Entrepreneuriat: plus de soixante-dix jeunes « égarés » apprenent de petis métiers

Jeudi 5 Décembre 2019 - 20:53

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L’initiative est de l’association Congo prosperity service qui, à travers la Maison des artisans, forme de jeunes filles et garçons, dont des professionnels du sexe et des « bébés noirs », dans plusieurs métiers.

Il est 12 h lorsque nous sommes dans les vestiaires du stade annexe-Massamba-Débat où des jeunes, tout sexe confondu, sont allongés sur le carreau. Il ne s’agit pas des athlètes mais plutôt de soixante-douze jeunes en voie de réinsertion par la Maison des artisans que dirige Emmanuel Grâce Batistin Balehola Miemoubada. Tout compte fait, ils viennent de prendre ensemble leur repas de midi.« Je suis ici depuis près de deux mois et cela se passe très bien. Nous sommes venus apprendre beaucoup de choses : fabriquer le savon, vinaigre, mayonnaise, la couture… Auparavant, je ne faisais rien, je me promenais dans tout Brazzaville, dans les boîtes de nuit, tous les week-ends. Maintenant, j’ai là où exercer et au retour, j’aurai un petit quelque chose », nous explique Frida.

Elle a, par ailleurs, remercié le promoteur de la Maison des artisans qui lui a permis de pouvoir se prendre en charge en lui offrant une seconde chance. « Nous avons déjà appris certaines choses dont j’ai déjà la maîtrise. Je demande à tous ceux qui sont encore dans la vie d'errance d’abandonner ce chemin qui ne procure en réalité rien, pour apprendre à être indépendante ».

Habitant le quartier Moukoundzi-Ngouaka, dans le premier arrondissement de Brazzaville, Makélékélé, un autre jeune salue lui aussi l’initiative. « Nous sommes venus apprendre et travailler à la fois pour essayer de gagner nos vies en nous prenant en charge. Nous avons choisi ici pour avoir plus de connaissances sur certaines choses, parce que si nous continuons avec la boisson, cela ne nous apportera rien. Nous sommes tous appelés à être des parents un jour », pense-t-il, invitant d’autres jeunes se livrant encore au banditisme à venir se faire inscrire.

Outre cette catégorie de jeunes, l’association Congo prosperity service milite aussi pour la réinsertion d’autres couches défavorables à l’instar des veuves et des diplômés sans emploi. Wakson vient à peine d’abandonner ses études à l’Université Marien-Ngouabi : « C’est un ami qui m’a appelé pour me dire qu’il y a du travail ici. Je n’ai pas pu poursuivre mes études à la l’université parce que je n’avais pas de moyens. Donc, je me suis dit qu’il fallait chercher du travail qui peut au moins me rapporter quelque chose. Ça se passe bien, j’ai déjà appris à fabriquer le savon de bain, en attendant la fabrication de la bouillie », a-t-il témoigné.

Lutter contre les comportements déviants

Promoteur de l’ONG, Emmanuel Grâce Batistin Balehola Miemoubada estime que sa démarche, qui prend en compte les jeunes venus des quatre coins de Brazzaville, vise à lutter contre les antivaleurs tant décriées par tous. « En fait, j’ai toujours tendance de dire que si aujourd’hui le Congolais pouvait prendre la charge de cinq jeunes, nous n’allons plus connaître le phénomène "bébés noirs".  Ici, nous avons des jeunes de la rue, des ex-prostituées, des bébés noirs, des veuves, nous leur apprenons des métiers », explique ce biochimiste et nutritionniste.

En effet, les jeunes apprennent la fabrication du vinaigre à base d’avocat, des boissons gazeuses, du vin de table, de champagne, du lait à base de soja, du savon liquide et solide, du shampooing, du cirage. Ils apprennent aussi la couture, notamment la conception des équipements sportifs. « Nous avons le matériel, les tissus aussi sont sur place. Même certains  clubs du pays viennent solliciter des maillots chez nous », commente Emmanuel Grâce Batistin Balehola Miemoubada.

Avec l’aide du ministère de la Jeunesse et de l’éducation civique, cette ONG a pris l’initiative de loger certains apprenants dans des maisons de leur choix. Une façon d’accompagner, d’après le promoteur, l’œuvre du président de la République dans la lutte contre les antivaleurs.  « Ces jeunes-là ont été acceptés gratuitement et la ministre de la Jeunesse m’a toujours interpelé sur ce point. Parmi eux, il y a certains qui ont déjà commencé à produire sans la présence du laborantin. A la fin, ils auront des certificats », a-t-il poursuivi, précisant que la durée maximum de la formation est de cinq ans.

Parlant des difficultés rencontrées, il a évoqué les problèmes d’électricité, d’eau et d’approvisionnement en matériel, précisément les bouteilles. S’agissant des matières premières, la Maison des artisans s’approvisionne dans les départements du Pool, la Bouenza pour le soja, et le nord du pays pour le miel.

Parfait Wilfried Douniama

Légendes et crédits photo : 

Le promoteur de la Maison des artisans posant avec les apprenants / Adiac 2- Emmanuel Grâce Batistin Balehola Miemoubada/Adiac

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