Les Dépêches de Brazzaville




Littérature : les auteurs africains de la rentrée littéraire 2019


Dès la fin du mois d’août débutera en France ce grand rendez-vous annuel et typiquement français baptisé « la rentrée littéraire ». Vous savez, cette période si particulière où l’on vous demande d’ingurgiter quelque 500 romans en trois mois. Cette année, on annonce même une production en légère diminution, puisque « seulement » 524 romans sortiront contre 567 l’année passée. Aussi avons-nous opté pour corser votre appétit, de vous présenter au fil des semaines, les livres des auteurs africains qui paraitront lors de cette période unique et qui seront, à n’en point douter, en lice pour la saison des prix littéraires.

Tous tes enfants dispersés, de Beata Umubyeyi Mairesse (Autrement)

Pour son premier roman qui paraitra aux éditions « Autrement » fin août, la Franco – Rwandaise, Beata Umubyeyi Mairesse, raconte l’histoire de Blanche, une Rwandaise qui vit à Bordeaux après avoir fui le génocide des Tutsi de 1994. Elle a construit sa vie en France, avec son mari et son enfant métis Stokely. Mais après des années d'exil, quand Blanche rend visite à sa mère Immaculata, la mémoire douloureuse refait surface. Celle qui est restée et celle qui est partie pourront-elles se parler, se pardonner, s'aimer de nouveau ? Stokely, lui, pris entre deux pays, veut comprendre d'où il vient. Ode aux mères persévérantes, à la transmission, à la pulsion de vie qui anime chacun d'entre nous, Tous tes enfants dispersés porte les voix de trois générations tentant de renouer des liens brisés et de trouver leur place dans le monde d’aujourd’hui. Ce premier roman fait preuve d’une sensibilité impressionnante et signe la naissance d’une voix importante. Un roman qui aborde des thèmes chers à Henri Lopes ; le métissage et l’identité. Ce roman a été retenu dans la première sélection du prix Fnac qui sera attribué en septembre.

Rouge Impératrice, de Léonora Miano (Grasset)

On présente la Camerounaise Léonora Miano qui, cette fois-ci, nous revient avec un pavé de 600 pages dans lequel elle nous plonge dans un continent africain prospère et autarcique, presque entièrement unifié, comme de futurs Etats-Unis d’Afrique, où les Sinistrés de la vieille Europe sont venus trouver refuge. Miano nous embarque dans une Afrique futuriste, un peu plus d’un siècle après le nôtre.

Tout commence par une histoire d’amour entre Boya, qui enseigne à l’université, et Illunga, le chef de l’Etat. Une histoire interdite, contre-nature et qui menace de devenir une affaire d’Etat. Car Boya s’est rapprochée, par ses recherches, des Fulasi, descendants d’immigrés français qui avaient quitté leur pays au cours du XXIe siècle, s’estimant envahis par les migrants.

Afin de préserver leur identité européenne, certains s’étaient dirigés vers le précarré subsaharien où l’on parlait leur langue, où ils étaient encore révérés et où ils pouvaient vivre entre eux. Mais leur descendance ne jouit plus de son pouvoir d’antan : appauvrie et dépassée, elle s’est repliée sur son identité. Le chef de l’Etat, comme son ministre de l’Intérieur et de la Défense, sont partisans d’expulser ces populations inassimilables, auxquelles Boya préconise de tendre la main. La rouge impératrice, ayant ravi le cœur de celui qui fut un des acteurs les plus éminents de la libération, va-t-elle en plus désarmer sa main ? Par la qualité de sa plume, Léonora Miano tient le lecteur en haleine tout au long des 600 pages de ce roman, qui à la fin paraît moins volumineux qu’on l’imaginait.

 

Boris Kharl Ebaka

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