La Sape, parlons-en !

Lundi 7 Janvier 2013 - 7:30

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S’habiller bien, s’habiller mal, s’habiller tout court, parlons-en ! À la vérité, la « Sape » est un phénomène dont de jeunes Congolais tirent le plus grand plaisir, tant il leur offre une belle occasion de se distraire et, pourquoi pas, de s’épanouir

Par sa définition même, le mot « Sape », acronyme de Société des ambianceurs et des personnes élégantes, ajoute à la langue de Molière dans sa vision francophone ces choses venues d’ailleurs dont elle a besoin pour enrichir son lexique. Dans la pure tradition de la langue française, si le mot « ambiance » figure en bonne place, le substantif « ambianceur » est introuvable. Il s’agit donc d’un congolisme qui s’est incrusté dans le parler de tous les jours et qui s’écrit. Pour ceux qui travaillent sur ordinateur, « ambianceur » est souligné en rouge sur l’écran. N’empêche qu’il se consomme et même se vend bien. Mais après ce petit intermède de mise en train, revenons à la Sape.

Adepte de cette société, l’artiste musicien Rapha Boundzeki, dit le Brazzavillois, ne manqua pas une occasion d’exhiber sa cravate, sa veste, son pantalon, ses chaussures et ses chaussettes. Dans un morceau, La Sape est éternelle !, chanté en duo avec l’icône Papa Wemba Shungu, le Brazzavillois conta l’histoire de la Sape. Pour lui, l’origine de la Sape « date du retour des anciens combattants au pays (au Congo) à la fin de la Seconde Guerre mondiale ». Il en cita de nombreux précurseurs.

Avant lui, disons, bien avant Rapha, la palme était tenue par Djo Balard. Originaire du département du Niari, ce styliste congolais immigré jeune en France faisait parler de lui lors de ses épisodiques séjours à Brazzaville. Les jeunes gens le suivaient dans ses pérégrinations des deux côtés du fleuve Congo, à Kinshasa et à Brazzaville, et nombre d’entre eux couraient après le chef coutumier du village Molokaï, l’inépuisable Papa Wemba. Lui, parlait toujours de « Religion Kitendi ». Ses idoles dans cette religion de l’esbroufe sont Niarcos et le lointain Koko Waya.

Entre Brazzaville et Kinshasa, de tout temps, la Sape est vécue comme un véritable défi. Fernand Mabala, qui s’essaya en musique avec brio avant d’être porté disparu, avait pour principal adversaire dans ce domaine du vestimentaire le grand succès des années 1980 Kester Emeneya. Il est vrai que dans d’autres milieux, la Sape est vécue presque sportivement. Chez les musiciens, la concurrence pour les griffes est plutôt sévère.

Disons, au regard de l’attachement des jeunes et même des vieux à cette religion des gens tirés à quatre épingles, que la Sape est une chose éternelle.

Gankama N’Siah