Brexit : l’accord trouvé entre Bruxelles et Londres

Jeudi 17 Octobre 2019 - 19:17

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L’annonce a été faite le 17 octobre par les deux parties, juste avant un sommet européen, mais l'adoption du texte au Royaume-Uni semble déjà compromise après le rejet de l’opposition et des unionistes nord-irlandais.

Côte à côte, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, et Boris Johnson, le Premier ministre britannique, ont fait chacun une courte déclaration pour marquer le moment que tous deux aimeraient historique.

« Nous avons un accord et cet accord signifie qu’il n’y a pas besoin d’une quelconque prolongation », a averti Jean-Claude Juncker. Et « ce n’est pas que le point de vue des Britanniques, c’est le mien », a-t-il ajouté.

Boris Johnson, farouche opposant de tout report après la date prévue du 31 octobre, a salué un « résultat raisonnable et juste ». Il a immédiatement exhorté les députés britanniques à soutenir l’accord pour « faire aboutir le Brexit sans délai ».

Après plusieurs jours et nuits de négociations « intenses », les délégations de l’Union européenne (UE) et du Royaume-Uni ont trouvé jeudi un compromis sur les points problématiques qui, selon Londres, empêchaient toute ratification, en particulier sur les moyens déployés pour éviter tout retour d’une frontière physique entre l’Irlande et l’Irlande du Nord.

« Nous nous sommes parlé à deux reprises par téléphone avec Boris Johnson cette nuit », a confié Jean-Claude Juncker.

Mais l’annonce aussitôt faite, les modifications à peine publiées, le parti unioniste nord-irlandais ( DUP), allié clé du Parti conservateur de Boris Johnson, jetait un froid, en affirmant son opposition à l’accord trouvé.

Le DUP, qui compte dix députés à la Chambre des communes, a dit ne pas être « en mesure de soutenir ces propositions au parlement », sur les questions de règlement douanier et du consentement de l’exécutif nord-irlandais au projet de Brexit. Il a également regretté « un manque de clarté sur » le régime de taxe qui sera appliqué en Irlande du Nord, province britannique.

Jeremy Corbyn appelle au rejet

Puis le chef du Parti travailliste, principale formation d’opposition au Royaume-Uni, a appelé les députés britanniques à « rejeter » l’accord entre Londres et l’UE. Selon Jeremy Corbyn, « la meilleure façon de résoudre le Brexit est de donner à la population le dernier mot lors d’un vote populaire ».

Les députés britanniques se réuniront samedi - une première depuis la guerre des Malouines en 1982 - pour une séance exceptionnelle. Ces deux prises de position rendent toutefois improbable l’adoption du texte.

« Moi j’ai fait mon travail », a déclaré le négociateur européen, Michel Barnier, interrogé sur la possibilité que l’accord révisé soit de nouveau rejeté par la Chambre des communes.

« Il faudra bien qu’un jour dans cette assemblée (…) on prenne ses responsabilités et que ce qui a été décidé par un référendum, et soutenu par les différents gouvernements avec lesquels nous avons négocié, se mette en œuvre », a observé Michel Barnier.

Jean-Claude Juncker et Michel Barnier ont recommandé aux dirigeants des vingt-sept, qui commençaient à arriver à Bruxelles pour un sommet des chefs d’Etat et de gouvernement, de donner leur feu vert.

À son arrivée à Bruxelles, le président français, Emmanuel Macron, s’est dit « raisonnablement confiant » quant à une ratification par le parlement britannique de l’accord, déclarant vouloir « croire que Boris Johnson aura une majorité ». Il a reconnu que « la satisfaction s’accompagne d’une légitime prudence ».

Les Européens sont quelque peu échaudés par la précédente expérience de l’accord négocié avec Theresa May, rejeté à trois reprises par le parlement britannique, ce qui avait entraîné le départ de la prédécesseure de Boris Johnson.

Dans la foulée de ces annonces, la livre sterling a gagné 1% face au dollar avant de réduire ses gains, les milieux économiques redoutant les conséquences potentiellement dévastatrices d’un « no deal » le 31 octobre.

Outre le parlement britannique, l’accord devra aussi être ratifié par le parlement européen. Le compromis trouvé jeudi modifie l’accord précédemment rejeté, et fait disparaître le « backstop » (filet de sécurité) controversé. Cette clause de sauvegarde maintenait l’UE et le Royaume-Uni dans un territoire douanier unique à défaut d’autre solution pour éviter le retour d’une frontière dans l’île d’Irlande, afin de préserver la paix après des décennies de violences.

Soulagement

Jusqu’ici, l’UE était réticente à changer cette partie du texte. Le nouveau compromis établit des règles particulières pour les douanes concernant les marchandises arrivant en Irlande du Nord, qui reste dans le territoire douanier britannique, selon que celles-ci sont destinées à y rester ou à passer dans le marché unique européen.

Il prévoit également un mécanisme de « consentement » des autorités nord-irlandaises sur la poursuite de l’application de certaines règles de l’UE dans la province britannique, après une période de quatre ans suivant la mise en œuvre de l’accord.

Le Premier ministre irlandais, Leo Varadkar, s’est félicité d’un accord « bon pour l’Irlande et l’Irlande du Nord » qui « respecte une histoire et une géographie uniques ».

L’accord de retrait, s’il est adopté, prévoit plus généralement les conditions du divorce entre le Royaume-Uni et l’UE, notamment en matière de droit des citoyens et de respect des engagements financiers. Il introduit également une période de transition jusqu’à décembre 2020 pour un départ en douceur.

« On est tous soulagé », a commenté le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, ajoutant: « Maintenant, c’est Londres qui a la balle dans son camp ».

 

 

Nestor N'Gampoula et AFP

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