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Le Congo va-t-il perdre le Fespam?

Lundi 18 Juin 2018 - 13:17

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Il nous revient de différents côtés que les reports successifs du Festival panafricain de musique, le très célèbre Fespam, pourraient bien, à brève échéance, signer son arrêt de mort. Ou, plus exactement, conduire l'Union africaine à en confier la réalisation à un autre pays que le Congo puisque celui-ci s'avère incapable de respecter le calendrier fixé dès l'origine de cette belle manifestation artistique et culturelle qui prévoyait sa tenue tous les deux ans.

Ayant tiré à plusieurs reprises la sonnette d'alarme ces derniers mois sur le danger que font courir les retards ainsi accumulés, nous sommes bien placés aujourd'hui pour plaider avec force le maintien en vie de cette institution et son positionnement au Congo. Imagine-t-on, en effet, les effets destructeurs qu'aurait sur l'image du pays la localisation en un autre lieu que Brazzaville de ce rendez-vous musical prestigieux vers lequel affluent les plus grands artistes africains ?

Pour que les choses soient dites de façon encore plus claire, il apparaît que dans les coulisses de l'Union africaine, deux pays au moins – dont nous ne citerons pas les noms  pour la simple raison qu'ils ne se sont pas déclarés officiellement candidats à la reprise du Fespam –  s'agitent, arguments à l'appui, pour obtenir  que leur soit confiée la prochaine édition du festival. Et, bien sûr, la course de fond qui s'engage officieusement est appuyée par des artistes de renommée internationale qui, déçus par le manque de réactivité du Congo, l'ont fait savoir par différents canaux mais n'ont manifestement pas été entendus.

De ce qui précède et qui se trouve fondé non sur des ragots ou des « fake news » mais sur des faits bien réels ressort la conclusion que si, très vite, le Congo, notre Congo, n'envoie pas des signaux forts concernant la continuité de son engagement en faveur du Fespam, celui-ci sera confié à l'un ou l’autre des Etats qui font déjà valoir en sous-mains leur volonté et leur capacité de redonner vie au festival. Une situation d'autant plus déplorable que dans les mois à venir, le redressement des finances publiques congolaises généré par la signature de l'accord de long terme avec le Fonds monétaire international, par la hausse continue des prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux et par la réduction des dettes contractées envers les traders permettra de dégager les fonds – d’ailleurs relativement  modestes – nécessaires pour la tenue du festival.
Etant simples observateurs de la scène, nous n'avons évidemment pas de conseils à donner à ceux qui devront assumer demain, devant l'opinion publique nationale et  internationale, la responsabilité de l'échec qui se profile à l'horizon, mais il nous semble évident que si l'Etat confie sans délai à de vrais professionnels l'organisation et la tenue de l'édition 2019 du Fespam, le désastre attendu se transformera en une victoire qui contribuera elle-même fortement à l'affirmation du Congo sur la scène artistique mondiale. Bien au-delà du rêve, un tel rebond aurait sans aucun doute pour lui des effets très positifs dans un moment où la diplomatie culturelle s'impose comme un impératif sur les cinq continents.

N'oublions pas que les éditions du Fespam de 1999 et 2001 ont joué un rôle majeur dans la reconstruction de l'image du Congo que les guerres civiles des années précédentes avaient terriblement dégradée. Et gardons présent à l'esprit le fait que la réussite de ce festival, l'an prochain, contribuerait certainement de façon décisive à l'affirmation de Brazzaville comme la capitale culturelle, artistique de l'immense et potentiellement très riche Bassin du Congo.

 

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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