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Des intellectuels passifs face à la disparition de nos langues !

Samedi 8 Septembre 2018 - 19:09

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Au sens large du terme, la langue, nonobstant quelques querelles d’écoles, est de façon générale un système de signes linguistiques vocaux, graphiques ou gestuels qui permet aux individus de se communiquer. Hormis nos deux langues dites nationales, le lingala et le kituba, les autres sont en pleine extinction si l’on n’y prend garde.

Cette réalité devenant dangereuse, il est temps de sonner l’alarme afin que tous ces hommes et toutes ces femmes, intellectuels, hommes de lettres et d’art, des linguistiques et pouvoirs publics fassent quelque chose. Si ce n’est pas le cas, d’ici à soixante-dix ans voire moins, nos langues ne seront plus parlées par des générations futures. C’est bien là, la voie irréversible de leur extinction.

Si quelques Congolais vivant en ville, dont l’âge varie entre 60 ans et plus, arrivent encore à s’exprimer dans leurs langues maternelles malgré des accents phoniques qui laissent à désirer pour certains, il n’en est pas le cas pour des générations en-dessous de cette fourchette. Encore que peu sont ceux-là qui transmettent ces langues à leurs progénitures. En gros, les langues maternelles sont en train de s’éteindre par le manque de pérennité.

Ainsi donc, le vili, le téké, le mbochi, le moye, le mbondzo, le kouyou, le makouas parlés au XXe siècle ne sont plus les mêmes aujourd’hui. Oui, d’aucuns diraient que ces langues ont subi une acculturation ou un télescopage linguistique qui a causé d’un côté la perte du « fond sonique » et de l’autre la « forme structurale ». Mais reconnaissons qu’en plus de l’urbanisation progressive qui a une forte incidence sur la disparition de nos langues, il y a aussi la volonté affichée de certaines familles de les faire disparaître, refusant de les transmettre à leurs enfants. Certaines vont même plus loin en punissant sévèrement un enfant qui essaie d’apprendre la langue maternelle. Quel désastre !

Paradoxalement, quand arrivent des échéances électorales, par exemple, ces mêmes parents deviennent des inconditionnels de la langue maternelle lors de leurs descentes dans les localités d’origine, parfois en balbutiant simplement pour convaincre qu’ils sont bien du milieu. Pitié ! Pourtant, ce sont ces mêmes langues qu’ils refusent de transmettre à leurs descendances. Dommage !

Devant cette situation malheureuse, nous jetons l’anathème sur les universitaires, les linguistiques, anthropologues, sociologues, les chercheurs, bref tous les hommes de lettres et des sciences sociales. Car ce sont eux qui devraient être les premiers à se lever pour chercher à faire quelque chose. Le lingala et le kituba sont bien sûr enseignés à l’université, alors pourquoi les chercheurs, les linguistes et les politiques ne travailleraient-ils pas en synergie pour ouvrir des « Centres d’apprentissage des langues locales » pour leur pérennisation ? Oui, la grammaire est prescriptive et la linguistique est descriptive, donc ces hommes de lettres, pris ensemble, pourraient très rapidement réfléchir sur non pas la grammaire du « vili » ou du « mbondzo » mais plutôt sur leur pédagogie-linguistique afin que ces langues se perpétuent diachroniquement.

Le constat est là, il est trop amer. Et si les intellectuels continuent d’assister passivement à l’extinction de ces langues  sans faire quelque chose pour leur constance, nous arriverons au point de non-retour où elles ne seront que de vieux souvenirs abstraits. Faisons donc quelque chose !

 

Faustin Akono

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Édition Quotidienne (DB)

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