Cinéma : "Diboulou", un film d’Albe Diaho

Vendredi 1 Février 2019 - 12:33

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Le troisième film du réalisateur est sans aucun doute le plus abouti. Et même si la trame est un peu tirée par cheveux, ce film de 1h 50 est un vrai moment de détente puisqu’on ne voit pas le temps passé.  Le jeu des acteurs, le son, le filmage, les personnages attachants… bref, on est tout juste ému par le travail de l’artiste.

Pourquoi "Diboulou" ? « C’est pour dire que nous sommes tous dans un trou et que d’une manière ou d’une autre, nous avons vécu des situations difficiles. Mais cela ne devrait pas nous rendre aigris mais qu’on devrait profiter de la vie, pardonner et donner l’amour tant qu’on peut car, ne dit-on pas qu’un cœur qui n’a pas d’amour est un cœur qui ne vit pas?"’ répond Albe Diaho, un des réalisateurs des plus estimés du septième art à Pointe Noire. Il parle de trahison, de solitude, de maltraitance et de camaraderie.

"Diboulou", qui signifie trou en français, est une espèce de besace à l’intérieur duquel le réalisateur extirpe des histoires communes et banales mais vues sur petit écran. Il  nous invite à réfléchir et nous oblige à faire face à nos propres préjugés. C’est aussi une série d’histoires sur l’amour qui bouscule les conventions. Qu’est-ce que l’amour ? A-t-il une date de péremption ? Albe Diaho va beaucoup loin dans cette veine. Tout est montré sans pudeur, rien n’est caché. Et à ce sujet, il sied de saluer le courage des comédiens qui ont fait fi des tabous.

Ainsi, "Diboulou" est bâti sur des faits opposés. C'est donc un patchwork de petits récits qui a priori semblent banals mais, dans l’ensemble, sont de leçons de vie. Même si aux premières minutes du film le spectateur a du mal à s'accrocher, on se laisse très rapidement émouvoir par les personnages très attachants et, comme dans un livre ouvert,  on fait irruption dans la vie d’un couple ou gravitent d’autres vies et leurs aventures. "Diboulou" est dans ce sens comme un tableau sur lequel le réalisateur  apporte  des "réponses" (à considérer ou pas). Il invite ainsi l’humain à faire plus du bien que du mal, l’inciter à se découvrir.

" L’homme est de plus en plus en train de perdre ses valeurs. Le bien qu’il devait faire, il le transforme en mal’’, a indiqué le jeune cinéaste. Une réalisation intéressante, un bon jeu d’acteurs et un son de qualité qui sont des atouts de ce film. Le réalisateur voulait une histoire sur l’amour en y incluant d’autres façades de la vie moins rose. Pari réussi !

Dix ans  déjà qu’Albe Diaho traîne sa bosse dans les arcanes du cinéma. Il a débuté avec la réalisation d’une saynète, "Ma conscience et moi". Après cette expérience, il décide de lancer son propre label et réalise "L’autre face de la vie" qui n’a pas pu aboutir. Mais cet échec ne le décourage pas et il se lance dans une nouvelle aventure en signant un nouveau projet nommé "Le choix", un long métrage d'1h10 mn, distribué en format DVD, qui a été bien accueilli par le public ponténégrin.

"Diboulou", son dernier né, lui donnera l’occasion de faire un bond considérable dans la suite de sa carrière. Mais pour que son travail et celui d’autres cinéastes ait une plus grande ampleur, Albe suggère que "L’Etat s’investisse plus", ajoutant: "On ne lui demande pas des sommes exorbitantes mais tout simplement  de nous accompagner comme les font d’autres Etats"

De plus, Albe est convaincu "que les artistes devraient se battre, fournir plus d’efforts et faire plus de sacrifices pour que le cinéma fait au Congo, par les Congolais, ait une belle image et soit de plus en plus sollicité à l'extérieur afin que la culture et l’identité congolaises soient reconnues mondialement".

Aussi, pour que ce changement soit plus efficace, Albe pense que l’artiste, l’Etat et le public devraient se compléter. "Les artistes se doivent de se surpasser en produisant des films de qualité, l’Etat à son tour a le devoir d’accompagnement et le public celui de la consommationé, a-t-il fait savoir, confiant en l’avenir car, en dix ans de carrière, il estime que le regard de la population a évolué. "ll y a quelque temps encore, quand je postais ma photo sur Facebook, il n’y avait pas de commentaires constructifs mais plutôt taquins et je pense démoralisateurs. En fait, c’était plus des formes de moquerie voilée. Mais aujourd’hui, ce sont les mêmes qui viennent nous voir et nous féliciter. Ils nous sollicitent pour qu’on les accompagne dans leurs projets" , a revé Albe,  heureux de voir combien le cinéma au Congo a évolué, notamment en ce qui concerne le jeu d’acteurs. "Avant, quand on regardait un film, on avait l’impression d’écouter une personne réciter un texte. Aujourd’hui, quand on regarde certains de nos films, on a l’impression de voir un film venu d’ailleurs et c’est un véritable bond en avant", a confié le cinéaste qui croit dur comme fer que le septième art congolais aun bel avenir.

La sortie de "Diboulou", en début d’année, prouve bel et bien que le cinéma congolais n’est pas sur le banc de touche.

Berna Marty

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