Burundi : l’ONU redoute une nouvelle détérioration de la situation des droits de l’homme

Mercredi 30 Septembre 2020 - 17:30

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Après la mort du président Pierre Nkuruziza, et l’arrivée de son successeur Evariste Ndayishimiye, au pouvoir depuis deux mois, les nouvelles autorités estiment que la donne a changé en matière de respect des droits de l’homme. Gitega veut maintenant d’une coopération avec l’ONU qui soit axée sur le domaine socio-économique, dans la droite ligne de son « Plan national de développement » plutôt que de continuer à figurer sur l’agenda du conseil de sécurité.

Depuis 2015 et la crise qui a suivi la décision de l’ex-président de briguer un troisième mandat, les relations entre le Burundi et l’organisation internationale sont au plus mal. Mais la nouvelle équipe gouvernementale pense que les reproches qui sont faits au pays relèvent dorénavant du passé puisque « la page sombre sur la question est définitivement tournée ».

Du côté des Nations unies, l’on soutient qu’il n’y a pas toujours d’amélioration de la situation des droits de l’homme au Burundi.  En effet, dans le récent rapport de la commission d’enquête sur le pays, qui couvre la période de depuis mai 2019, il est souligné que depuis l’entrée en fonction du nouveau chef de l’Etat, le pays n’a vu « que très peu de changements positifs ».

« L’espace démocratique reste très étroit, l’impunité persiste et il n’y a aucune indication que le nombre de violations des droits de l’homme ait baissé sous le nouveau gouvernement », note le président de la commission, Doudou Diène. « Pour l’instant, on dit que les violations continuent », indique-t-il, précisant que « la passation de pouvoir offre l’opportunité d’un changement basé sur le respect des droits de l’homme (…) des principes démocratiques et de l’état de droit ».

Le rapport signale que de graves violations des droits de l’homme ont été commises dans le contexte des élections qui ont porté l’actuel président au pouvoir, citant exécutions sommaires, détentions, arrestations arbitraires, tortures et violences sexuelles. Le texte affirme que les membres et partisans du Conseil national pour la liberté, parti d’opposition ont été particulièrement ciblés, afin de l’empêcher d’obtenir des sièges au parlement.

Les auteurs présumés des exactions présents dans l’administration

Il relève la présence dans la nouvelle administration de personnalités sous le coup de sanctions internationales pour leur responsabilité présumée dans des exactions commises en 2015. La commission d’enquête de l’ONU estime, par ailleurs, que même après les élections, les facteurs de risque d’une nouvelle détérioration de la situation des droits de l’homme sont toujours présents au Burundi.

En attendant le 31 octobre, date retenue pour déposer le rapport de la commission d’enquête sur le bureau du secrétaire général de l’ONU afin que le Conseil de sécurité aujourd’hui divisée sur la question du Burundi se prononce à ce sujet, plusieurs ONG alertent la communauté internationale d’un potentiel assouplissement des mesures de surveillance du pays. C’est le cas de Human Rights Watch qui redoute que les responsables des exactions commises durant la crise post-électorale sus évoquée ne soient pas sanctionnés par le nouveau gouvernement, dans lequel certains accusés sont encore présents.

« Actuellement au Burundi, il n’y a pas de changement sur le terrain. Il y a bien sûr un changement au sein de la présidence, un changement du chef de l’Etat, mais ce changement n’est pas vu dans le pays. Le gouvernement doit sanctionner les gens qui étaient soupçonnés de commettre des abus », déclare Lewis Mudge, directeur Afrique centrale de l’ONG de défense des droits de l’homme. « Il faut contrôler les Imbonerakure. Jusqu’à maintenant, il n’y a pas un espace libre pour les défenseurs des droits de l’homme ou bien pour les journalistes, pour qu’il fasse leur métier », ajoute-t-il, soulignant que c’est le genre de changement que l’on attend.

Rappelons que depuis 2015, l’ONU dénombre au moins 1 500 morts et près de 330 000 déplacés, après les révoltes contre un troisième mandat de l’ancien président Pierre Nkurunziza. 

Nestor N'Gampoula

Légendes et crédits photo : 

L'actuel président burundais

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