Sportissimo. Fétiche-magie-prière : un bon mélange au football

Samedi 23 Juin 2018 - 12:38

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Dans notre jeune âge, vers les années 1960 à 1980, nous observions dans les arènes de football, des scènes qui dépassaient notre entendement. C’est plus tard que nous avions compris qu’il s’agissait des pratiques fétichistes. Vraisemblables, ces scènes rocambolesques qui pourraient faire l’objet d’anecdotes, étaient en soi des véritables spectacles dans le spectacle.

Quelques anecdotes
Tenez, avant la sortie des équipes des vestiaires pour monter sur l’aire de jeu, nous assistions aux spectacles des estafettes des comités dits de recherche qui donnaient l’impression de jouer aux charlatans. À cette époque, chaque club disposait, en dehors des organes dirigeants légalement attestés et reconnus, de ces fameux comités dont l’activisme s’affichait à l’occasion des matchs de leurs clubs. Ces envoyés envahissaient le terrain de jeu pour asperger les cages des gardiens de but avec de l’eau en provenance de plusieurs sources : la rivière Nkamba des Kimbaguistes, les morgues  (de l’eau ayant servi au lavement des cadavres), les églises ( de l’eau dite bénite donnée par les prêtres catholiques ou par les pasteurs des églises de réveil). Les œufs à piétiner par les joueurs sur la ligne de touche avant d’explorer la pelouse du stade, le sel, les pigeons, les corbeaux, les chats, voire les chiens faisaient partie des tableaux de l’avant-scène du spectacle de football, sous la barbe des forces de l’ordre impuissantes d’agir, à l’allégresse ou à la déception du public, selon le camp supporté. Il nous était parfois arrivé d’assister au lancement des ballons sur le terrain dès le vestiaire. Le nombre de ballons atterris sur le terrain, sous les applaudissements frénétiques du public, présageait le score  du match en faveur de l’équipe d'où ils venaient. Les parfums des différentes odeurs et la fumée des cigarettes, voire du chanvre, polluaient l’air dans les gradins.

 Les cimetières, les églises et certains sites jugés mystiques faisaient partie des loges de certaines équipes à la recherche de la puissance d’anéantir l’adversaire.
Pendant les matches, d’autres actions que d’aucuns qualifieraient d’inédites sont mises en scène sous le fallacieux prétexte de « tourner le match »,  d’abroutir ou d’hypnotiser les adversaires. Certains joueurs racontent eux-mêmes des histoires à faire dormir debout les incrédules. Un gardien de but, préférant requérir l’anonymat, déclarait voir le train ou le  lion aux tirs des coups francs comme pour dire que les ballons se métamorphosaient ainsi pour prendre le chemin des filets. Un attaquant prétendait voir un éléphant dans les perches de l’équipe adverse. Pour distraire cet éléphant, il fallait recourir à la canne à sucre, par exemple. Nous avons compris plus tard pourquoi les dirigeants de certains grands clubs de Kinshasa et de Brazzaville mangeaient la canne à sucre pendant le déroulement de matches. Lorsqu'il s'agissait d'un match contre une équipe à obédience musulmane, l’on servait des porcs pour anéantir le pouvoir du maraboutage.

Del Mabobo parle de la foi
Enfin le fétiche est-il vraiment présent au football en Afrique, la magie en Occident, le vaudou en Amérique du sud ? Et la prière dans les églises qui devient monnaie courante, surtout en Afrique centrale. «  Aide-toi, le ciel t’aidera », entendons-nous dire dans les milieux des églises. Pourtant, Dieu est pour tous, même pour les adversaires qui vont aussi à la prière avant le match. Comment expliquer que Dieu donne la victoire à une équipe aux dépens de l’autre ? À cette question, Del Mabobo répond : «  Cela dépend de la foi en priant avec sincérité. C’est à ce moment que la grâce reçue de Dieu impacte sur les qualités athlétiques pour réaliser les meilleures performances ». La prière se fait aussi sur le terrain par le regroupement des joueurs autour d’eux-mêmes avant le match. Au regard de toutes ces pratiques, nous nous demandons quand elles sont déterminantes dans la performance sportive. Nous vous ferons  découvrir quelques témoignages des acteurs sur le terrain dans le prochain numéro.
 

 

Pierre Albert Ntumba

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