Gouvernement national : les chantiers de Bruno Tshibala

Samedi 8 Avril 2017 - 14:40

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Nommé le 7 avril 2017 dans la soirée, le nouveau Premier ministre arrive aux affaires au moment le plus critique pour l’économie de la RDC. Dès la démission de son prédécesseur, Samy Badibanga, le 7 avril dernier, le taux de change est passé à 1 400 FC le dollar américain USD à Kinshasa, un niveau jamais atteint. En dehors d’une économie déjà fragilisée par la crise économique, le nouveau locataire de la primature doit faire avancer le processus électoral dans un contexte très difficile. Non seulement la recrudescence des poches d’insécurité reste préoccupante mais l’opposition est bipolarisée à l'heure actuelle. Sorti d’une plate-forme politique dissidente, Bruno Tshibala fait face à l’opposition du Rassemblement courant Tshisekedi qui déplore une nomination sans la signature de l’accord et appelle à des marches dès ce lundi 10 avril 2017.

48 heures après le message à la nation du président Joseph Kabila, la RDC a un nouveau Premier ministre en la personne de Bruno Tshibala. Cet acteur politique, ancien compagnon de lutte d’Etienne TShisekedi, arrive aux affaires dans le cadre de l’Accord du 31 décembre 2016 dont l’Arrangement particulier en négociation n’a pas été signé, du moins pour l’instant. Ses adversaires de l’autre aile lui reprochent justement d’avoir accepté une aussi lourde fonction sans pour autant faire partie d’une des neuf composantes qui forment le Rassemblement des forces acquises au changement. Beaucoup d’analystes politiques craignent alors un retour à la case de départ, avec un Premier ministre non inclusif exclu depuis mars 2017 de l'UDPS. Au-delà des questions politiques à régler parmi lesquelles la formation du prochain gouvernement et l’accélération des tractations politiques pour la désignation d’un président du Comité de suivi de l’Accord consensuel, les tâches de Bruno Tshibala sont titanesques.

Dans son message à la nation, Joseph Kabila a présenté quelques chantiers qui l’attendent dès la mise en place du nouveau gouvernement. Sur le plan économique, le nouveau gouvernement devra fournir les efforts de mobilisation des recettes internes. Il devra poursuivre les réformes fiscales dont l’implantation des systèmes de gestion informatisés des contribuables au sein des régies financières. Mais pour mobiliser plus d’argent, il faut forcément changer de paradigme de développement. Sur ce point précis, tout en pointant un doigt accusateur en direction de la fiscalité « écrasante », Joseph Kabila a instruit le Gouvernement de suivre au parlement l’adoption de la nouvelle Loi sur la fiscalité et de la Loi sur le Partenariat public-privé ainsi que la finalisation de la Loi portant révision de certaines dispositions du Code minier. En plus des investissements publics, Joseph Kabila a prôné un appui direct du gouvernement au secteur privé productif. Avec des nouvelles Lois (sous-traitance aux PME et PMI locale, etc.) et des instructions précises, l’idée est de donner au gouvernement les outils nécessaires pour stabiliser de façon durable l’économie nationale.

L’autre chantier concerne la sécurité nationale, après la création récente d’un secteur opérationnel dans les Kasaï. Le gouvernement central devra intensifier sa présence dans les provinces touchées en vue d’un règlement politique et administratif de nombreux conflits coutumiers. Au regard des exactions et crimes graves commis par les responsables présumés, Joseph Kabila a instruit le gouvernement d’apporter le concours nécessaire à la réalisation des enquêtes. Par ailleurs, en dépit d’un contexte meilleur dans l’est du pays (Tanganyika, Sud-Kivu, Nord-Kivu etc.) au premier trimestre de l’année en cours, le président de la République a jugé nécessaire que le gouvernement poursuive les actions pour atteindre l’objectif d’une paix durable. La question de l’administration publique reviendra certainement très rapidement sur la table du nouveau Premier ministre. Sous son prédécesseur, les tractations étaient en cours pour l’amélioration des conditions sociales des agents et fonctionnaires estimés à 1,3 millions de personnes. Il y a des acquis mais les discussions sont loin d’être achevées et la menace d’arrêt de travail reste d’actualité en cas d’achoppement. Pour le chef de l’Etat, le gouvernement devra poursuivre les réformes pour arriver à maitriser les effectifs et la masse salariale. A ces conditions, il sera alors possible d’envisager une réaffectation des économies réalisées et des réajustements progressifs des traitements.

Quant au processus électoral, il reste la raison essentielle de la nomination du nouveau , gouvernement dans le cadre de l’Accord de la Saint Sylvestre. Le cap des 21,5 millions d’électeurs enrôlés a déjà été franchi sur financement propre du gouvernement à hauteur de 320 millions de dollars américains USD. Tout doit être mis à contribution pour assurer un atterrissage en douceur du processus électoral. Après avoir dégagé un consensus sur la problématique des séquences des élections et du fichier électoral, la répartition des sièges déterminée par une Loi restera l’ultime étape avant la convocation du scrutin.

Laurent Essolomwa

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