Les Dépêches de Brazzaville



Lire ou relire: "Rosées lointaines"


On dit que la solitude des poètes n’est pas totalement solitaire. Elle est solidaire de l’état mirifique et même misérable du monde. Dans son silence intérieur, le poète accouche des représentations verbales qui en expriment tous les sentiments. Des plus sublimes au plus révoltants.

Aussi se présente-t-il comme cet « enfant des silences faiseurs de mots et de complicité/ enfant des regards partagés, mouillés d’amour ou de chagrin ». Ayi, le chantre d’un univers endolori à cause de l’inhumanité croissante de l’action humaine. Il consacre sa verve poétique comme une verge pour fouetter les esprits hideux et immondes qui freinent l’ascension de son pays natal. Sa plume sert d’éveil dans une Afrique langoureuse cumulant un retard qui donne du vertige face à ses innombrables potentialités humaines et naturelles.

Le chantier du poète s’articule autour de la négation de la guerre et de toutes formes de violences sur une frange d’innocents. Contre la prédation à l’échelle nationale et continentale, l’écrivain appelle l’Africain à la prise de conscience. « Gare ! lance-t-il, car la traîtrise, telle une macabre fuite en avant, vous jette sur un sentier qui conduit vers le gouffre béant ».

De la perversité du système éducatif, source des déviances sociales, aux pesanteurs de la condition humaine, le poète se révèle la voix des sans-voix. Oui, comme il va falloir « dans le feu des forges de l’esprit, faire couler le fer rougi par les larmes d’autrui et par la force d’une obstination en extraire une goutte de fascination ».

Ainsi le poète se livre-t-il à une quête qui intéresse tous les champs de l’activité humaine et de la vie du cosmos, partant de l’amour sensuel à la solidarité universelle. Et les mots imagés pour noyer les incongruités revêtent leur vocation philanthropique et dulcifiant.


Aubin Banzouzi

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