Université Marien-Ngouabi : un colloque sur les langues nationales rend hommage à feu le Pr Antoine Ndinga Oba

Samedi 18 Mai 2019 - 17:15

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La conférence organisée par le Centre de recherches en linguistique et langues orales (Cerello), le 17 mai à Brazzaville, a réuni un nombre important de linguistes africains, particulièrement de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale, de la Communauté de développement d'Afrique australe et de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'ouest​, sous les auspices du ministre de la Culture et des arts, Dieudonné Moyongo. 

 

Laboratoire de l’Université Marien-Ngouabi qui regroupe les chercheurs de cinq parcours-types concernés par l’étude des langues dans leurs divers aspects, le Cerello s’inscrit dans la mouvance de description et de théorisation des langues africaines dans leur globalité et complexité. Il a voulu, par le colloque qu'il vient d'organiser, d'éveiller l'amour pour des recherches approfondies sur les langues africaines menacées de disparition. A travers cette rencontre, le Cerello a voulu aussi se souvenir du chercheur congolais qui avait dédié sa vie à l’étude des langues, à savoir le Pr Antoine Ndinga Oba. 

« Une manière bien sûr d’honorer son œuvre mais aussi et surtout de dire à tous qu’il y a péril pour nos langues et donc nos cultures. Autant, aujourd’hui, le réchauffement climatique alarme le monde entier, autant il en sera de nos cultures demain qui prendront un coup si elles venaient à disparaÏtre. De cette manière, plus personne n’écrira notre histoire ; l’histoire de nos langues qui valent autant que nos langues d’ailleurs. Il faut que les scientifiques s’activent à consigner ce qui reste encore de celles-ci. Ce sera un immense héritage à laisser aux générations futures », a estimé le Pr Yvon Pierre Ndongo-Ibara.

Le Pr Antoine Ndinga Oba, a-t-il dit, a œuvré pendant plus de vingt ans à la description, préservation et documentation des langues du Congo. Ses publications ont porté sur le lingala, le kituba, le Mbosi, enyellé, bomitaba, bwenyi, bobangi, bongili, ngare, koyo, moyes. Son ouvrage anthologique, a-t-il laissé entendre, fut les deux tomes sur les langues du groupe C20 sur le titre "Les langues bantoues du Congo Brazzaville, étude typologique des langues du Congo C20" (mbosi ou mbochi) Tome 62. En plus de ce qu'il fut linguiste, le Pr Antoine Ndinga Oba fut un éducateur. Sa vision, dans cette perspective, a été développée dans un ouvrage publié en 1989 surle titre "L’enseignement en Afrique : cas du Congo", Paris, Présence Africaine. Il a également mené le combat de la valorisation des langues congolaises en œuvrant pour leur introduction dans le système éducatif national. C’est ainsi qu’il créa un Certificat d’aptitudes au professorat d’enseignement de langues en lingala et kituba.

Ndinga Oba, fervent défenseur des langues et cultures africaines

Ouvrant les travaux du colloque international sur les langues africaines en hommage au Pr Antoine Ndinga Oba, le recteur de l’Université Marien-Ngouabi, le Pr Jean-Rosaire Ibara, a tenu à rappeler qu’il ne peut y avoir d’universités sans recherche et de laboratoires sans colloques ou manifestations scientifiques. C’est pour autant dire que l’Université Marien-Ngouabi, dans son plan stratégique de développement, accorde une place de choix à la création des laboratoires de recherche, soutient et encourage vivement l’organisation des colloques internationaux, gage de la vitalité des équipes de chercheurs.

« Votre présence à cette cérémonie témoigne d’un double intérêt, celui que vous portez sur les langues africaines, symboles et véhicules de nos cultures ancestrales, et celui sur la personne du Pr Antoine Ndinga Oba, grand défenseur de la valorisation des langues africaines », a-t-il déclaré, prenant pour référence l’ouvrage de Joseph Itoua, "La part mbosi dans la civilisation bantoue" (2018 :133) dans lequel il affirme « La langue est la dimension centrale de la culture de tout peuple … Elle enseigne des aspects à travers lesquels le monde est perçu… »

Pour le Pr Jean-Rosaire Ibara, les langues africaines regorgent d’énormes richesses qui, au fil du temps, sont perdues par manque de politiques de sauvegarde. Il a cité le Pr Théophile Obenga qui déclarait: « Les légendes, mythes, épopées, contes, proverbes, devinettes, formules magiques, poèmes, chants…, sont l’œuvre du temps. Si la tradition orale les a conservés jusqu’à nos jours, que de trésors perdus cependant! »

Parlant du Pr Antoine Ndinga Oba pour lequel l’événement a été dédié, le recteur de l’Université Marien-Ngouabi a dit que l’illustre disparu a été un linguiste, éducateur, ancien recteur, ancien ministre de l’Education nationale, ancien ambassadeur, homme de lettres et amoureux de langues. Il a précisé que le Pr Antoine Ndinga Oba a étudié les langues africaines, d’une part, et mené un combat pour leur introduction dans le système éducatif congolais, d’autre part. C’est ainsi qu’il a dédié son ouvrage "Les langues bantoues du Congo Brazzaville", à la population africaine dont les langues sont marginalisées et menacées de disparition. Il a renchéri que dans la préface du même ouvrage, « Il s’agit de restituer à ces langues le rôle primordial qui est le leur dans l’éducation, …, la question des langues doit figurer en bonne place parmi les priorités liées au développement ».

Ainsi, le Pr Antoine Ndinga Oba s’inscrivait dans le même registre que l’Unesco, l’Union africaine et la Francophonie qui pensent que la préservation et le développement des langues et des cultures nationales sont indispensables pour l’épanouissement réel de la population.     

A l’issue de ces allocutions, le Pr Paul Nzété a tenu une conférence plénière sur le thème « Ndinga Oba tel que je l’ai connu ». 

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Quelques invités posant avec les organisateurs de la rencontre

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