IFC : des historiens débattent de la résistance, conquête et domination coloniales en Afrique centrale

Jeudi 12 Mai 2016 - 20:06

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Le troisième festival Images et histoire s’est poursuivi, le 11 mai à l’Institut français du Congo (IFC), par la tenue de deux conférences présentées respectivement par le Dr Etanislas Ngodi et l'historien Berny Sèbe portant  l'une sur la  résistance, la conquête et la domination en Afrique centrale  et l'autre sur la promotion des héros français et Britanniques à tavers les médias et l'édition.

Membre de plusieurs institutions et réseaux de recherche dont le Codesria, l’Uepa, l’Ussp et l’Igrac, le Dr Etanislas Ngodi, a exposé sur « Résistances, conquête et domination coloniales en Afrique centrale, le cas du Congo (XIXè-XXè siècles) ». Une donnée fondamentale dans la deuxième moitié du XIXème siècle, est la volonté manifeste des puissances européennes d’assurer la conquête, la domination et l’exploitation du continent africain. La relecture de l’histoire des mouvements de contestation et de protestation à l’ordre colonial s’impose comme une nécessité afin de mieux comprendre les collaborations possibles entre les colonisateurs et les colonisés.

Pour le Dr Etanislas Ngodi, quatre éléments essentiels justifient son intérêt pour ce sujet. En effet, très peu de travaux scientifiques abordent la thématique des résistances congolaises à la pénétration- conquête congolaise. On aurait mauvaise grâce de reprocher à des historiens de privilégier la toile de fond sur les résistances. Le champ d’analyse des mouvements de résistance s’inscrit dans une perspective de l’histoire contemporaine. L’histoire de ma conquête coloniale et des résistances qu’elle a suscitées a été trop longtemps dominée par des partis pris idéologiques surprenants, de la part des dominants comme des dominés. Peu d’écrits sont consacrés aux héros et martyrs, qualifiés de « bandits », « pillards » et « sauvages » dans les documents coloniaux. Certaines luttes sont restées jusqu’ici très mal connues.

Les rares travaux poursuit-il, se sont limités à énumérer quelques-uns des personnages historiques (Mabiala Ma-Nganga, Boueta Mbongo, Berandjoko, Ngaram Bizam, Mayeté, Mwene Mwetsege Akwa, Kani Belenguendze, Mwene Ngashi et Enymba ni Ndzaa), des conflits sans en dégager les caractéristiques essentielles, la signification profonde et les leçons apprises.

Enfin, le Dr Etanislas Ngodi affirme que les résistances à la pénétration- conquête coloniale font partie intégrante de l’histoire du Congo. Il focalise son propos autour des questions suivantes : les résistances du peuple congolais n’ont-elles pas été l’aboutissement de la conquête et la domination coloniales ? En quoi les résistances sont-elles intégrées dans l’histoire politique et sociale du Congo ? Quels sont les grands moments historiques des résistances à l’intrusion coloniale ? Quels sont les enseignements tirés des résistances congolaises à l’ordre colonial ?

La promotion des héros coloniaux français et britanniques à travers les médias et l’édition

Dans son exposé, l'historien Berny Sèbe, de David Livingstone à Charles de Foucauld, de Pierre Savorgnan de Brazza au général Gordon, du « Sirdar » Kitchener à Jean-Baptiste Marchand, les porte-drapeaux de la « mission civilisatrice », munis de leur Bible ou de leur fusil- parfois des deux, ont souvent été faites avec enthousiasme dans leurs pays d’origine. Leurs « exploits » firent la une des journaux, inspirant des générations de biographes, peintres et cinéastes. Coïncidant avec l’arrivée du journalisme moderne, ils ont incarné symboliquement la mise en œuvre du projet colonial et ont été aux avant-postes de la rencontre entre le colonisé et le colonisateur, objet de tous les mythes.

Prenant pour base la recherche qui l’a amenée à publier son livre Heroic imperialsts in Africa (2013, édition brochée parue en 2015), Berny Sèbe explore dans une perspective comparative la manière dont les héros coloniaux français et britanniques ont été sélectionnés, utilisés, mis en avant et mis en scène entre l’âge du « Nouvel impérialisme » et nos jours.

Au travers d’une plongée inédite dans des archives éditoriales souvent négligées, il révèle le rôle des médias et des éditeurs dans la promotion d’une douzaine de héros coloniaux des deux côtés de la Manche, examinant les mécanismes de fabrication de légendes médiatiques à l’ère de la presse à un sou, la place des questions coloniales dans les cultures métropolitaines, et le rôle de ces héros dans les grands récits nationaux de l’époque. Il considère également la renaissance post- coloniale de certaines de ces figures, parfois intégrées dans des panthéons cosmopolites.

Notons que les recherches de Berny Sèbe relatives à l’histoire coloniale française et britannique depuis le XIXè siècle analysent notamment le développement des cultures impériales dans les métropoles, la conquête, l’administration et la décolonisation du Sahara, l’influence des empires sur les sociétés contemporaines d’Europe occidentale, les enjeux de mémoire autour du fait colonial et les relations franco-britanniques dans le domaine des empires.

Bruno Okokana

Notification: 

Non