Transparence fiscale : les pays africains appelés à renforcer leur coopération

Jeudi 16 Novembre 2017 - 20:03

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A l’occasion du 10e Forum mondial sur la transparence fiscale, les pays africains ont été invités, le 15 novembre à Yaoundé au Cameroun, à renforcer leur coopération pour lutter efficacement contre les flux financiers illicites.

« Les économies africaines enregistrent chaque année entre 52 et 60 milliards de dollars de pertes fiscales à cause de ces flux financiers illicites », selon le rapport d’un panel de l’Union africaine, supervisé par l’ex-président sud-africain Thabo Mbeki. D'après les observateurs, cet énorme manque à gagner fait de l'Afrique la région du monde la plus touchée par ce fléau.

Ainsi, la présidente du Forum mondial, l'Espagnole Maria-José Garde a invité ces pays à renforcer leur présence au sein du Forum, afin de lutter contre ces redoutables flux financiers illicites. « Nous voulons qu'ils nous rejoignent et coopèrent avec nous. Nous voulons évoluer avec tout le monde. La coopération internationale est importante pour mener la lutte contre la fraude fiscale et les transferts financiers illicites », a-t-elle déclaré, lors d'un point de presse en marge de cette réunion , dont la clôture est prévue le 17 novembre.

Un panel de ministres des Finances africains s'est réuni à l'occasion de la première journée de discussions pour lancer « un appel à l'action en Afrique » lors d'un débat sur le thème « combattre les flux financiers illicites grâce à la coopération fiscale internationale ». Le but était d'encourager les pays encore non adhérents d'intégrer le Forum mondial.

Selon l’Initiative Afrique créée au sein de cet organe, la participation des pays africains à l'échange de renseignements à des fins fiscales reste marginale à cause d'un manque de volonté et d'accompagnement politique. Pourtant, « l'Afrique est touchée autant, sinon plus, que les pays développés par l'épineuse question d'érosion des bases d'imposition fiscale », a déploré le ministre camerounais des Finances, Alamine Ousmane Mey, rappelant un manque annuel de 100 milliards de dollars auquel les pays du continent sont confrontés pour le financement de leur développement.

Les difficultés de ces pays à lutter avec efficacité contre la fraude fiscale internationale et les flux financiers illicites tiennent dans bien des cas à l'absence d'un cadre juridique et législatif, ainsi que des compétences nationales adaptés au problème. « Nous ne pouvons pas parler de coopération internationale sans tout d'abord renforcer notre système d'échange d'informations interne », a martelé le ministre ougandais des Finances, Haruna Kasolo Kyeyune.

Le Forum mondial s'emploie, pour cette édition, à favoriser une prise de pouvoir politique des pays africains. « Les pays africains dépendent davantage de l'impôt sur le revenu et sur les sociétés que d'autres pays du monde », a expliqué Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d'administration fiscales (CTPA), basé à Paris, évoquant la nécessité d'accroître leur coopération internationale. Selon une dirigeante du Forum mondial, le nombre de demandes d'informations augmentent à travers le monde : de centaines, on est passé à des milliers de requêtes. « Ce chiffre va continuer d'exploser », a-t-elle prédit. Et de préconiser : « Nous devons communiquer de façon à ce que la classe politique et les citoyens comprennent ce que nous faisons. Notre rôle est de veiller à ce que les normes soient appliquées et, de manière efficace, veiller à ce que nos juridictions soient à la hauteur de nos engagements (...) Nous savons combien la transparence et l'échange d'informations sont importants », tout en annonçant un plan d’actions pour aider à réaliser cet objectif.

Emanation de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), cette institution créée en 2000 œuvre à la lutte contre les pratiques fiscales dommageables entre les pays du monde. En Afrique, 27 des 55 membres de l'UA figurent parmi ses 141 adhérents. Sur un total de treize signataires, sept ont ratifié la convention multilatérale sur l'assistance administrative, un instrument contraignant d'évaluation de la mise en œuvre des normes de transparence et d'échange de renseignements à des fins fiscales. Leur application a permis de collecter au sein de ses membres près de 55 milliards de dollars de revenus dissimulés par des contribuables à leurs autorités fiscales.

Le rendez-vous de Yaoundé est le deuxième organisé en Afrique, après celui de 2012 au Cap en Afrique du Sud. Plus de 80 pays et entités juridiques indépendantes y sont représentés, dont certains cités comme étant des paradis fiscaux comme le Panama, le Luxembourg, les Iles Caïmans, Maurice ou encore les Seychelles. Preuve de la mobilisation internationale croissante contre les pratiques fiscales illicites, les organisations internationales telles que les Nations unies, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et l'Union européenne y prennent également part.

Josiane Mambou Loukoula

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