda, ont démontré que le secteur rural pouvait être un puissant moteur de croissance inclusive et de réduction de la pauvreté », a relevé l’ancien secrétaire général. Par ailleurs, le rapport préconise une révolution verte 100% africaine, qui adapterait les enseignements tirés de l’expérience asiatique aux réalités africaines. Cela est d’autant important puisque l’Afrique importe actuellement 35 milliards de dollars de produits alimentaires, l’agriculture locale étant confrontée à une faible productivité, à un manque d’investissements chronique et à un protectionnisme régional.

S’il est vrai que le rapport 2014 d’Africa Panel Progress sur les progrès en Afrique se montre critique à l’égard des gouvernements africains, il incite également la communauté internationale à soutenir les efforts de développement de la région. Il montre que la pêche et l’exploitation forestière sont deux domaines dans lesquels les règles multilatérales doivent être renforcées afin de lutter contre le pillage des ressources naturelles.

Nestor N'Gampoula