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Samedi 28 Février 2015 - 8:45

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Voici bientôt un quart de siècle que le pluralisme politique a été instauré au Congo à la faveur de la Conférence nationale souveraine (CNS) ; un quart de siècle que les opérateurs du secteur ne sont pas parvenus à faire fructifier pour le bonheur du pays. La preuve en est donnée par l’échec quasi collectif qu’ils refusent malheureusement d’assumer sur la consolidation de la démocratie. Regardons donc comment, depuis près de vingt-cinq ans, les partis naissent, disparaissent, les alliances se font, se défont, les dirigeants se rapprochent, se distancent. Avec une résultante toute calamiteuse : la démobilisation et la désillusion du peuple-électeur.

De 1991, année de la tenue de la CNS, à ce jour, devrait-on peut-être, à notre corps défendant, saluer le dynamisme de la vie politique au Congo  à travers la naissance des formations politiques. Elles seraient, si l'on en croit les statistiques, un peu plus de deux-cent enregistrées officiellement dans les fichiers du ministère de l’Intérieur et de la décentralisation. Nombre d’entre elles prennent part aux différentes élections organisées dans le pays, participent à la vie des institutions nationales et animent le débat politique comme elles le peuvent. Mais ce sont-là les seuls motifs de satisfaction pour l’observateur de la scène congolaise, car beaucoup d’indices poussent au pessimisme. Prenons-en un seul, pour observer combien le dynamisme évoqué plus haut est l’arbre qui cache la forêt.

Sachant,  en effet, que les partis politiques congolais se départissent difficilement de cette tare congénitale de ne jamais parvenir à recruter le tiers de leurs effectifs loin du village natal de leur fondateur, le salut pour tous et pour le pays, devrait venir des alliances qu’ils tissent avec leurs nombreux partenaires. Mais ces alliances ont une durée de vie si brève qu’elles ne résistent que le temps de la sortie officielle, de la contestation d’une élection ou d’une décision publique. Sans éluder le fait que les circonstances même les plus incertaines peuvent être des occasions propices à l’éclosion de mouvements politiques ou associatifs incontournables, il sied de reconnaître que dans le cas présent, le bénéfice est nul sur toute la ligne. Voici comment :
sous la Transition Milongo (1991-1992) naquit l’Alliance nationale pour la démocratie (AND) à laquelle fit partie l’UPADS. Elle ne survécut pas à l’arrivée au pouvoir du président Pascal Lissouba et surtout à sa perte par ce dernier. Nées avant l’AND, les Forces de changement et de progrès (FCP) moururent avant d’avoir porté au pouvoir leurs leaders, André Milongo et Bernard Kolélas. L’Union pour la République et la démocratie-Forces démocratiques unies (Urd-Fdu), constituée autour du MCDDI et du PCT, après tant de batailles gagnées ensemble, a du plomb dans l’aile.  Que dire des instruments de la guerre du 5 juin que furent les Forces démocratiques et patriotiques (FPD) et l’Espace républicain pour la démocratie et l’unité nationale (ERDUN) ?
Que dire de la Convention pour la démocratie et le salut (Codesa), bruyante au sortir du conflit du 5 juin, presque la plus teigneuse des oppositions au PCT et ses alliés ?

Lorsque certains de ses ténors mirent en place la Convention pour la démocratie et l’alternance (Code-A), rallièrent ensuite l’Alliance pour la nouvelle république (ANR), l’Alliance pour la République  et la démocratie (ARD), ou encore les FPOC (Forces politiques de l’opposition congolaise), on ne sut plus où les retrouver dans le paysage politique national. Mais que sont devenus le Rassemblement pour la majorité présidentielle (RMP) et l’Initiative nationale pour la paix (INP) enfantés dans la querelle de positionnement au sein de la même famille politique ? Le relais en a été pris par les partis dits du centre que l’on croyait à l’abri du repli sur soi. Il n’y a pas longtemps, ce groupement s’est émietté à son tour.

Dans ce cirque et ce cycle sans fin, les perdants, ce sont ces hommes, ces femmes et ces jeunes jouant de la flûte et roulant les tambours à la création de ces mouvements. Ils ne savent plus où mettre la tête. À la vérité, le plus grand perdant, c’est bien le processus démocratique qui, ainsi, ne saurait réellement prendre corps au sein de la population. Et si on avance que la classe politique congolaise a échoué, qu’il lui faut se réinventer, s’adapter, se former, se réformer, elle se défend de ne jamais avoir eu le temps de s’exprimer. Le temps ou le terrain ? On ne sait pas trop !
 

Gankama N'Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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