Insalubrité à Kinshasa : un défi pour le prochain gouverneur

Mardi 12 Février 2019 - 16:13

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Comptée parmi les villes les plus sales, en Afrique et dans le monde, la capitale de la République démocratique du Congo patauge, encore et toujours, dans les méandres d’une insalubrité devenue presque congénitale. Le successeur d’André Kimbuta à la tête de la ville aura, décidemment, du pain sur la planche...

Des montages d’immondices qui jonchent les différentes artères jusqu’à des endroits hier inimaginables, tels que le centre-ville, sont symptomatiques d’une mégalopole en déliquescence. Chaque jour, des tonnes de déchets ménagers et autres déversés sur des lieux publics sans être évacués vers des sites appropriés, rajoutent aux odeurs nauséabondes déjà perceptibles dans certains quartiers. Les Kinois sont, bien malgré eux, condamnés à faire avec cette crasse qui, désormais, a intégré leur environnement immédiat avec toutes les conséquences que cela peut engendrer sur le plan sanitaire.

L’assainissement de la ville étant du ressort de l’autorité urbaine, c’est en vain que les Kinois attendent d’elle des actions concrètes visant à améliorer leur environnement. Les quelques rares initiatives prises, notamment par la Régie d’assainissement de Kinshasa, sont tellement infimes qu’elles sont loin de résorber les quatre-vingt-dix mille tonnes de déchets produits au quotidien dans les vingt-quatre communes. A l’hôtel de ville, on évoque souvent le manque des moyens financiers pour justifier l’état insalubre de Kinshasa qui, après le désengagement de l’Union européenne( UE), a vite sombré dans un encrassement effarant.

L’UE, pour rappel, avait pris en charge les immondices dans neuf communes avec un budget estimé à près de 1 500 000 euros. De nombreux Kinois avaient alors ressenti les effets bénéfiques de ce partenariat qui, à l’époque, avait réussi à rendre propres certains coins de la ville. Des camions estampillés «Union européenne » sillonnaient les rues de la capitale, évacuant des immondices vers des décharges appropriées au grand enchantement de la population.

Et depuis que ce programme avec l’UE a été interrompu, pour des raisons que seuls Kimbuta et ses hommes connaissent, Kinshasa a rêvetu sa vilaine robe. Le gouvernement national d’alors, dirigé par Matata Ponyo, avait émis une fin de non recevoir à la sollicitation de l’exécutif provincial lui demandant de prendre le relais.

L’on se souvient de la polémique née au sujet des domaines de compétence entre les gouvernements central et provincial en matière d’assainissement de la ville. « Le Premier ministre Matata n’a pas pu mettre à notre disposition même un million de dollars par mois. Nous nous sommes débrouillés avec les recettes de la Direction générale des recettes de Kinshasa (DGRK) », a déclaré une source proche du gouvernorat de Kinshasa. A la DGRK, l’on pointe un doigt accusateur sur le gouvernement central qui ne rétrocède guère la quotité censée revenir aux provinces. « L’article de la Constitution qui prévoit l' allocation de 40 % des frais aux provinces pour des recettes nationales n’a jamais été d’application », expliquent les pro Kimbuta. D’où, la persistance, selon eux, de l’insalubrité à Kinshasa nonobstant les quelques actions d’éclat initiées sans grande efficacité. « Si, pendant douze ans, André Kimbuta n’avait pas évacué des immondices, la ville de Kinshasa serait déjà engloutie », laisse-t-on entendre pour se dédouaner.

Un peu d'imagination pour redorer le blason de Kinshasa
Pour de nombreux Kinois, la gestion des immondices n’a jamais constitué une priorité pour l’exécutif provincial sortant qui ne peut se dissimuler derrière le manque de la rétrocession pour justifier l’état insalubre de la ville, eu égard aux nombreuses sources de financement dont il dispose. Bien plus, constatent-ils,  la DGRK, avec les recettes engrangées au quotidien, s’est plus muée en un instrument d’enrichissement illicite de ses cadres plutôt que d’apporter des réponses adéquates  aux préoccupations des citadins. Dans une ville qui compte plusieurs sites érosifs, l’une des solutions, à moindre coût, d’ailleurs, ne consisterait-elle pas à y déverser des immondices qui s’amoncèlent chaque jour sur plusieurs artères, faute d’être évacuées !

Par ailleurs, un projet de recyclage des déchets n’a-t-il jamais effleuré l'esprit des experts de l’hôtel de ville ? Cela constitue, pourtant, une source énergétique importante exploitée dans certains pays occidentaux. Doit-on toujours continuer à se complaire dans l’inaction ou dans une sorte d’hibernation intellectuelle en laissant Kinshasa sombrer dans la décrépitude, sans état d’âme ? Que non. Il est temps d’agir en faisant preuve d’imagination.         

Alain Diasso

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