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Une semaine après le Brexit …

Samedi 2 Juillet 2016 - 16:39

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Ce que l’on redoutait dès le départ et qui s’impose désormais comme une évidence une semaine après le vote historique des Anglais contre leur maintien dans l’Union européenne, est l’incapacité des Vingt-sept à définir une politique cohérente face à la décomposition qui les menace. Dirigée depuis le 1er juillet et pendant les six prochains mois par un Président du conseil dont le pays, la Slovaquie, affiche clairement son euroscepticisme face à l’afflux des migrants, le Vieux continent se divise clairement sur les questions essentielles. Certes, il affiche une unité de façade, mais celle-ci ne trompe personne.

Toute la question est donc de savoir ce qu'il sortira de la crise présente. De deux choses l'une, en effet : ou bien les Européens s'entendent pour poursuivre la longue marche vers l'unité qu'ils ont entreprise au sortir de la deuxième guerre mondiale, ou bien ils s'efforcent de recomposer leur communauté en partant sur de nouvelles bases qu'il est difficile de cerner aujourd'hui. Dans l'un comme dans l'autre cas des mois, voire même des années, seront nécessaires pour panser la blessure profonde que vient d'ouvrir le "Brexit" anglais.

Pour les partenaires de l'Europe qui, jusqu'à présent, avaient en face d'eux un  partenaire fiable même si sa gouvernance interne laissait fortement à désirer, débute une période d'incertitude dont il serait dangereux de sous-estimer la durée et d'ignorer les conséquences. Aussi convient-il d'engager dès à présent une réflexion approfondie sur le devenir des relations qui vont s'établir entre l'Union et le reste du monde ; en regardant la vérité en face même si celle-ci se révèle peu agréable.

L'Afrique, tout particulièrement, qui a cru longtemps avoir en face d'elle une puissance en voie d'unification après des siècles d'affrontement qui pourrait l'accompagner dans sa longue marche vers le développement durable, doit maintenant se poser les bonnes questions. A commencer par celles-ci dont l'énoncé quelque peu brutal risque de fâcher les technocrates installés à Bruxelles où ils faisaient jusqu'à présent la pluie et le beau temps : l'union monétaire qui se trouve au cœur  de la construction européenne résistera-t-elle au processus de désintégration financière que pourrait provoquer l'effritement politique de l'Union ? Et, si ce n'est pas le cas, qu'adviendra-t-il des monnaies multinationales comme le franc CFA sur lesquelles se trouve aujourd'hui fondée l'économie de nombreux Etats sur le continent africain ?

Ces deux questions méritent d'autant plus d'être posées que l’arrimage du franc CFA à l'euro, il y a dix-sept ans, a noué entre les quinze Etats de l'Afrique francophone et l'Union européenne une relation dont la rupture brutale provoquerait à coup sûr un véritable séisme dont la dévaluation brutale du franc CFA, le 11 janvier 1994, donne une idée aussi précise qu'accablante.

Alors que la France se trouve confrontée à des problèmes intérieurs que ses dirigeants actuels semblent incapables de résoudre la tutelle qu'elle exerce de fait sur la monnaie unique de son ancien empire coloniale devient pour le moins préoccupante. Si celle-ci vient à s'effriter du fait de la mésentente au sein de l'Union européenne, une crise de grande ampleur éclatera en Afrique ; une crise d'autant plus grave que plus de quatre-vingt-dix pour cent des réserves monétaires des pays des deux zones franc CFA sont aujourd'hui stockées à Paris dans les caves de la Banque de France.

Il serait bon, nous semble-t-il, que dans le même temps où les pays européens s'efforcent de reconstituer leur unité mise à mal par le "Brexit" la France et les  dirigeants africains s'assoient autour de la table pour désamorcer la bombe économique et monétaire qui menace d'exploser et qui causerait à coup sûr des dégâts irréversibles dans nombre de pays.

 

 

 

 

 

   

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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