In memoriam : Rapha Bounzeki, 12 ans déjà dans l’au-delà

Lundi 11 Mai 2020 - 17:15

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10 mai 2008- 10 mai 2020, voici exactement douze ans que disparaissait au Centre hospitalier universitaire (CHU) de Brazzaville, l’artiste musicien Rapha Bounzeki,  de son vrai nom Bernard Bounzeki.  

Né le 4 août 1961 à Brazzaville, c’est finalement à l’âge de  47 ans que cet auteur-compositeur et chanteur congolais trouva la mort  des suites d’un malaise causé par une crise d’hypertension. Chantre de la sapologie, Rapha Bounzeki a laissé aux amoureux de la bonne musique et à la postérité une œuvre immense. C’est à l’âge de 19 ans, soit en 1980, que Rapha Boundzeki Aphara Yana Papa commença sa carrière solo. Après avoir été membre des groupes musicaux comme Vivacité  Mélodia et Véritable Mandolina, Rapha Bounzeki se lance en solo dans les genres musicaux, notamment rumba, ndombolo, soukous, avec des chansons telles qu' “Ecolier, réveille-toi!” et “Parisien refoulé” qui enflamment la scène musicale congolaise ; “Ma Bouesso” ; “Touvi”. Son single “Mateya” qui signifie en français « Conseils » caracole pendant trois années successives à la première place du hit-parade congolais. Il enchaîne ensuite les albums « Sapologie 1, 2, 3 et 4 », mouvement vestimentaire et culturel congolais dont il faisait partie des plus grands noms.

Max Toundé, qui s’est occupé de la production phonographique de Rapha Bounzeki pendant près de deux décennies sur les vingt-huit ans de sa carrière musicale (1980- 2008), a déploré la mort de cet artiste avec lequel ils avaient des projets de productions. Accusé à tort, il a toujours affirmé qu’il ne doit pas un seul franc à Rapha Bounzeki qu’il considérait comme un membre de sa famille. Bien au contraire, il lui a fait des avances d’argent lorsqu’il était embêté.  

En dépit de quelques malentendus, tout était rentré dans l’ordre entre Rapha Bounzeki et Max Toundé. Ils avaient renoué avec leurs activités. Rapha Bounzeki devait repartir en France pour un concert à Lyon puis à Manchester (Angleterre). Pour la circonstance, Max Toundé avait même effectué le déplacement de Brazzaville pour ficeler ce contrat. Comme Rapha Boundzeki était marié en France, il lui suffisait seulement de régulariser sa situation administrative à Nantes pour que le tout rentre dans l’ordre. Il y était invité également par l’Apeco pour animer un gala humanitaire à Nice. Il avait manifesté sa joie d’y participer.

Les droits d’auteur

Outre ce contrat de productions, faisant partie des rares artistes congolais possédant une façade artistique en France, Rapha Bounzeki et son producteur avaient entamé des démarches auprès de la Sacem, où ils avaient retiré le fichier, dit son ancien producteur. Il se trouve  que la Sacem lui avait versé ses droits de 4 622 euros, soit environ plus de trois millions FCFA, au Bureau congolais du droit d’auteur (BCDA). D’après son ancien producteur, Boundzéki avait déjà perçu une avance de quatre cent mille francs CFA et attendait le reste. Rapha Bounzeki, qui vivait dorénavant à Pointe-Noire, est venu à Brazzaville toucher ses droits d’auteur.

 Souffrant d’hypertension au regard de tout ce qu’il avait connu, spolié, expulsé, réduit à la mendicité, comme il l’évoque dans sa dernière chanson : “Nzo ba boula” (destruction de sa maison), son médecin parisien lui avait conseillé de se reposer assez. Mais dommage. « Le BCDA lui devait l’équivalent de quatre mille euros. J’ai vérifié si la somme était disponible au siège de la BCDA. On m’a dit, oui. Le ton a monté entre Boundzéki et les agents du BCDA. Sa tension artérielle est montée à vingt-six. Il a fait un AVC. Transporté d’urgence à l’hôpital, il est mort en route, vers le collège Ganga Edouard. Je ne dis pas que ce sont les agents du BCDA qui l’ont tué. Je rappelle aussi que sa maison a été cassée vers l’aéroport de Pointe-Noire, comme il l’évoque dans la chanson “Nzo ba boula”. Une belle villa, construite avec l’aide de l’entrepreneur Mantsima qui a beaucoup fait pour Rapha, jusqu’aux achats des instruments de musique. Moi, je lui ai acheté deux voitures », a témoigné son producteur Max Toundé dans un journal en ligne.

Des obsèques nationales à la taille de l’artiste

Avant d’être conduit à sa dernière demeure, le gouvernement avait décrété pour lui des obsèques nationales qui ont été organisées au Cercle Soni-Labou-Tansi à Bacongo dans le deuxième arrondissement de Brazzaville.  A Pointe-Noire, où il a passé ses derniers moments, une veillée mortuaire a été organisée au stade Tata Loboko de Tié-Tié dans le troisième arrondissement. Les groupes et artistes locaux y ont presté. En France, la veillée organisée par Connivence Boutique, s’est tenue à Nota Saint-Denis au 55 rue Charles Michel, non loin du RER. Le sapeur Ben Moukasha, Belkos, G.G. Théo, Jean-Daniel Ntouta, Jean-Claude Songola (Nganda Tsié-tsié), Bruno Toundé, Serge Mayembo, Alex Bouyéza étaient à cette veillée.  Les artistes suivants y avaient presté : Théo Blaise Nkounkou, Tanawa, Michel Rapha, Belkos ainsi que des musiciens des deux rives. Parmi les artistes étrangers qui avaient fait le déplacement de Brazzaville, il y a Papa Wemba venu droit de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo.

C’est finalement le 23 mai 2008, devant une pléthore d’autorités administrative et politique que Rapha Bounzeki est conduit à sa dernière demeure, au cimetière du centre-ville de Brazzaville. Une foule immense s’était déplacée pour voir et dire un dernier adieu à Aphara Yana Papa. Les sapeurs venus des deux Congo et de la diaspora ont exhibé leurs tenues pour lui rendre un dernier hommage. Le corps sans vie de l’illustre disparu avait parcouru une partie du centre-ville. Un véritable cortège jusque-là jamais égalé par le nombre des mélomanes venus dire adieu à leur idole, leur artiste préféré.

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Rapha Bounzeki (crédit photo/DR)

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