Les Dépêches de Brazzaville



Cour criminelle : l'accusé Norbert Dabira se décharge sur le général Nianga Ngatsé-Mbouala


Le 16 mai, au cours des débats de fond, le principal accusé a déchargé tous les griefs qui pèsent sur lui, notamment l’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat, sur l’ancien commandant de la Garde républicaine (GR), le général Nianga Ngatsé-Mbouala. « Quand la veuve Thystère Tchicaya m’a fait la révélation selon laquelle le général Nianga Ngatsé-Mbouala avait l’intention de déposer le président de la République, je me suis rendu à son bureau et il m’a proposé d’aller chez lui à la maison. Lorsque je suis allé chez lui, je lui ai dit que si vous avez l’intention de déposer le président de la République, je connais mon grand-frère, il ne se laisserait pas faire car il n’accepte pas l’humiliation, il préfère mourir », a révélé le général Norbert Dabira devant la Cour.

En effet, d’après lui, cette femme lui avait dit que le général Nianga Ngatsé-Mbouala lui aurait confié ses intentions de déposer le président de la République pour l’envoyer à la retraite à Oyo car, la situation politique du pays était difficile. « Ce qui m’emmène ici, c’est cette phrase : " A moins que vous touchez à son intégrité physique, sinon il ne peut pas accepter qu’on le mette de côté, sauf s’il choisit lui-même son successeur " », a poursuivi l'accusé, indiquant que si son interlocuteur n’était pas dans cet esprit, il l’aurait arrêté.

 « Je lui ai fait parvenir une SIM de la RDC pour qu’il m’appelle »

Pour lui, l’idée du tireur d’élite est partie du général Nianga Ngatsé-Mbouala. « Après, je suis parti en France pour trois semaines, il y a eu un évènement important : le départ du pouvoir du président Robert Mugabe au Zimbabwe. J’ai cherché à joindre Nianga-Mbouala au pays sans suite. Entre-temps, je lui ai fait parvenir une SIM de la RDC pour qu’il m’appelle afin que je lui dise qu’il ne cherche pas à attenter à quelque chose. Il m’appelle par mon numéro de Brazzaville pour me dire qu’il a trouvé les deux tireurs que j'avais demandé et qu’il attendait mes instructions, alors que c’est lui qui a des hommes et du matériel », reconnaît l’ancien Haut-commissaire à la réinsertion des ex-combattants qui se dit attaché au chef de l’Etat depuis quarante-cinq ans, faisant allusion aux écoutes téléphoniques interceptées par les services de renseignements.

De retour au pays, Norbert Dabira aurait conseillé au général Nianga Ngatsé-Mbouala d’abandonner cette démarche et ce dernier lui aurait demandé s'ils n'étaient que les deux impliqués dans ce coup d’Etat. « Je lui ai demandé de calmer ses ardeurs. Il pensait que j’étais venu le sonder puisqu’il y a des clans autour du président de la République. C’est à ce moment qu’il a dû informer le chef de l’Etat, parce qu’il a compris que j’étais venu l’espionner car faisant partie d’un autre clan », a laissé entendre le général Dabira devant la Cour.

De leur côté, le président de la Cour d’appel de Brazzaville, Christian Oba; le procureur général, Michel Oniangué; et Me Emmanuel Oko, avocat de la partie civile, ont voulu savoir de l’accusé ses relations avec Marcel Makomé, activiste politique congolais basé en France, la Direction générale des services extérieurs de France, Pierre Laurent (colonel Kossovo) et l’opposition radicale en France. Rien de particulier, a répondu Norbert Dabira, sauf avec Marcel Makomé avec qui il se rencontrait parfois.

Des révélations sur l’attaque du 4 avril 2016

Le général Norbert Dabira a également déclaré devant la barre que Nianga Ngatsé-Mbouala serait aussi impliqué dans l’affaire de l’attaque des quartiers sud de Brazzaville par les Ninjas du pasteur Ntoumi, en avril 2016. « Avant le 4 avril 2016, Gozardio, le cadet du pasteur Ntoumi qui était mon adjoint, me fréquentait. Un mois avant cette attaque, il était devenu ami au général Nianga Ngatsé-Mbouala pour des raisons que j’ignore. Un mois après, j’ai reçu un témoin oculaire qui est venu me dire que les armes utilisées par les ninjas provenaient du général Nianga Ngatsé-Mbouala », a-t-il annoncé.

Selon sa déposition, c’est M. Mbinzi, commissaire à la réinsertion des ex-combattants, qui lui a donné ces informations avec preuves à l’appui. C’est ainsi qu’il lui demandera de dresser une fiche qu’il avait remise au secrétaire général du Conseil national de sécurité, l’amiral Jean Dominique Okemba. « Ce qui était curieux, c’est le fait que malgré cette fiche, Nianga-Mbouala est toujours resté en poste. Je me disais que je m’étais peut-être trompé », a-t-il souligné.

Après ces déclarations troublantes, l’ancien commandant de la GR, jusque-là témoin de la partie civile, aura quelques heures ce 17 mai pour contredire ou confondre son accusateur.


Parfait Wilfried Douniama