Les Dépêches de Brazzaville



Centrafrique : le pouvoir multiplie les initiatives pour modifier la Constitution


Des démarches sont menées depuis un certain temps dans les coulisses voire publiquement pour modifier coûte que coûte la Constitution. C’est pour cette raison que plus d’un millier de manifestants ont exigé, le 6 août à Bangui,  la tenue d’un scrutin référendaire afin de permettre à l’actuel président, Faustin Archange Touadéra, de briguer un troisième mandat. Organisée par le Front républicain, proche du régime centrafricain, la manifestation a été l’occasion d’appeler les dirigeants à convoquer un référendum utile à cette fin. Officiellement, les manifestants dénoncent le fait que la Constitution actuelle empêche les jeunes de moins de 35 ans d’être candidat à la présidentielle, et ne demandent pas ouvertement la possibilité au chef de l’Etat de faire un troisième mandat. Quant au pouvoir, il ne cache plus sa position puisque le gouvernement s’est déjà déclaré favorable à une nouvelle loi fondamentale ou à une modification de cette dernière.

« Pour un avenir meilleur, le peuple demande une nouvelle constitution » ou « Touadéra doit continuer », ont scandé les manifestants. « Le peuple ne veut qu’une chose, la modification de cette Constitution qui est caduque (...) Nous demandons une nouvelle Constitution adaptée à la réalité du pays », a déclaré le secrétaire du Front républicain, Hyppolite Ngate, qui, à cette occasion, a remis au Premier ministre, Félix Moloua, présent avec d’autres membres du gouvernement, une demande officielle pour la tenue d’un référendum. Début juillet dernier, des centaines de manifestants du Front républicain que dirige Héritier Doneng avaient déjà exigé une nouvelle Constitution sans pour autant demander ouvertement la possibilité pour le président centrafricain de faire un troisième mandat.

Faire sauter le verrou du plafond de deux mandats

Les réclamations formulées jusqu’à ce jour par les partisans du pouvoir obéissent à la volonté du Mouvement cœurs unis (MCU), le parti de Faustin Archange qui, en mars dernier lors d’un « dialogue républicain » excluant la rébellion et boycotté par l’essentiel de l’opposition, avait tenté d’introduire un amendement faisant sauter le verrou du plafond de deux mandats et permettant ainsi au président d’en briguer un troisième en 2025. Le MCU y a finalement renoncé face au tollé provoqué dans la société civile et à la réprobation de la communauté internationale.

Le projet de révision de la Constitution est dénoncé par l’opposition, notamment une vingtaine de partis politiques et d’associations civiles qui ont déjà formé une coalition visant à empêcher le chef de l’Etat centrafricain de changer la loi fondamentale du pays pour se maintenir au pouvoir. « Nous avons mis en place un bloc républicain pour la défense de la Constitution », a confié Me Crépin Mboli, à l’initiative de cette alliance et à la tête du parti politique d’opposition Patrie. Les opposants assurent que leur coalition a pour objectif de tout mettre en œuvre pour « défendre la Constitution du 30 mars 2016 et faire échec à la tentation d’une présidence autocratique à vie ».

Faustin Archange Touadéra avait été réélu fin décembre 2020 avec 53,16% des suffrages, mais dans un scrutin très controversé, moins d’un électeur sur trois ayant eu la possibilité d’aller voter en raison de l’insécurité dans un pays en proie à une guerre civile très meurtrière depuis 2013. Et au moment de l’élection présidentielle, des groupes armés qui contrôlaient alors deux tiers du pays avaient lancé une offensive pour le renverser, mais le chef de l’Etat a appelé Moscou à la rescousse et des centaines de paramilitaires russes ont débarqué en renfort de centaines d’autres présents depuis 2018 et aidé l’armée à repousser les rebelles.

 

 

 

 


Nestor N'Gampoula